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Page:Lapicque - Les Nègres d’Asie et la race nègre en général, paru dans les Bulletins et Mémoires de la Société d’Anthropologie de Paris, 1906.djvu/15

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plusieurs races ? Examinons les raisons pour lesquelles les nègres ont été ainsi partagés dans la classification et voyons si ces raisons subsistent.

1o Les Nègres océaniens ont été séparés des Nègres africains surtout parce qu’on n’a pas songé à les rapprocher à travers la distance. Mais on n’a jamais établi entre eux une différence physique sérieuse. Ces Nègres océaniens sont tous diversifiés par des métissages ; si on en prend les traits communs essentiels, le type abstrait constitué par ces traits revient au type abstrait du Nègre africain ;

2o Les Negritos ont été séparés des Nègres précédents en raison de deux caractères différentiels, la taille et l’indice céphalique.

L’indice céphalique est certainement un très bon caractère héréditaire : ni a priori, ni a posteriori, il ne paraît influencé par l’adaptation, et il est très utile pour suivre des filiations et des métissages dans un intervalle de temps de quelques siècles. Mais peut-il servir de base à une classification ? D’abord, toute classification faite sur un caractère est artificielle ; mais ce caractère en particulier serait mal choisi pour cet usage. Dans tous les grands groupes humains naturels, c’est-à-dire reposant sur un ensemble de caractères, on trouve à la fois des brachycéphales et des dolichocéphales.

Et puis, on ne peut plus séparer les Nègres en deux portions nettement tranchées par la différence d’indice. Entre les chiffres classiques des Papous et des Africains, 71 et 72, d’une part, et celui des Andamanais, 83, d’autre part, viendraient se ranger d’autres Africains qui sont plus ou moins relativement brachycéphales, et dans le cycle que nous venons de parcourir, les Méniks de la Péninsule Malaise avec 79, et les Nègres parias de l’Inde avec 76. Nous avons une série continue, non plus deux groupements opposés.

La taille, elle, est abandonnée depuis longtemps comme caractère de race ; on sait combien les conditions de vie la font varier. Notamment, les animaux des îles sont en général plus petits que ceux des continents. Or, il est digne de remarquer que tous les Negritos, et à côté d’eux les nègres Parias, habitent soit des îles, soit des terres qui furent autrefois des îles.

Les Negritos apparaissent donc, non plus comme une espèce (ou une race) distincte se rapprochant des autres Nègres par plusieurs caractères, mais bien comme un rameau d’une race nègre unique, ayant légèrement varié dans un certain sens.

Si l’anatomie ne fournit pas de raison de diviser les Nègres comme on l’a fait, en fournit-elle pour les fondre en une race unique ?

Une classification naturelle doit tenir compte de tous les caractères. Une classification est toujours établie sur quelques caractères seulement, et par conséquent artificielle quant à son établissement ; mais elle se révèle bonne, correspondant à la nature des choses, quand un caractère important qui n’a pas été considéré à l’origine vient concorder avec ceux qui ont servi de base.

Nous avons défini le Nègre par la couleur de la peau, le nez et le che-