Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/111

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Le mur qui du jardin enclôt l’étroit espace.
Là, se parlent, assis sur le banc des aïeux,
Une femme et son fils qu’elle implore des yeux.
Recevant dans son cœur ce que le cœur adresse,
Grave et beau, le jeune homme écoute avec tendresse :

« Rien ne me sera plus quand vous aurez quitté
L’abri de votre mère et notre obscurité.
Mon cœur saigne déjà du sari— dont vous inonde
Le combat du désert, surtout celui du monde ;
Et la voix qui vous dit : Va, fais l’œuvre de Dieu !
Je la sens dans mon sein comme un glaive de feu.

« Laissez-moi regretter votre enfance éphémère !
Que la gloire du fils est pesante à la mère,
Et combien doit trembler celle à qui Gabriel
Annonce qu’elle engendre un envoyé du ciel !
Le sang qu’elle lui donne est tout promis au glaive,
Elle nourrit l’agneau pour qu’un boucher l’enlève.
O mon fils ! pardonnez la faiblesse aux adieux,
Je vous aurais voulu moins grand et plus heureux !
Je voudrais vous garder, toujours à cette place,
Sous notre pauvre toit qu’éclaire votre face.
Vous qu’attend Israël pour sauveur et pour roi,
Je voudrais, tout entier, vous retenir en moi.