Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/241

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Il exploite, selon le caprice et la mode,
        Ou l’ironie ou la douleur.

L’art, c’est l’argent ! Seul Dieu, seul idéal des âmes ;
        L’argent qui fait l’homme de bien ;
Qui soumet au banquier les princes et les femmes ;
        Qui donne rang de citoyen !
On en veut ! Car il faut, aux penseurs, aux poëtes,
        Festins, salons, coursiers de choix ;
Car il faut fréquenter et vaincre par ses fêtes,
        Les banqueroutiers et les rois !
Car il faut oublier, dans les plaisirs profanes,
        L’amour trahi, le ciel perdu,
Et payer lès bouffons, les vins, les courtisanes
        Avec le prix de Dieu vendu !

Vieux artistes du temple, hommes ravis en gloire,
        Qui, jadis pauvres et cachés,
N’aviez d’autre souci que travailler et croire,
        Trente ans sur une œuvre penchés !
Maîtres, maudissez-nous ! on pille sans mystère
        Les vases, les trépieds, l’autel,
Et l’on met à l’encan les voix du sanctuaire,
        Et le Kinnor, et le Nebel !