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sa faute ou de son crime jusqu’au livre qu’il a lu, jusqu’à la doctrine qu’on lui a enseignée, jusqu’à l’exemple qu’il a reçu, jusqu’à l’entraînement qu’il a subi, jusqu’à l’injustice dont il a souffert ou jusqu’au rêve qu’il a fait, qui ne serait innocent devant la loi ? Dans ce siècle, qu’on pourrait appeler le siècle des appétits, tout le monde est impatient de jouir, et de jouir par tous les moyens ; les uns se révoltent contre les injustices et les inégalités sociales, prétendant qu’ils ont droit à un travail plus équitable, à une nourriture moins incertaine et à une répartition plus juste des bénéfices égalitaires de l’humanité ; les autres, toujours mécontents de ce qu’ils ont, aspirent continuellement à des faveurs nouvelles et ne s’occupent de leurs semblables que pour se satisfaire à leurs dépens ; que deviendraient alors l’ordre et l’équilibre d’un peuple si la loi n’était là pour endiguer les prétentions des uns et les ambitions des autres ? Ces considérations ne me sortent pas de mon sujet, elles m’y ramènent, car, dans l’accusé qu’il y a aujourd’hui devant vous, vous voyez un révolté et un jouisseur, qui vous disent : « La République sera naturaliste ou elle ne sera pas, » c’est-à-dire : ou elle accepte les doctrines matérialistes qu’on m’a enseignées, et elle n’a pas le droit de condamner celui qui les pratique, ou elle ne les acccepte pas, mais elle les laisse passer et les approuve même