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Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/183

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re, du moment qu’on entreprend de philosopher sur la pratique, passer du premier de ces principes au second.

Il n’est pas jusqu’aux partisans exclusifs de l’égoïsme chez qui on ne puisse trouver une sorte de confirmation de ma théorie. Pourquoi ces philosophes exposent-ils leur doctrine ? Ne devraient-ils pas, logiquement, se borner à la mettre en pratique pour leur compte ? Il y a comme une contradiction à vouloir propager une conception égoïste. Le philosophe égoïste souhaite que sa doctrine soit adoptée par les autres : c’est que sa raison le force à concevoir et à désirer un ordre collectif, si l’on peut ainsi dire, un ordre qui résulterait de la poursuite par les différents individus de fins identiques, quoique distinctes et purement individuelles. Mais à parler exactement il ne saurait y avoir d’ordre collectif, il ne peut y avoir qu’un ordre général ; l’ordre n’existe, et la raison n’est satisfaite qu’autant que les fins individuelles sont ramenées à l’unité, que les individus cessent d’être regardés comme ayant une valeur indépendante et absolue. L’égoïste, du moment qu’il raisonne, qu’il prétend justifier sa conduite par une doctrine, et surtout qu’il prêche cette doctrine, est contraint par la raison de sortir de l’égoïsme, et d’adopter comme principe moral le principe du bien général.