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Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/148

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De cette discussion, de ces analyses de M. Bergson il y a beaucoup à retenir. Oui sans doute, l’intensité que nous attribuons à une sensation dépend souvent, au moins pour partie, de la grandeur que nous voyons ou que nous supposons à la cause extérieure de cette sensation. Et il est vrai encore que bien souvent l’échelle quantitative que nous dressons avec les états de conscience d’une certaine catégorie est une sorte de transposition d’une série qualitative. Mais devons-nous accorder à M. Bergson tout ce qu’il demande ?

Ce qui met en défiance, tout d’abord, contre la théorie de M. Bergson, c’est l’opposition absolue que celui-ci s’applique à établir entre cette théorie et la conception courante. M. Bergson veut qu’entre le quantitatif et le psychologique il n’y ait aucun rapport. S’il en est vraiment ainsi, sera-t-il possible d’expliquer parfaitement, comme il faut que l’on puisse faire, l’illusion universelle par laquelle nous concevons les états de conscience comme plus ou moins « grands » ? M. Bergson pourra-t-il jeter un pont sur l’abîme qu’il a creusé ?

Mais voyons l’argument sur lequel M. Bergson fonde sa condamnation de la conception commune : cet argument ne me semble pas décisif. M. Bergson veut qu’il n’y ait de mesure que par la superposition dans l’espace. J’accorderai que seule une mesure ainsi opérée a une précision rigoureuse. Il me paraît cependant que cette mesure n’est pas la seule possible, et qu’il y a deux échelles, deux séries quantitatives — et non étendues — où l’on pourra ranger les états de conscience.

La première de ces échelles est celle que détermine