Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/203

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Cependant si les deux notions du devoir et du bien s’impliquent l’une l’autre, il n’est pas indifférent, dans l’exposition de la doctrine, de parler d’abord de l’une ou de l’autre. On pourrait à la rigueur partir de cette constatation que le moi, quand il se libère des influences psychiques impulsives, veut le plaisir et fuit la peine ; après quoi on remarquerait que se libérer de ces influences, que chercher le plaisir, c’est satisfaire en soi la raison, et on relèverait les caractères qui différencient le besoin rationnel pratique des autres besoins de notre nature. Mais on voit sans peine que cette marche renverserait l’ordre didactiquement le meilleur ; elle mettrait à la suite les unes des autres des vérités dont on n’apercevrait pas tout de suite l’enchaînement. Il y a un problème moral ; toute doctrine morale présente un énoncé et une solution de ce problème : il convient dès lors de s’attacher d’abord à donner un énoncé correct du problème, et d’indiquer ensuite la solution proposée pour celui-ci ; ce qui conduira à mettre la notion du devoir avant celle du bien.

Les véritables rapports du devoir et du bien, d’une manière générale, n’ont pas été discernés par les philosophes. Ceux-ci se sont attachés, pour la plupart, d’une façon trop exclusive à l’une ou l’autre de ces deux notions : en telle sorte qu’ils ont été amenés, soit à ne plus pouvoir faire de place à la deuxième, soit à la méconnaître complètement.

C’est à déterminer la notion du bien que se sont appliqués tous les philosophes de l’antiquité classique, et un grand nombre de philosophes modernes ; et ce faisant ils ont négligé de donner au devoir l’attention