Page:Lanne - Le Mystère de Quiberon, 1904.djvu/193

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« Paris, 26 juin 1795. — Au nom du Roi[1], il vous est enjoint de ne vous soulever que lorsque vous recevrez une nouvelle commission du Conseil des princes. Ce serait exposer le pays que vous commandez et vous-mêmes, à de graves inconvénients, que d’outrepasser l’ordre ci-joint.

» Au nom du Conseil de l’agence royale.


» Signé : Brottier. »

Ces dépêches sont de véritables chefs-d’œuvre de perfidie. Chaque mot cache un sous-entendu qui mériterait un commentaire. Développer une commission, insuffisamment explicite, pour inciter un major général à usurper les pouvoirs du commandement supérieur, est une trouvaille de rédaction ; mais que dire des habiles détours employés pour indiquer discrètement le point principal sur lequel il faut contrecarrer les plans du général en chef. Ces plans paraissent hostiles au rétablissement de la branche aînée des Bourbons, c’est-à-dire à la proclamation de Louis XVIII. M. d’Hervilly, qui connaît beaucoup mieux les intentions des émigrés, c’est-à-dire le mot d’ordre de Vérone, veillera à ce qu’aucune trahison ne vienne le surprendre, c’est-à-dire à ce que Louis XVII ne soit pas proclamé, et ne s’avancera que lorsqu’il sera assuré du

  1. Pour les simples chefs auxquels on n’avait pas à demander usurpation de pouvoirs formelle, on n’usait pas d’autant de circonlocutions. Il y avait cependant un point particulièrement délicat : obéiraient-ils tous à un ordre donné au nom du roi Louis XVIII ? On se tirait d’embarras en donnant l’ordre au nom du roi, tout court. La différence entre les deux dépêches du même jour, est remarquable.