206 L'ILE INCONNUE. des cadets de famille. Je n'en serais pas surprise, je suis même sûre d'avoir un jour payé une course à un gentleman. Le cocher anglais est un homme de cheval, le cocher français n'est qu'un paysan incapable de voir dans l'animal autre chose qu'un instrument de gain.
Tous les étrangers sont frappés de la tenue et du grand caractère des Bobbies, comme on les appelle affectueusement du petit nom de Sir Robert Peel (Bob) qui les a organisés en 1829. Ces bons géants casqués que l'on rencontre partout où ils doivent être, surveillent et règlent le mouvement de la rue avec un sang-froid, une intelligence dignes de tous les éloges. Eux aussi, comprennent le cheval, je les ai vus souvent, pendant les arrêts un peu longs, calmer d'un mot ou d'une caresse les bêtes impatientes. Ils savent interrompre le trafic au moment voulu et, pour cela, ils étendent la main d'un geste lent qui a de l'autorité, de la noblesse même et qui est toujours obéi parce qu'il est toujours fait à temps. Nos petits sergents de ville piétinant nerveusement sur les refuges, coupant la file des voitures à tort et à travers, sans égards pour les cochers et les chevaux, lançant quelquefois, par pur besoin de parler, un inimitable : « Allons ! roulez ! » me fournissent un autre exemple de la différence du tempérament anglo-saxon et du tempérament français.
J'ai eu l'occasion de voir les Bobbies dans trois terribles coups de feu : au mariage du duc d'York, au dernier Jubilé de la reine Victoria et au couronnement du roi. Je n'ai pas cessé d'admirer leur sangfroid et surtout la bonté mêlée de respect avec la-