Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/100

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mais à leur influence sur le moi que nous connaissons, que ce sont des preuves toutes tirées de l’observation.

Faut-il maintenant rechercher quelle est la mesure de l’efficacité du motif rationnel, si la part que ce motif a dans nos déterminations est grande ou petite ? Une telle recherche serait des plus malaisées, à cause de la difficulté qu’il y aurait à séparer le motif rationnel des motifs, des mobiles multiples qui se mêlent ou même qui se combinent avec lui. Dans un chapitre précédent, il a été parlé des succédanés de la moralité rationnelle, de tous ces sentiments qui concourent à nous faire accomplir les actions recommandées par la raison. Les sentiments que j’énumérais étaient des sentiments qui pouvaient apparaître sans que la moralité rationnelle existât le moins du monde. À ces sentiments il convient d’ajouter les sentiments que la conception même du devoir rationnel suscite, et qui renforcent l’action du besoin de la raison.

Kant a parlé à plusieurs reprises de l’humiliation que nous éprouvons quand nous pensons au devoir, du sentiment que nous avons de la supériorité de la « loi objective » de la raison sur les impulsions « pathologiques »[1]. Bien que les expressions qu’il emploie ne soient pas toutes très justes, il est certain que nous trouvons souvent un rapport — même en faisant abstraction de toute idée de sanction — entre la façon dont la raison pratique agit sur nous et l’influence qu’exercent sur nous les hommes dont nous reconnaissons la supériorité.

  1. Critique de la raison pratique, 1re partie, I, 3, pp. 133-135, 141.