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[Lect. II.]
INDE. — POÉSIE LYRIQUE.

2. Messager des Dieux (décoré du nom de) Narasansa[1], viens ici avec tes coursiers parés de toutes les formes. Que le plus grand des Dieux honore les Dieux ; qu’il suive la voie de Rita et reçoive nos adorations.

3. Les enfants de Manou, avec leurs holocaustes, chantent l’éternel Agni, et le chargent d’être leur messager. Sur ton char rapide, traîné par d’excellents coursiers, transporte les Dieux, et viens t’asseoir ici comme sacrificateur.

4. Que le Gazon (sacré), aimé des Dieux, s’étende et se prolonge de tous côtés. Qu’il exhale ses doux parfums. Ô Gazon[2] divin, sois bon, et honore les Dieux dont Indra est le chef.

5. Allez toucher le sommet du Ciel, ou bien élargissez-vous sur la terre, ô Portes (saintes). Recevez avec un pieux empressement le char divin qui arrive sur votre grand seuil avec les grands (Dieux).

6. Filles divines du Ciel, charmante Aurore, Nuit charmante, placez-vous à notre foyer. Que les Dieux, qui vous désirent comme vous les désirez, ô fortunées (déesses), se placent sur leur large siége.

7. Le mortier est dressé ; les vastes feux d’Agni pont allumés ; ses rayons brillent sur le sein d’Aditi. Ô couple de pontifes sages[3] qui présidez à ce sacrifice, accordez-nous le bonheur.

8. Ô déesses que nous honorons au nombre de trois[4], asseyez-vous sur ce large gazon. Nous avons voulu vous plaire. Nous imitons Manou ; et des holocaustes choisis, avec Ilâ au pied de ghrita, décorent notre sacrifice.

9. Ô sage et divin Twachtri, qui possèdes et donnes la richesse, tu as revêtu ta belle forme, et tu t’es associé aux Angiras. Empresse-toi d’offrir aux Dieux l’holocauste qui leur est destiné.

10. Ô sage Vanaspati[5], que tes rênes dirigent (ton char) ; et transporte la nourriture des Dieux. Que le divin (Vanaspati) donne de la douceur à nos holocaustes. Que le Ciel et la Terre exaucent mon invocation.

11. Ô Agni, amène à nos offrandes Varouna et Indra du ciel, et les Marouts de l’air. Que tous les Dieux immortels et adorables se réjouissent de notre Swâhâ, et prennent place sur notre gazon.


HYMNE X.
À la parole sainte, par Vrihaspati, fils d’Angiras.
(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Ô Vrihaspati, le nom de la Parole (sainte) doit être placé avant tout. (Ô mes enfants), prononcez ce nom qui est pour nos amis le plus grand, le plus salutaire. Qu’avec affection il soit proféré sur le foyer, et que sa vertu s’y manifeste hautement.

2. Comme l’orge se purifie dans le crible, la Parole (sainte) se forme dans l’âme des sages. C’est là l’épreuve des vrais amis ; car toute leur valeur est dans la (sainte) Parole.

3. Les (hommes) dans le sacrifice prennent la route que leur indique la Parole (sainte). C’est elle qu’ils suivent personnifiée dans les Richis. C’est elle que les (prêtres) portent et distribuent partout. C’est elle que célèbrent les sept Chantres.

4. Mais il est tel (homme) qui voit sans voir la (sainte) Parole ; tel autre qui entend sans l’entendre. Il est aussi tel autre dont (la Déesse) aux beaux vêtements, au cœur amoureux, rapproche son corps, comme l’épouse (se rapproche) de son époux.

5. Un (sacrificateur) peut passer pour être solide en amitié, et cependant l’abondance ne suit pas ses efforts. La (Vache) magique du (sacrifice) ne donne point de lait. Il entend la (sainte) Parole ; mais elle est inféconde et sans vertu.

6. La (sainte) Parole n’est point en celui qui trompe ainsi les espérances d’un ami. S’il entend, ce n’est que pour l’apparence. Mais il ne connaît point la voie par où l’on arrive aux fruits.

7. Ces amis ont des yeux et des oreilles ; leur âme est pour les œuvres aveugle et sourde. Il me semble voir des nageurs auxquels il faudrait de l’eau jusqu’à la tête, et qui se baignent dans des lacs qui ne leur en donnent que jusqu’à la ceinture.

8. Quand de tels prêtres[6] sont vos amis pour le service divin, quand pour des œuvres qui exigent une âme vive et sage vous n’avez que de pareils lacs (desséchés), les saintes ordonnances sont violées, et les ministres du sacrifice s’égarent dans leur route.

9. Ces malheureux qui ne vont ni avec les hommes ni avec les dieux, ne sont point dignes

  1. Voy. page 48, col. 1, et alibi.
  2. Le nom ordinaire de ce gazon est Varhis, autrement Cousa (Poa cynosnroides).
  3. Voyez page 552, col. 2, note 1.
  4. Ilâ, Bhâratî, Saraswatî.
  5. Nom d’Agni. Voy. page 48, col. 1, et alibi.
  6. Le texte porte le mot Brâhmanah.