Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/202

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connaître immédiatement ce qui satisfera ces exigences, une observation nouvelle doit intervenir ici : cette observation que l’homme, lorsqu’il prend possession de lui-même par la réflexion, ne peut pas ne pas vouloir le plaisir, que le plaisir est bon, et la douleur mauvaise. D’une certaine manière donc l’on peut dire que le de voir ne prendra toute sa réalité qu’après la constatation indiquée ci-dessus.

Ainsi je n’ai garde d’établir un lien de dépendance unilatérale entre les deux notions du devoir et du bien ; je n’ai garde, même, de les séparer complètement. Le devoir ne devient tout à fait réel que lorsque le problème moral a été résolu, lorsque l’observation nous a révélé le bien ; le bien n’est vraiment lui-même qu’autant qu’on croit à l’autorité de la raison, au devoir. Les deux notions se complètent l’une l’autre ; chacune des deux n’a son sens plein que si l’autre y est impliquée. Le devoir et le bien sont en définitive deux aspects d’une même chose : le devoir correspond au problème moral considéré en tant que tel ; le bien, à la solution de ce problème. On serait tenté de dire : le devoir, c’est l’aspect subjectif de ce que le bien exprime objectivement. Il semble en effet que dans la matière qui nous occupe la question soit nôtre, et la réponse à cette question extérieure en quelque sorte à nous. Mais ce n’est là qu’une illusion, favorisée par ce fait que le bien est produit en nous ou pour nous, bien souvent, par des causes extérieures : au vrai, c’est l’observation de nous-mêmes qui nous apprend l’existence des exigences de la raison, et c’est la même observation qui nous apprend, tout pareillement, l’attrait invincible exercé par le plaisir sur le moi réfléchi.