Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/229

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aux objections qui s’adressent à l’idée d’ensemble de la formule. Quelle commune mesure nous donnera-t-on pour le développement ou la satisfaction de l’activité, de l’intelligence et de la sensibilité ? J’imagine qu’entre les jouissances on préférera les plus intenses ; mais quand il faudra choisir entre un plaisir et l’acquisition d’une connaissance nouvelle, que prendra-t-on ? la recherche des plaisirs, non seulement nous ôte le loisir de nous instruire, mais peut conduire à un affaiblissement de l’intelligence : quel équilibre adoptera-t-on ici ?

Ce n’est pas tout. La doctrine indiquée par M. Fouillée, outre le tort qui vient d’être dit, en a un autre qui est, si possible, plus grave, c’est de ne pas pouvoir être justifiée. Que signifie, en effet, cette doctrine ? On sera peut-être tenté de croire qu’elle nous invite à donner satisfaction à ces besoins qui correspondent en nous à nos diverses facultés : et le fait que M. Fouillée, dans la sensibilité, ne considère que le plaisir — lequel résulte précisément, à l’ordinaire, de la satisfaction accordée aux inclinations — rend plausible jusqu’à un certain point cette interprétation. Mais de la sorte nous serions ramenés à l’hédonisme : et tel n’est pas le dessein ni même la pensée obscure de M. Fouillée. Au vrai, ce à quoi celui-ci nous engage, c’est à exercer nos facultés, toutes nos facultés, non pour le plaisir que nous en retirerons, mais pour les exercer. Et alors la question se pose, qui n’aura pas de réponse : pour quoi nous faudrait-il exercer nos facultés ? Ces objections, je ne suis pas le premier à les soulever. M. Fouillée les a fait valoir lui-même, quand il critiquait certaines doctrines contemporaines. « Déve-