Page:Lanne - Le Mystère de Quiberon, 1904.djvu/59

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à corps et à biens perdus dans l’insurrection ; pour provoquer ces désertions en nombre inusité dans l’armée républicaine et l’insubordination presque générale des équipages de la flotte passant en masse au camp royaliste.

La réalité et la valeur des ressorts préparés qu’il s’agissait de faire mouvoir, avaient été évidemment démontrées aux ministres anglais, qui ne se seraient pas lancés en aveugles dans une aventure où l’entrée de jeu était de plus de cinquante millions. Les secours de l’Angleterre aux insurgés de l’Ouest avaient été jusque-là parcimonieusement mesurés. Les plans de Puisaye furent adoptés sans discussion, et pour les mettre à exécution on lui accorda, sans marchander, tout ce qu’il demandait.

L’aveu des princes français, indispensable à Puisaye pour que son autorité fut à l’abri de toute contestation, ne fut pas, dit-on, obtenu sans difficultés. On raconte que, lorsqu’il fut présenté au comte d’Artois, qui ne l’avait jamais vu, celui-ci, après sa sortie, ne pût retenir cette exclamation : « J’ai cru voir la tête de Robespierre[1]. » Il est bien vrai qu’on nourrissait contre lui, à la cour des princes, des préventions hostiles, fondées sans doute sur autre chose qu’une douteuse ressemblance. Il est vrai aussi qu’au moment de son départ, l’hostilité de ces mêmes princes contre lui s’accusa de la manière la plus violente. Plusieurs historiens ont noté ces deux faits et

  1. Ce n’est d’ailleurs qu’après le désastre de Quiberon, à l’île d’Houat, que Puisaye fut reçu pour la première fois par le comte d’Artois, et que celui-ci fit part à Vauban de cette impression, et non pas en novembre 96, comme le dit M. Chassin.