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Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/139

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La thèse à laquelle Sidgwick réserve le nom d’ « hédonisme psychologique », cette thèse, bien qu’elle ait été regardée par nombre de philosophes comme incontestable, est très loin d’être conforme aux faits, et cela, quelque sens qu’on lui donne. Car on peut la prendre en deux sens : on peut entendre que l’homme va à ce qu’il pense devoir lui être le plus agréable, qu’il fuit ce qu’il pense devoir lui être le plus pénible, et on peut entendre aussi qu’il est mû par l’élément affectif qui accompagne dans le présent ses représentations, qu’il cherche nécessairement ce dont la représentation lui est agréable, qu’il fuit ce dont la représentation lui est pénible[1].

Veut-on donc entendre la thèse psychologique des fondateurs de l’hédonisme dans le deuxième des sens qui viennent d’être distingués ? prétend-on que c’est l’élément de plaisir ou de peine présent dans le désir qui détermine nos actions ? Les faits démentent cette assertion. Celui qui s’impose des fatigues, qui se met en danger de périr pour secourir un de ses semblables, n’éprouvait pas toujours, avoir les souffrances de celui-ci, une souffrance personnelle très vive ; parfois même on a plus de plaisir que de peine à voir souffrir les autres, et cela ne nous empêche pas d’aller à leur se cours[2].

Il n’est pas vrai non plus qu’on fasse toujours ce qu’on pense devoir vous procurer dans le futur le plus de plaisir. A côté des actions consécutives d’un

  1. Voir Ehrenfels, System der Werttheorie, Leipzig, Reisland, t. I, 1897, I, 2, §§ 8 sqq. On trouve une discussion intéressante de l’hédonisme psychologique chez M. Simmel, Einleitung, 4, t. I, pp. 293 sqq.
  2. Cf. Sidgwick, Methods of ethics, I. 4, § 2, p. 48.