Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/73

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Le renard acharné, sous ton manteau d’orgueil,
À ronger tes entrailles.
 
Je connais tout de toi, fautes et châtiment,
Illusions diverses ;
O fier vaincu ! je sais s’ils coulent justement
Tous les pleurs que tu verses.

L’ardent besoin du vrai, dès l’enfance, a veillé,
La nuit dans ton alcôve ;
De ses froides sueurs ton front trop tôt mouillé
À vingt ans resta chauve.

Tu convoquas, pour fuir les vulgaires erreurs,
Tous les guides célèbres ;
Et tu vas, assiégé de doute et de terreurs,
Perdu dans les ténèbres.

Tu pouvais, comme un autre, amoureux du loisir,
Goûter les folles joies,
Vivre au moins et rêver… mais tu voulus choisir
L’art et ses rudes voies ;

Et tu t’es mis à l’œuvre, épris d’un idéal ;
Espérant à la foule
Faire un jour adorer le glorieux métal
Dont ton âme est le moule.

L’étude à ta jeunesse a fait un lourd tombeau
De ton atelier sombre ;
Et voilà que tes mains, ô poursuivant du beau,
S’attachaient à son ombre !