Heureux l’oiseau, les grains ailés, la feuille morte,
Le sable voyageur que le simoun emporte ! »
Ainsi Psyché maudit les palais odieux
Où l’Egypte la garde esclave de ses dieux ;
Et sonde tristement, sous le joug révoltée,
La prison de granit par ses ailes heurtée.
Or la guerre propice, avec ses bras d’airain,
Fit une brèche aux murs du temple souterrain.
Tout un peuple envahit les mystiques enceintes ;
Et, non sans dérober sa part des choses saintes,
Psyché, libre en sa fuite, et gagnant les vaisseaux,
Partit au cours du fleuve, et vit les grandes eaux.
Trente jours un vent frais, sous d’heureuses étoiles.
De la rouge carène enfla les blanches voiles.
Comme un dauphin léger, fendant les larges flots,
Le navire berçait l’espoir des matelots.
Déjà la terre au loin, comme un bouclier sombre,
Sur l’eau verte élevait son disque entouré d’ombre.
Mais tout à coup, tombant des quatre points des cieux,
Les vents, gros de la foudre, effrénés, furieux,
Ballottent les vaisseaux sur les plaines marines,
Comme en un champ, l’hiver roule un faisceau d’épines :
Et les flots montueux, sur leurs flancs assombris,
Des chênes et des pins dispersent les débris.
Mais tu suivais, ô dieu ! la blanche naufragée,
Vers le port inconnu par l’amour dirigée.
Invisible, effleurant les vagues de tes pieds,
Tu conduis devant toi le mat ou tu l’assieds ;
Page:Laprade - Œuvres poétiques, Psyché, Lemerre.djvu/73
Apparence
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.