Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 11.djvu/542

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d’équilibre qu’elle prendrait en vertu des forces constantes qui l’animent. L’expérience nous montre que les causes qui agitent chaque jour cette grande masse fluide n’y produisent que des mouvements d’oscillation, en sorte que son état d’équilibre est stable relativement à l’action de ces causes ; mais, si cette stabilité n’est pas absolue, on peut alors, en vertu d’une cause extraordinaire, supposer à la mer un ébranlement, qui, quoique très petit en lui-même, pourrait cependant apporter de grands changements dans sa figure et l’élever au-dessus des plus hautes montagnes, ce qui expliquerait plusieurs phénomènes d’Histoire naturelle. Il est donc important de rechercher les conditions nécessaires à la stabilité de la figure de la mer, et d’examiner si ces conditions ont lieu dans la nature.

On a depuis longtemps fait cette curieuse remarque : savoir, que, si, la mer et le noyau qu’elle recouvre ayant une figure elliptique dans l’état d’équilibre, on allonge ou on aplatit la figure de la mer, en sorte qu’elle soit toujours elliptique, elle tendra, au premier instant, à revenir à son état d’équilibre, si la densité moyenne du noyau surpasse les trois cinquièmes de la densité de la mer, et si cette densité est plus petite, la mer tendra à s’éloigner de son état d’équilibre. On en a conclu que, pour la stabilité de l’équilibre de la mer, il suffit que sa densité soit moindre que de la densité du noyau ; mais cette conséquence n’est relative qu’au dérangement particulier que l’on suppose primitivement à la mer ; d’ailleurs, il ne suffit pas de considérer la tendance du fluide au premier instant du mouvement, il faut encore avoir égard à cette tendance dans tous les instants, et par conséquent il est nécessaire de considérer les oscillations du fluide pour prononcer sur la stabilité de son équilibre. En envisageant ainsi la question, j’ai fait voir, dans les Mémoires de l’Académie pour l’année 1776 [1], que, dans un grand nombre de cas, la stabilité de l’équilibre exige pour condition que la densité moyenne du noyau terrestre surpasse celle de la mer. J’ai prouvé, de plus, dans les Mémoires de 1782 [2], que si, la Terre n’ayant

  1. Œuvres de Laplace, T. IX.
  2. Ibid., T. X.