Page:Laperche - Noblesse americaine.djvu/465

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cette congestion pulmonaire. Plus il relisait son adieu, plus il était convaincu qu’elle avait cherché la mort et qu’on lui cachait la vérité. Il la voyait toujours, maintenant, comme après la scène terrible, s’éloigner, s’éloigner, d’un pas automatique, à travers l’enfilade des salons, se rapetisser, puis disparaître. Cette impression ressortie assez curieusement dans son cerveau, jetait en lui une désolation profonde. Il ignorait que son amour avait reçu le coup mortel, qu’il n’aurait jamais retrouvé auprès de Christiane, le bonheur d’autrefois. Il ne savait pas combien Dieu avait été miséricordieux en la rappelant. Non, il ne pouvait pas savoir, et il la regrettait passionnément. Ces regrets, et les pensées morbides qu’ils engendraient avaient le plus fâcheux effet sur son physique et son moral. Il éprouvait une lassitude extrême, dormait mal, et des pâleurs d’anémie se montraient sur son visage. Il ne s’intéressait plus à rien, p^s même aux choses de Blonay. Par un sentiment de pudeur et de délicatesse, lorsqu’il se trou ait en présence de sa mère et de sa femme, il s’efforçait de surmonter sa tristesse. Jamais il n’apprécia mieux le caractère d’Annie que dans ce moment difficile. Elle ne lui faisait aucune question embarrassante, ne le fatiguait pas de ses attentions, et il lui savait gré d’avoir tant de tact.

La joie d’être réconciliée avec son mari, la pensée de revoir sa famille, chassait tous les souvenirs pénibles du cœur de la marquise. Le visage altéré do Jacques ne l’effrayait ni ne l’affligeait outre mesure. Elle était sûre que le voyage d’Amérique le remettrait complètement. Une seule chose l’in-