Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 2.djvu/254

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basse mer ; supposons que les arcs de cette circonférence, en partant du point le plus bas, expriment les temps écoulés depuis la basse mer ; les sinus verses de ces arcs seront les hauteurs de la mer qui correspondent à ces temps.

Cette loi s’observe exactement au milieu d’une mer libre de tous côtés ; mais dans nos ports les circonstances locales en éloignent un peu les marées ; la mer y emploie un peu plus de temps à descendre qu’à monter, et à Brest la différence de ces deux temps est d’environ dix minutes.

Plus une mer est vaste, plus les phénomènes des marées doivent être sensibles. Dans une masse fluide, les impressions que reçoit chaque molécule se communiquent à la masse entière ; c’est par là que l’action du Soleil, qui est insensible sur une molécule isolée, produit sur l’océan des effets remarquables, et c’est la raison pour laquelle le flux et le reflux sont insensibles dans les lacs et dans les petites mers, telles que la mer Noire et la mer Caspienne.

On a vu, dans le no 10, la grande influence de la profondeur de la mer sur la hauteur des marées. Les circonstances locales de chaque port peuvent faire varier considérablement cette hauteur. Les ondulations de la mer, resserrées dans un détroit, peuvent devenir fort grandes ; la réflexion des eaux par les côtes opposées peut les augmenter encore : c’est ainsi que les marées, généralement fort petites dans les îles de la mer du Sud, sont très-considérables dans nos ports.

Si l’océan recouvrait un sphéroïde de révolution, et s’il n’éprouvait point de résistance dans ses mouvements, l’instant de la pleine mer serait celui du passage du Soleil au méridien supérieur ou inférieur ; mais il n’en est pas ainsi dans la nature, et les circonstances locales font varier considérablement l’heure des marées dans des ports même fort voi\sins. Pour avoir une juste idée de ces variétés, imaginons un large canal communiquant avec la mer, en s’avançant fort loin dans les terres. Il est visible que les ondulations qui ont lieu à son embouchure se propageront successivement dans toute sa longueur, en sorte que la figure de sa surface sera formée d’une suite de grandes ondes