Aller au contenu

Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/24

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

miner dans quelle mesure l’appellation de besoin moral dont je me suis servi jusqu’ici pour désigner le besoin de justification et d’unification de la conduite est conforme à l’usage ; il convient de voir jusqu’à quel point la morale telle que je la comprends s’identifie avec ce que l’on entend par ce mot : l’examen de cette question corroborera les conclusions où nous sommes par venus.

Les significations que l’on donne au mot morale — celles du moins qui peuvent nous intéresser ici[1] — sont au nombre de deux. Il y a d’une part la morale courante, comme on l’appelle : c’est l’ensemble des prescriptions que la conscience publique, dans une société donnée, impose aux membres de cette société. Il y a d’autre part les morales philosophiques, c’est-à-dire les constructions que les philosophes ont édifiées relativement au bien et au mal, à la conduite de la vie.

Ces dernières morales, il me sera permis de les négliger : quelle que soit leur variété, quelque différents que soient les principes formulés par elles, et la méthode par laquelle elles arrivent à déterminer ces principes, il est clair que le problème qu’elles discutent n’est autre que celui qui a été énoncé plus haut — quel autre problème la pensée rencontrerait-elle lorsqu’elle s’applique à vouloir diriger nos actions ? — À supposer même qu’un doute pût subsister là-dessus, ce doute sera dissipé si je fais voir que la morale vulgaire, à coup sûr plus éloignée que les morales philosophiques de la mo-

  1. Sur les divers sens du mot morale, voir Lévy-Bruhl, La morale et la science des mœurs (Paris, Alcan, 1903), 4. § 2, pp. 100 sqq.