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Page:Laprade - Œuvres poétiques, Psyché, Lemerre.djvu/38

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Au zéphir caressant, d’où que son baiser vienne,
Les fleurs livrent leur âme… Enfant, livre la tienne ! »


LES SOURCES.

« Trempe tes pieds de nacre en nos sables d’or fin,
Et laisse-nous toucher l’ivoire de ton sein,
Et monter à flot doux vers ta lèvre vermeille,
Et chanter en glissant au bord de ton oreille.
L’eau sur tes flancs polis dort avec volupté.
Reste ! Quel bras mortel, errant sur ta beauté,
Comme l’onde enlaçant ta blancheur qu’elle azure,
Flatterait tout ton corps d’une étreinte plus pure ?

Reste ! Nous te dirons : Sois paisible toujours,
Nous sages qui coulons depuis les anciens jours ;
Car au fond de l’eau vive une prudence habite.
Nous savons que, portée ou lentement ou vite,
Quand de l’antre natal elle a franchi le seuil,
Chaque goutte, malgré le rocher ou l’écueil
Remontant, s’il le faut, pluie, ou neige, ou rosée,
Dans le grand Océan est enfin déposée ! »

Mais l’antique serpent chez tout homme caché,
L’orgueil, l’adroit orgueil, tient le cœur de Psyché,
Avec son noir venin y répand goutte à goutte
La fureur de connaître, et le trouble et le doute,
Et des sens révoltés l’implacable désir,
Et l’ennui curieux, mortel à tout plaisir.

Elle fuit la nature, et n’en sent plus les charmes ;
Dans le palais désert elle va tout en larmes,
Ni les divins tableaux sur le marbre gravés,