nom de raison de Dieu par un philosophe qu’Eusèbe croit être le même que saint Jean, etc. »
De là vient qu’on appelle les Tao-sse « les rationalistes, » et leur doctrine « le rationalisme. » Les preuves que je vais rapporter engageront, je l’espère, les savants à renoncer à ces dénominations.
On conviendra sans peine que le plus sûr moyen de comprendre le sens de Tao 道 dans la doctrine de Lao-tseu, c’est d’interroger le maître lui-même, et de consulter les philosophes de son école les plus rapprochés de l’époque où il a vécu, tels que Tchoang-tseu, Ho-houan-tseu, Ho-chang-hong, etc. qui sont tous antérieurs à l’ère chrétienne. Or, suivant eux, le Tao est dépourvu d’action, de pensée, de jugement, d’intelligence[1]. Il paraît donc impossible de le prendre pour la raison primordiale, pour l’intelligence sublime qui a créé et qui régit le monde.
Telle est cependant l’idée que plusieurs savants dont je respecte et partage les croyances voudraient absolument trouver dans le Tao de Lao-tseu. Mais, en matière d’érudition, on doit s’étudier à chercher dans les écrivains de l’antiquité ce qu’ils renferment réellement, et non ce qu’on désirerait d’y trouver.
Le sens de Voie, que je donne au mot Tao 道 résulte clairement des passages suivants de Lao-tseu : « Si j’étais doué de quelque prudence, je marcherais dans le grand Tao (dans la grande voie). — Le grand Tao est très-uni (la grande Voie est très-unie), mais le peuple aime les sentiers. (Ch. liii.) — Le Tao peut être regardé comme la mère de l’univers. Je « ne connais pas son nom ; pour le qualifier, je l’appelle le Tao ou la Voie. » (Chap. xxv.)
- ↑ Quelque étrange que puisse paraître cette idée de Lao-tseu. elle n’est pas sans exemple dans l’histoire de la philosophie. Le mot nature n’a-t-il pas été employé par certains philosophes, que la religion et la raison condamnent, pour désigner une cause première, également dépourvue de pensée et d’intelligence ?