Page:Langlois - Seignobos - Introduction aux études historiques, 1899.djvu/26

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ments, l’histoire d’immenses périodes du passé de l’humanité est à jamais inconnaissable. Car rien ne supplée aux documents : pas de documents, pas d’histoire.

Pour conclure légitimement d’un document au fait dont il est la trace, il faut prendre de nombreuses précautions, qui seront indiquées plus loin. — Mais il est clair que, préalablement à tout examen critique et à toute interprétation des documents, se pose la question de savoir s’il y en a, combien il y en a, et où ils sont. Si j’ai l’idée de traiter un point d’histoire[1], quel qu’il soit, je m’informerai d’abord de l’endroit ou des endroits où reposent les documents nécessaires pour le traiter, supposé qu’il en existe. Chercher, recueillir les documents est donc une des parties, logiquement la première, et une des parties principales, du métier d’historien. En Allemagne, on lui a donné le nom d’Heuristique (Heuristik), commode parce qu’il est bref. — Est-il utile de démontrer l’importance capitale de l’Heuristique ? Non, sans doute. Il va de soi que, si on ne la pratique pas bien, c’est-à-dire si l’on ne sait pas s’entourer, avant de commencer un travail historique, de tous les renseignements accessibles, on augmente gratuitement ses chances (toujours nombreuses, quoi qu’on fasse) d’opérer sur des données insuffisantes : des œuvres d’érudition ou d’histoire, faites conformément aux règles de la méthode la plus exacte, ont été viciées, ou même totalement annulées, à cause de cette simple circonstance matérielle que l’auteur ne con-

  1. En pratique, le plus souvent, on ne se propose point de traiter un point d’histoire avant de savoir s’il existe ou non des documents qui permettent de l’étudier. C’est, inversement, un document, découvert par hasard, qui suggère l’idée d’approfondir la question d’histoire que ce document intéresse et de colliger, à cet effet, les documents du même genre.