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Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/23

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II

Il en a été dit assez, dans les pages précédentes, pour établir la réalité de ce besoin — besoin de justification et besoin d’unification de la conduite — qui donne naissance, à mon avis, au problème de la morale. Ce besoin sort nécessairement de notre nature d’êtres réfléchis et raisonnables : et c’est pour cela qu’il est impossible d’en entendre parler sans constater qu’on l’éprouve à un degré plus ou moins fort. Kant l’a bien vu ; et ce n’est pas à tort qu’il a insisté sur cette idée que la meilleure manière de développer la moralité, c’était d’en exposer le concept dans toute sa pureté[1]. Kant a pu errer en attribuant à ce qu’il appelle l’obligation un caractère absolu et en même temps tout formel ; si l’on fait abstraction de ces déterminations contestables qu’il a données de la moralité, il reste que la moralité, comme il l’a affirmé, est un produit de la raison, que celle-ci ne saurait manquer d’avouer immédiatement.

À la rigueur, il suffirait d’avoir montré l’existence et l’universalité de ce besoin qui a été analysé plus haut, et d’avoir montré, en outre, que le problème que ce besoin suscite est le problème pratique fondamental et premier. Ces prémisses posées, je serais en droit de passer outre. Il ne sera pas mauvais, toutefois, d’exa-

  1. Critique de la raison pratique, 2e partie (trad. Picavet, Paris, Alcan, 2e éd., 1902, pp. 278 sqq.).