Page:Langevin - La notion de corpuscules et d'atomes, 1934.djvu/7

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mélange d’isotopes, chaque isotope représentant un groupe d’atomes, tous identiques entre eux. Ces atomes s’associent pour former des molécules suivant des lois discontinues, et sont eux-mêmes construits à partir de corpuscules électrisés, dont la découverte remonte aux trente et quelques dernières années.

La Chimie, naturellement, ne nous renseigne que sur les masses relatives de ces atomes. Elle admet que, dans ce que nous appelons l’atome-gramme d une substance élémentaire, ou d’un isotope, dans la molécule-gramme d’un composé quelconque, ou dans l’ion-gramme d’un produit de décomposition électrolytique, il y a toujours un même nombre « N » de particules, atomes, molécules ou ions, et que les masses — atomiques, moléculaires ou ioniques — que la Chimie introduit, correspondent à la masse de nombres égaux à « N », de chaque espèce d’atomes, de molécules ou d’ions.

Ces masses déterminées par la Chimie nous donnent les valeurs relatives des masses atomiques ou moléculaires individuelles. Mais la Chimie ne nous en donne pas la valeur absolue ; elle ne nous donne pas le nombre « N ».

C’est la Physique qui a commencé à nous renseigner sur ce nombre, tout d’abord par l’intermédiaire des méthodes dites statistiques, par l’application de la théorie cinétique, principalement aux substances à l’état gazeux. Cette théorie a permis d’évaluer « N » en étudiant ce que nous appelons les fluctuations, c’est-à-dire les écarts expérimentaux à partir du principe de Carnot, tels que le mouvement brownien, le bleu du ciel et d’autres phénomènes de ce genre.

Ces évaluations se sont trouvées remarquablement convergentes, mais assez imprécises encore tant que l’électricité n’est pas entrée en jeu. C’est par l’intermédiaire de la science électrique, une des plus physiques qu’on puisse imaginer, que, pour la première fois, de la précision a pu être introduite dans la mesure des grandeurs corpusculaires ou moléculaires. En particulier, l’admirable expérience de Townsend et de J. J. Thomson, reprise par Millikan, a permis de mettre en évidence la structure granulaire des charges électriques et de mesurer — avec une précision qui, aujourd’hui, est de l’ordre du millième — la grandeur du grain d’électricité positive ou négative.

Vous savez que cette découverte a été rendue possible par