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[Lect. III.]
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RIG-VÉDA. — SECTION SIXIÈME.

Vritra, que tes coursiers t’amènent sur ton char. Qu’ils t’éloignent des sacrifices qui ne sont pas les nôtres.

15. (Dieu) brillant, ami du soma et honoré par tant de sacrifices, viens de près écouter nos hymnes aujourd’hui. Que nos heureuses libations fassent ta joie.

16. Un homme nous conduisait : mais voilà qu’il ne saurait nous diriger, ni toi, ni moi, ni aucun autre[1].

17. Alors Indra a dit : « (cet homme n’est plus qu’une) femme à l’esprit incapable, à l’œuvre légère. »

18. (Récit). Les deux chevaux (d’Indra), attirés par le soma, amènent son char. L’avant-train de (ce char) fécond est redressé.

19. (Indra parle). « (Chef efféminé), baisse les yeux. N’élève plus le regard. Cache ta chaussure (sous ton vêtement) ; que l’on n’aperçoive plus les chevilles de tes pieds. Tu étais prêtre, tu es devenu femme. »


HYMNE III.
À Indra, par Nipatithi, enfant de Canwa.
(Mètres : Anouchtoubh et Gâyatrî.)

1. Ô Indra, viens avec tes chevaux écouter l’hymne de Canwa. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici[2].

2. Que le mortier plein de soma résonne, et t’appelle par son bruit. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

3. Le pilon[3] (des sacrificateurs) agite (le soma), comme le loup (secoue) la brebis. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

4. Les enfants de Canwa t’appellent à leur secours et te demandent l’abondance. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

5. Je t’offre, comme à un (dieu) libéral, la première part des libations. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

6. Viens heureusement à notre secours, (Dieu) sage et soutien du monde. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

7. Viens à nous, (Dieu) prudent, doué d’une puissance sans bornes, d’une libéralité infinie. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

8. Que l’adorable sacrificateur établi par Manou au milieu des Dévas l’amène (en ces lieux). Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

9. Que tes deux coursiers azurés, avides de notre soma, te soutiennent, comme les ailes (soutiennent) l’épervier. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

10. (Puissant) Arya, viens à notre swahâ, et bois le soma, toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

11. Approche-toi de nous, et réjouis-toi de nos hymnes. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

12. Rassemble tes coursiers, tous également beaux, et viens vers nous. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

13. Viens, et (amène) ces montagnes qui remplissent l’air et (couvrent) le ciel. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

14. (Noble) héros, envoie-nous des troupeaux innombrables de vaches et de chevaux. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

15. Apporte nous les biens par centaines et par milliers. Ô toi qui brilles au ciel, viens briller près de celui qui brille et commande ici.

16. Indra et nous, nous nous faisons mutuellement des présents. Lui, il donne à (ses serviteurs) tout brillants d’opulence des milliers de robustes coursiers.

  1. Tout ce passage se rapporte, dit-on, à l’aventure d’Asanga, fils de Playoga ou Prayoga, changé en femme à la suite d’une imprécation. Voy. sect. V, lect. vii, hym. v, st. 34 où la virilité lui est rendue. Asanga est Agni dont les feux ne forment plus un faisceau lumineux : il s’éteint. Il était mâle et prêtre ; il n’est plus que femme, jusqu’à ce que par les mérites de Saswatî (l’Aurore) il retrouve sa virilité.
  2. Ce passage renferme trois fois le mot div, répété, ce me semble, avec un sens différent. Dans divâvaso, div a le sens de ciel ; dans divam, il me semble signifier lieu de plaisir, ou bonheur ; dans divah, il veut dire être brillant (Agni ou sacrificateur). De sorte que littéralement je traduirais : habitant du ciel, viens dans la demeure fortunée (du dieu) brillant qui commande ici ; ou bien, en faisant du verbe yayati un causatif : habitant du ciel, fais venir le bonheur du sacrificateur qui commande ici.
  3. Le texte porte le mot némi, qui signifie roue. C’est peut-être la corde du pressoir.