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Page:Lapicque - Les Nègres d’Asie et la race nègre en général, paru dans les Bulletins et Mémoires de la Société d’Anthropologie de Paris, 1906.djvu/14

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ce caractère, devait être petite, plus haute pourtant que celle des Andamanais.

Quant au nom qu’il convient de lui attribuer, la discussion des faits sociaux et linguistiques sur lesquels est fondée la notion de Dravidien permet d’établir que ce nègre était antérieur aux Dravidiens ; il faut donc l’appeler Prédravidien, ou si nous voulons lui donner un nom qui ne soit pas relatif à une autre population, on peut l’appeler Nègre Paria.

De l’Inde à la Mer Rouge. — Pour rejoindre ces nègres de l’Inde à ceux de l’Afrique, il faudrait trouver quelque témoin ancien au milieu des populations iraniennes ou sémitiques qui occupent aujourd’hui l’intervalle. Ce témoin, je l’ai vainement cherché tout le long du rivage nord du golfe d’Oman et du golfe Persique. Les documents archéologiques de la Suzianne établissent peut-être qu’il y avait aux temps reculés qui ont vu bâtir ces monuments dans la région du Chott-El Arab, des hommes à visage noir, mais ceux-ci étaient en tout cas non des Nègres, mais des métis. Et puis les documents sont vraiment d’une signification douteuse.

Aujourd’hui tous les rivages, de l’Inde à la Mer Rouge, présentent en abondance des traces de sang nègre ; on y trouve même des Nègres très purs. Mais ceux-ci viennent directement d’Afrique. La traite, qui n’est probablement pas encore totalement arrêtée, sévissait d’une façon ostensible quand j’ai visité ces pays il y a une douzaine d’années.

Les esclaves noirs ont été en grande quantité amenés de Zanzibar et des côtes voisines dans toutes les tribus arabes ; et, avec les mœurs musulmanes, l’assimilation et le métissage sont très rapides.

Au point de vue qui nous occupe, ces noirs sont donc sans intérêt, et je n’ai rien vu d’autre. Il faut remarquer que ces pays sont nus, peu fertiles, qu’il serait bien difficile à une race primitive de s’y maintenir d’une façon indépendante ; d’autre part, l’infusion permanente de sang noir africain par la traite ne permet pas de retrouver la descendance d’ancêtres noirs autochtones ; enfin, l’histoire et surtout la préhistoire de ce coin du globe nous est peu connue. La lacune peut donc s’expliquer par une disparition totale sur laquelle nous ne pouvons nous prononcer ; elle ne constitue en tout cas nullement, dans l’état actuel de nos connaissances, un fait qui doive entrer en ligne de compte.

Race nègre unique. — Ainsi, de l’un à l’autre des domaines nègres classiques, nous avons trouvé les traces de Nègres aujourd’hui conservés à l’état de faibles spécimens isolés au milieu d’un flot d’envahisseurs, ou bien fondus dans de grandes races mixtes. Nous concevons, dans une époque ancienne, une population nègre continue tout autour de l’Océan Indien, et cette population est bien nègre au sens que nous avons défini en commençant.

Assurément, elle n’a jamais été identique à elle-même d’un bout à l’autre de cette immense aire de dispersion, mais y a-t-il lieu de la diviser en