Aller au contenu

Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

analyser un besoin de notre nature, le besoin moral ; et comme ce besoin ne peut être satisfait que par l’exercice de la réflexion, mieux que cela, comme il a sa source dans le fait même de la réflexion, son essence nécessairement doit se manifester dans la direction où il tend d’abord : il ne saurait réclamer essentiellement autre chose que ce qu’on lui voit réclamer tout de suite.

Besoin d’indépendance ou de justification — c’est tout un — et besoin d’unité dans la conduite, le besoin moral est un besoin de la raison, il est le besoin de la raison en tant que pratique. J’ai évité jusqu’ici d’employer le mot de raison ; j’ai parlé seulement de la réflexion, montrant que l’homme devient moral par cela même qu’il est doué de réflexion. À bien parler, la réflexion est la contemplation par l’homme de lui-même, de ses sentiments, de ses actions. Mais du moment que l’on ne s’en tient pas à une contemplation toute passive — où d’ailleurs il est impossible de se tenir, et que l’on ne considère que par abstraction —, du moment qu’à la réflexion l’activité de l’esprit s’ajoute, c’est à la raison que nous avons affaire, la raison n’étant autre chose que la manifestation la plus élevée, la plus complète de cette activité de l’esprit.

Ainsi la raison pratique a pour rôle à la fois d’assurer notre indépendance et d’unifier notre conduite. Et dès lors ce que j’ai dit des rapports de ces deux fonctions permet de deviner dans quel sens il faut résoudre la question de la primauté de la raison spéculative ou de la raison pratique ; cela permet, la primauté de la raison pratique une fois établie, de voir quelle est la destination fondamentale de la raison en général.