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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/456

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point de jonction unitaire pour fondre ensemble les fonctions de tous les sensoriums, dans le cas où il y en aurait plusieurs. Il suffit qu’il y ait jonction.

Si les différents sensoriums n’étaient pas unis dans le cerveau, non seulement nous aurions devant nous une énigme métaphysique, mais il serait impossible de comprendre mécaniquement l’homme comme un simple être de la nature, tel que nous l’avons décrit dans le chapitre : Le cerveau et l’âme. Mais si l’on accorde une jonction, qui n’exige pas d’ailleurs de point central unitaire, pas d’« images » toutes prêtes dans le cerveau, il ne reste à résoudre que l’énigme métaphysique : comment, de la multiplicité des mouvements des atomes, peut naître l’unité de l’image psychique ? Ainsi que nous l’avons déjà souvent fait remarquer, nous tenons cette énigme pour insoluble ; toutefois on peut aisément entrevoir qu’elle reste la même et aussi obscure, soit que l’on admette, soit que l’on rejette une réunion mécanique des excitations pour former une image dans un centre matériel. Si nous appelons synthèse l’acte de la transition physique à l’unité psychique, cette synthèse restera également inexplicable, soit qu’elle ait rapport à la réunion des nombreux points discrets d’une image toute prête, soit qu’elle se réfère aux simples conditions de l’image, disséminées dans l’espace. Dans la philosophie de Descarteset dans celle de Spinoza, l’intuition des images du cerveau par l’âme, si l’on éloigne l’expédient, bien connu, du préjugé qui introduit dans l’homme un autre homme, cette intuition reste aussi inexplicable que la production directe de l’image psychique par les conditions physiques de cette image.

Certes, quand un homme se met à observer un métier de tisserand et cherche à deviner le module du tissu d’après le mécanisme de l’appareil et d’après le mode dont les fils de la chaîne sont tendus, il éprouve plus de difficulté que lorsqu’il regarde le modèle directement sur l’étoffe achevée. Or, pour que l’intuition s’effectue, il faut d’abord que, par