Page:Lanne - Le Mystère de Quiberon, 1904.djvu/41

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c’était pour souhaiter sa délivrance, espérée, mystérieusement pressentie ; et si l’on parlait du comte de Provence, l’inquiétant Régent, c’était pour gémir sur ses tendances jacobines et anti-saliques et pour s’effrayer de ses allures louches et de ses ambitions mal dissimulées. Là, on ne concevait le changement attendu que sous sa forme la plus simple : le rétablissement du culte catholique et la restauration de l’antique dynastie suivant l’ordre traditionnel de la loi d’hérédité, avec le bienfait de réformes un peu vaguement définies, mais fermement espérées, pour lesquelles on s’en fiait au respect, non mis en doute, des généreuses intentions du roi martyr. Il est même à remarquer que dans les contrées où la ferveur royaliste se montrait le plus active, comme la Vendée et la Bretagne, certaines servitudes et certains privilèges paraissaient considérés, dès lors, comme irrévocablement abolis[1].

Ces dispositions des royalistes de l’intérieur, imparfaitement mesurées par les princes et les émigrés qui gravitaient autour d’eux, n’en étaient pas cependant entièrement ignorées. Les aspirations à un régime plus libéral et la fidélité inébranlable à l’ordre légitime de succession leur étaient un égal sujet d’inquiétude. De là cette méfiance, cette malveillance de l’émigration à l’égard de la Vendée. De là cette politique — trop absurde sans ce motif, — qui faisait envoyer des

  1. Puisaye allait même plus loin. Voici ce que dit Michelet, d’après Servary[sic] : « Homme terriblement antipathique aux émigrés. Il immolait leurs intérêts aux Chouans, donnant à ses assignats, puis à son emprunt anglais pour gage et pour garantie les propriétés d’émigrés. »