Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/136

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peut être autre chose que du désiré, c’est chimère que de vouloir séparer complètement les deux notions ; seulement, tout le désiré n’est pas moralement désirable ; le désirable, c’est une certaine sorte de désiré, c’est ce qui se fait désirer du moi pleinement conscient, du moi qui veut avoir l’entière possession de lui-même. Le bien, dit-on encore, c’est, et ce ne peut être que ce que l’on veut ; cela est bon absolument, sans que l’on puisse aller plus loin, que l’on veut irrésistiblement. D’accord ; mais pour constater cette irrésistibilité, il faut qu’au préalable vous adoptiez une certaine attitude, celle qui vient d’être définie. Il y a deux sortes d’irrésistibilité, dans l’ordre pratique : il y a l’irrésistibilité de l’impulsion, qui est simplement le fait que cette impulsion l’emporte sur toutes les forces contraires ; il y a d’autre part l’irrésistibilité de la conviction pratique rationnelle, c’est-à-dire le fait que le moi conscient, raisonnable, est contraint de trouver une action bonne, ou mauvaise. Vouloir fonder la morale sur l’irrésistibilité d’une croyance morale non rationnelle, c’est commettre, comme c’est le cas de M. Rauh, en même temps qu’une erreur psychologique, une erreur dialectique grave.

En définitive, c’est sur une nécessité, je veux dire sur une vérité d’observation, qu’il faudra asseoir la morale. S’il est une fin ou des fins que notre moi, affranchi de toute impulsion aveugle, conscient et maître de lui-même, ne puisse refuser d’adopter, auxquelles sa nature lui fasse une loi de donner son adhésion, ces fins seront les fins morales. Que cette loi dont je parle ici présente des caractères particuliers, c’est ce qu’on a vu au livre précédent. Ce n’en est pas moins une loi