Page:Laperche - Noblesse americaine.djvu/15

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pousse la pitié vers une infortune quelconque, disons les aveugles. On ne pense plus qu’à eux. Les bazars s’organisent, l’argent afflue, les asiles s’élèvent. C’est le plus remarquable exemple de suggestion que l’on puisse voir.

Personne n’a plus que les Américains, la conscience de la brièveté de l’existence. Cette conscience les talonne, sans qu’ils s’en rendent compte. Elle excite les hommes au travail, les femmes au plaisir, et les rend forcément égoïstes. La vie est courte amusons-nous ! (let us have a good time). La vie est courte, pas de sentimentalités, pas de relations inutiles. Il faut que tout rapporte, que tout serve à s’élever.

Ce n’est pas parmi les mondaines que se trouvent le plus de vertus et de qualités. Mais il y a, en Amérique, une classe nombreuse de femmes sérieuses, instruites, d’une honnêteté à toute épreuve, qui forment l’armature de l’Amérique, comme les provinciales et les bourgeoises forment l’armature de la France.

Soit que le mélange des races, la liberté, l’éducation rationnelle aient produit une variété distincte dans l’espèce féminine, soit que l’Américaine n’ait pas atteint son développement — et c’est probable, — sa nature est simple, tout objective, elle n’est encore qu’une visuelle.

Aucune créature ne jouit plus complètement de la vie, n’en tire autant de satisfactions et de plaisirs.

Son jugement n’est troublé ni par un excès de sentiment, ni par un excès de sensualité ; sa vision est très nette et très juste.