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[Lect. V.]
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RIG-VÉDA. — SECTION SIXIÈME.

2. Pour plaire à Manou et répondre à son amitié, le (divin) sacrificateur s’est assis devant le brillant soma.

3. En faveur des mortels (les prêtres) attirent dans le foyer ce (dieu) protecteur : endormi au sein (de l’Aranî), il se laisse charmer par leurs voix.

4. Cependant (le dieu) prend son arc, (et lance ses flèches) ardentes. Fort de la nourriture qu’il prend, il s’élève au-dessus de son bûcher, et sa langue lèche la pierre (du foyer).

5. Alors le veau (divin du sacrifice) s’élance en brillant hors de ce foyer qui le contient. Il est accueilli par les sons (glorieux) de l’hymne.

6. L’œil est frappé du magnifique appareil de son large char, attelé de nobles coursiers[1].

7. Sept personnes[2], deux (maîtres de maison) et cinq (officiants), sont occupées à traire la vache[3] que le sacrifice a installée sur les bords de l’onde retentissante.

8. Indra, excité par (la liqueur qu’ont exprimée) les dix (doigts) du sacrificateur, a détaché du ciel le trésor (du nuage) avec son arme à triple pointe[4].

9. Le (dieu) rapide et doué d’une triple couleur[5] enveloppe le sacrifice de sa (flamme) nouvelle. Les prêtres l’arrosent de leur miel (savoureux).

10. Ils versent avec respect la libation au sein de ce (dieu) invincible et sauveur qui élève sa roue (dans le ciel), et qui, en parcourant le monde, a son pied sur la terre.

11. À ses côtés les Mortiers répandent dans le Pouchcara[6] leur douce liqueur, pour donner de la force à ce noble héros.

12. Vaches du sacrifice, approchez-vous de ce grand (dieu), dont les larges oreilles entendent nos prières, et sont pour nous comme une mine d’or[7].

13. Arrosez donc de vos libations celui qui est l’ornement et le soutien du Ciel et de la Terre. Faites siéger le puissant (Agni) au sein de vos Ondes.

14. Comme les veaux qui avec leurs mères (reviennent à l’étable), reconnaissez ici votre demeure, et accourez à l’envi avec toute votre famille.

15. Sur les lèvres (d’Agni) l’offrande est placée. Gloire et adoration au Ciel, à Indra, à Agni !

16. Que le père de famille[8], avec les sept rayons de Soûrya, présente l’offrande des mets (sacrés) et de l’hymne aux sept pieds[9].

17. Ô Mitra et Varouna, au lever du soleil (l’homme) pieux offre le soma. C’est là un remède pour tous ses maux.

18. Ainsi, que la flamme placée (dans le foyer) par Haryata étende de tous côtés vers le ciel sa langue (divine).


HYMNE VI.
Aux Aswins, par Gopavana, fils d’Atri ou Saptavadhri.
(Mètre : Gâyatrî.)

1. Venez, Aswins, à la voix du sacrificateur ; attelez votre char. Que votre secours soit toujours présent !

2. Ô Aswins, accourez sur votre char plus rapide qu’un clin d’œil. Que votre secours soit toujours présent !

3. En faveur d’Atri, ô Aswins, détruisez la chaleur par le froid (de l’eau)[10] Que votre secours soit toujours présent !

4. Où êtes-vous ? Où vous êtes-vous retirés ? Où fuyez-vous, tels que des éperviers ? Que votre secours soit toujours présent !

5. En quelque lieu que vous soyez, écoutez au-

  1. Le commentateur pense que dans tout ce passage il s’agit d’Agni Vêdyouta, ou du soleil s’élançant dans le ciel. J’ai restreint ce sens : je ne vois ici que le feu du sacrifice.
  2. Voir plus haut, page 437, col. 2, note 2. Le texte présent semble devoir faire modifier un peu cette note en admettant deux yadjamânas, sans doute l’époux et l’épouse. Le commentaire explique ce passage en disant qu’il y a deux personnages, appelés Pratiprasthâtri, et cinq autres, qui sont l’Yadjamâna, le Brahman, le Hotri, l’Agnidhra, et le Stotri.
  3. La vache du sacrifice est la flamme d’Agni, que la libation arrose et nourrit. Voilà pourquoi, au lieu de voir dans cette phrase les bords d’une rivière, comme la Sarasvatî ou autre, j’aimerais mieux supposer que tirtha est le vase des libations.
  4. Le texte porte khédayâ trivritâ. Le commentaire traduit le mot khédâ vaguement par rasmin. J’ai cru qu’il était question de la foudre, et que l’observation indienne pourrait être d’accord avec l’observation des poëtes latins, qui donnent à la foudre les épithètes de trifidum, trisulcum. J’aurais pu traduire : avec son char à trois roues ; car le sens littéral de trivrit est doué de trois roues ; mais il peut vouloir dire aussi triangulaire (trih pracâravartanavat).
  5. L’épithète tridhâtou fait allusion, dit-on, à la triple couleur d’Agni, rouge, blanche et noire.
  6. Nom donné au vase du foyer.
  7. J’avoue que la traduction de cette phrase est hasardée. Le texte donne au dieu deux oreilles d’or.
  8. Le commentaire suppose que le mot arih se rapporte au dieu Vâyou.
  9. Saptapadi. Allusion aux sept espèces de mètres tchhandas).
  10. Voy. pages 73, 109 et 114.