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Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/81

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prévoir, dit M. Rauh, si la vérité morale se révélera à ma conscience ou à celle d’autrui ». À vrai dire, une thèse pareille ne tend à rien moins qu’à renverser complètement la doctrine qu’on a vue tantôt. Cette doctrine ne plaçait-elle pas la « vérité morale » dans la croyance irrésistible, et la croyance n’est-elle pas une chose toute subjective ? Aussi M. Rauh cherche-t-il à échapper à la contradiction. « Le consentement de soi-même à soi-même, écrit-il, reste le dernier critère de la certitude ; mais ce consentement serait impossible si l’adhésion publique lui faisait indéfiniment défaut ». Et que l’on ne comprenne pas que la croyance morale de l’individu n’aura toute sa force que lorsqu’il la verra partagée par les autres. Non, M. Rauh veut dire que cette croyance ne sera valable qu’à cette condition. Mais pourquoi subordonner la « vérité » d’une croyance morale à l’accord des hommes, sinon parce que cette croyance doit répondre aux exigences d’une faculté présente chez tous les hommes, et pareille chez tous, laquelle faculté ne peut être que la raison ?

Mais la tendance rationaliste se manifeste tout d’abord chez M. Rauh par les conditions mêmes qu’il met à la validité de l’ « expérience morale ». Cette expérience n’est décisive que si l’agent y a eu une attitude impartiale, désintéressée. D’où cette prescription viendrait-elle, si ce n’est de la raison, qui nous fait oublier notre individualité, et produit en nous le besoin de la justice, c’est-à-dire de principes pratiques impersonnels ? Et sans nous attacher d’une manière particulière à cette condition de l’impartialité de l’agent dans l’expérience morale, pourquoi cette expérience est-elle soumise à des conditions ? pourquoi M. Rauh ne prend-il pas la