Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1877, tome 1.djvu/214

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mystiques ascètes du néoplatonisme restèrent maîtres des âmes (5).

On a souvent dit que l’incrédulité et la superstition se produisaient et alimentaient l’une l’autre ; cependant il ne faut pas ici se laisser éblouir par l’éclat de l’antithèse. Pour trouver la vérité, il faut examiner avec soin les causes spécifiques, et tenir compte de la différence des temps et des circonstances.

Quand un système scientifique, fondé sur des principes solides, sépare, à l’aide d’arguments décisifs, la foi d’avec la science, il exclut à bien plus forte raison les formes vagues de toute superstition. Mais l’antithèse précitée est vraie aux époques et dans les classes sociales, ou les études scientifiques sont bouleversées et morcelées, comme le sont les formes nationales et primitives de la religion. Ainsi arriva-t-il à l’époque des empereurs.

Il n’y avait en effet aucune tendance, aucun besoin de la vie, auxquels ne correspondît une forme religieuse particulière ; mais à côté des fêtes voluptueuses de Bacchus, des mystères occultes et séduisants d’Isis, se développait en silence et de plus en plus l’amour d’un ascétisme rigide, qui protes sait le renoncement au monde.

Un individu blasé, après avoir épuisé toutes les jouissances, n’est plus sensible qu’au charme de la nouveauté, à celui d’une vie d’austérités et d’ascétisme : il en fut de même de la société antique. Naturellement cette nouvelle direction, contrastant de la manière la plus tranchée avec le sensualisme joyeux du vieux monde, conduisit au parti extrême : fuir la société et renoncer à soi-même (6).

Le christianisme, avec sa doctrine merveilleusement attrayante du royaume qui n’est pas de ce monde, vint a point pour les hommes blasés. La religion des opprimés et des esclaves, de ceux qui vivaient dans les travaux et les souffrances, séduisit aussi le riche avide de jouissances, pour qui le plaisir et la richesse n’avaient plus de charmes. Au principe