Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/201

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des exceptions nombreuses, elles impliqueront une approximation beaucoup plus grossière que celle des lois scientifiques.

J’arrive à la question des rapports du devoir et du bien, question sur laquelle il ne sera pas inutile de nous arrêter un peu. Cette question a été débattue plus d’une fois dans les ouvrages des philosophes : l’utilitarisme, tel que je le présente, la fait disparaître.

Dira-t-on, en effet, que dans ma doctrine le devoir découle du bien ? résumera-t-on cette doctrine ainsi : l’observation nous enseigne que les actions agréables sont nécessairement voulues par nous, quand nous y appliquons notre attention réfléchie, ces actions sont bonnes, en d’autres termes, et c’est parce qu’elles sont bonnes que nous nous regardons comme tenus de les accomplir ? Mais ce serait là s’écarter de l’argumentation que j’ai exposée, et méconnaître ma pensée. Au vrai, le mot bon ne peut avoir tout son sens — son sens moral — que si la notion du devoir y est impliquée : l’action agréable provoque l’adhésion du moi raisonnable ; mais il n’y a rien là de moral, tant qu’on n’a pas développé le contenu de cette idée — je veux dire l’idée du moi raisonnable — ; l’action agréable devient bonne seulement quand on conçoit l’autorité spécifique, la souveraineté de cette raison qui nous la fait vouloir.

Il ne faut pas comprendre, d’autre part, que le bien découle du devoir, et qu’il suffit de poser celui-ci, de montrer comment il résulte pour nous de notre caractère d’êtres raisonnables, pour savoir quelles fins sont bonnes et quelles fins sont mauvaises. La détermination des exigences de la raison pratique ne nous fait pas