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femme d’Alexandre Sévère. Elle vivait au commencement du iiie siècle de notre ère. Autant que la mère de son époux, Sulpicia Memmia était fière, méprisante, hautaine. On raconte qu’un jour ayant reproché à Alexandre Sévère son extrême affabilité, ce prince lui répondit : « J’affermis mon autorité en me rendant populaire. » Voilà tout ce que l’histoire rapporte à propos de cette impératrice, morte du reste toute jeune encore, et n’ayant pas eu le temps de se mêler aux choses de la politique.

MEMMINGEN, ville de Bavière, cercle de Souabe-et-Neubourg, à 68 kilom. S.-O. d’Augsbourg, sur un petit affluent de l’Iller, non loin de la frontière du Wurtemberg ; 8,709 hab. Ch.-l. du district de son nom ; lycée, tribunal, bibliothèque publique, arsenal. Fabrication de lainages, coton, toiles, rubans, bonneterie, ouvrages en métaux, tanneries, teintureries et imprimeries sur tissus. Commerce de toiles, surtout avec l’Italie et la Suisse.

MEMMIUS (Caïus), orateur et tribun romain, mort en 100 av. J.-C. Il était tribun du peuple en 111 lorsque, pendant la guerre contre Jugurtha, il déjoua les intrigues de ce prince, le fit décréter d’accusation par les comices et amener de la Numidie à Rome pour y être jugé, après avoir fait donner la direction de la guerre à Metellus, puis à Marius. C’était un des plus célèbres orateurs de son temps, et l’on trouve dans Salluste la harangue qu’il prononça en cette circonstance. Il périt dans une émeute au moment où il se présentait pour être nommé consul.

MEMMIUS GEMELLUS (Caïus), orateur romain qui vivait dans le ier siècle avant notre ère. Il fut successivement tribun du peuple (66), édile (60), préteur (58). Comme tribun du peuple, il fit une vive opposition à Lucullus et l’empêcha d’obtenir le triomphe au retour de sa campagne contre Mithridate. Dans la première partie de sa carrière politique, il appartint au parti du sénat et lutta énergiquement contre Clodius, Vatinius et Jules César. Sa résistance aux projets ambitieux du futur dictateur était telle, que celui-ci éprouva le besoin d’acheter Memmius ; il lui promit de l’appuyer dans la demande du consulat (54). Memmius eut le tort de se considérer déjà comme consul et de se vanter de l’appui du César, qui l’abandonna ; il échoua complètement ; mais il avait employé de telles manœuvres pour réussir, qu’une accusation de brigue lui fut intentée. Il s’exila plutôt que de paraître en justice, certain qu’il était de la condamnation, et alla achever ses jours à Mytilène. Memmius avait épousé une fille de Sylla, dont il se sépara par divorce ; c’était, d’ailleurs, un débauché, Cicéron lui reproche d’avoir séduit la femme de Pompée et celle de M. Lucullus, frère du général. Médiocre politique, il était un fort remarquable orateur et un poëte de quelque talent. C’est à lui que Lucrèce dédia son fameux poème De natura rerum.

MEMMIUS ou MEMMO (Jean-Baptiste), noble Vénitien qui vivait au xvie siècle. Il donna la première traduction des Coniques d’Apollonius, ou du moins des quatre livres de cet ouvrage retrouvés de son temps, sous le titre de : Apollonii Pergei philosophi mathematicique opera (Venise, 1537, in-fol.).

MEMMO (Tribuno), doge de Venise, mort en 991. Il succéda en 979 à Vitale Cundiano, appuya la faction des Caloprini contre celle des Morosini, amena ainsi la guerre civile dans Venise, se vit contraint dexiler Caloprino, qui voulait s’emparer du pouvoir, et ne put réprimer les excès des deux factions rivales. Il eut pour successeur Orseolo.

MEMMO (Marc-Antoine), célèbre doge de Venise, né en 1539, mort en 1615. Il fut élu seulement à l’âge de soixante-treize ans (1612), et ce fut pendant son administration que la république soutint une de ses plus rudes guerres contre les pirates Uscoques, dont les repaires étaient dans la Croatie, la Carniole, l’istrie et la Dalmatie. L’année de la mort de Memmo (1615), la guerre avait été déclarée à Ferdinand, archiduc d’Autriche, que les Vénitiens accusaient d’encourager les pirates. On peut voir à la Bibliothèque nationale une belle médaille, qui n’a pas de revers, et qui représente en buste le doge Memmo revêtu de ses insignes. Elle est l’œuvro de G. Dupré, et fut faite en commémoration de l’élection du doge (1612).

MEMMO (Jean-Marie), littérateur italien, mort en 1553. Il fit partie du sénat de Venise et devint ambassadeur de la république auprès de Charles-Quint. On a de lui : l’Oratore (Venise, 1545, in-4o) ; Dialoghi della sostanza e forma del mondo (Venise, 1546) ; Dialogho sopra dispute filosofiche per formare perfetto un principe, una repubblica, un senatore, un cittudino, un soldato ed un mercante (Venise, 1503, in-4o).

MEMNON, roi d’Égypte, probablement Aménophis II, fils de Thoutmosis. Les Grecs, en défigurant son nom et en attribuant à ce prince une légende merveilleuse, ont fait planer sur son existence même la plus grande incertitude. D’après leurs récits, Memnon était fils de Tithon et de l’Aurore. Il fut envoyé par son père, roi d’Égypte et d’Ethiopie, au secours de Troie assiégée par les Grecs. Après avoir tué Antiloque, fils de Nestor, il périt lui-même de la main d’Achille.


On lui fit de. magnifiques funérailles, et un grand nombre de villes de l’Asie ot de l’Egypte lui élevèrent des monuments. L’Aurore, au désespoir, alla, les cheveux épars et les yeux baignés de larmes, se jeter aux pieds de Jupiter, et le supplier d’accorder à son fils quelque privilège qui le distinguât du reste des mortels. Des faits merveilleux éclatèrent auprès de son bûcher ; toutefois, ces prodiges ne calmèrent pas les douleurs de l’Aurore ; et depuis elle n’a cessé, chaque matin, de verser des larmes ; c’est la rosée, à laquelle les disciples d’Apollon ont donné le nom poétique de pleurs de l’Aurore.

Mais la célébrité attachée à Memnon lui vient surtout de la fameuse statue qui lui avait été élevée aux environs de la ville de Thèbes. Lorsque les rayons du soleil levant venaient à la frapper, elle faisait entendre des sons harmonieux, comme si Memnon avait voulu saluer l’apparition de sa mère. Cambyse, voulant pénétrer ce mystère, qu’il croyait un effet magique, fit briser la statue depuis la tête jusquau milieu du corps, et la partie renversée continua de rendre les mêmes sons. Ce fait est attesté par Strabon,

Cette idée de Memnon saluant la présence de sa mère réveilla tous les souvenirs poétiques et religieux de la Grèce et de Rome ; chacun voulut entendre cette voix qui, après tant de siècles, sortait d’un colosse brisé, comme pour attester la vérité des plus antiques traditions, et Memnon effaça dès lors toutes les merveilles de Thèbes aux cent portes. Enfin, après deux siècles et demi, Septime-Sévère rétablit la statue dans son premier état ; mais Memnon devint muet.

Cet étrange phénomène a beaucoup occupé les savants, et de nombreuses dissertations ont été faites sur la statue vocale de Memnon. Suivant Kircher, cette singulière particularité ne peut être attribuée qu’à quelque supercherie, telle qu’un ressort secret ou une espèce de clavecin renfermé dans la statue, et dont les cordes, relâchées par l’humidité de la nuit, se tendaient à la chaleur du soleil et se rompaient avec éclat comme une corde de violon. De nouvelles études, faites sur les lieux mêmes, paraissent démontrer que les sons n’étaient qu’un effet physique et naturel, la statue étant faite d’une espèce particulière de pierre, dure, cassante et très-dilatable. Le changement subit de température, causé par les rayons du soleil succédant au froid de la nuit, produisait des vibrations sonores d’autant plus fortes, que la statue était fendillée en une foule d’endroits.

La littérature ne pouvait manquer de s’emparer d’un phénomène si remarquable, et d’en tirer des images vives et frappantes, car il exprime admirablement l’influence mystérieuse qu’une chose, un homme exerce sur un autre :

Nous t’avons oublié. Ta gloire est dans la nuit.
Nous faisons bien encor toujours beaucoup de bruit ;
Mais plus de cris d’amour, plus de chants, plus de culte,
Plus d’acclamations pour toi dans ce tumulte !
Le bourgeois ne sait plus épeler ton grand nom.
Soleil qui t’es couché, tu n’as plus de Memnon !

V. Hugo.

Dans le Malade imaginaire, Moiière a rappelé on ne peut plus plaisamment le souvenir de la statue de Memnon. Le jeune Thomas Diafoirus fait en ces termes sa déclaration d’amour à la belle Angélique :

« Mademoiselle, ne plus ne moins que la statue de Memnon rendait un son harmonieux lorsqu’elle venait à être éclairée des rayons du soleil, tout de même me sens-je animé d’un doux transport à l’apparition du soleil de vos beautés ; et, comme les naturalistes remarquent que la fleur nommée héliotrope tourne sans cesse vers l’astre du jour, ainsi mon cœur dores-en-avant tournera-t-il toujours vers les astres resplendissants de vos yeux adorables, ainsi que vers son pôle unique. Souffrez donc, mademoiselle, que j’appende aujourd’hui à l’autel de vos charmes l’offrande de ce cœur qui ne respire et n’ambitionne d’autre gloire que d’être toute sa vie, mademoiselle, votre très-humble, très-obéissant et très-fidèle serviteur et mari. »

« La nature n’est point le sombre sphinx qui étourdit et égare l’esprit de l’homme par ses oracles confus ; c’est une âme palpitante dont les secrets se révèlent à l’intelligence qui la scrute, à l’âme qui l’interroge ; c’est la statue de Memnon, dont les lèvres de granit s’émeuvent aux rayons de l’aurore et rendent un son harmonieux. »

Xavier Marmier.

« Il advint que Mme d’Anglure, cette petite poupée qui ne pensait pas, et qui, comme la statue de Memnon, ne savait dire que bonjour et bonsoir d’une voix harmonieuse, se prit à aimer M. de Maulevrier avec une intrépide naïveté. »

Barbey d’Aurevilly.

« Enfin l’esprit de vie paraît, la voix de Dieu retentit par l’organe de la nature entière, et le premier rayon de lumière est la première révélation. De même que dans les déserts d’Égypte la statue de Memnon résonne aux premières heures du jour, ainsi la


pensée de l’homme, atteinte et ébranlée par l’apparition de l’univers visible, y répond par une soudaine harmonie de symboles et d’idées, de cultes et d’images, fidèle écho du Dieu cosmique. »

Edgar Quinet.

Memnon (statues de). On donne improprement ce nom à deux colosses de granit, encore debout dans les plaines de Thèbes, vis-à-vis de Louqsor, à une lieue du Nil et à une centaine de pas des mines de Médinet-Abou. Les Arabes appellent ces colosses Châma et Tàma. D’après des descriptions d’Hérodote et de Strabon, entre eux deux se trouvait la statue d’Osymandias, plus colossale encore et qui n’est plus qu’un bloc informe ; il faut l’œil exercé d’un savant pour découvrir quelques traces de sculpture dans cet énorme rocher qui gît à terre depuis des milliers d’années. Les deux statues encore debout sont les effigies de la mère et de la fille de ce Pharaon superbe. Elles étaient originairement taillées chacune dans un seul bloc de grès brèche, conglomérat d’une extrême dureté, que cependant les sculpteurs égyptiens travaillèrent avec une admirable perfection. Leurs proportions, supérieures à celles du colosse de Ramessès, étaient exactement les mêmes : 15m,60 depuis le pied jusqu’au sommet de l’ornement qui surmonte la tête, à quoi il faut ajouter 4m,30 pour la hauteur du piédestal ; en tout près de 20 mètres. C’est la hauteur d’une maison de quatre étages. Elles sont assises, les mains posées sur les genoux ; la pose est roido et révèle l’époque du plus ancien style hiératique. Ces colosses ont éprouvé, par l’effet du climat et de la vétusté, des dégradations notables : les traits du visage ont disparu, et les autres parties du corps offrent des aspérités et de profondes crevasses, qui paraissent provenir du poids énorme de ces masses, comme aussi de l’action alternative longtemps continuée do l’excessive chaleur du jour et de l’humidité de la nuit ; elles semblent avoir été brunies et calcinées par le feu.

Le colosse du nord a été rompu par le milieu, et la portion supérieure, à partir de la jointure des bras, a été rebâtie par assises au nombre de cinq, formées de blocs énormes, que leurs joints ouverts laissent aisément distinguer. La dernière assise comprend la tête et le cou, qui sont d’un seul morceau, ayant 16 pieds de largeur, 10 de hauteur et 9 d’épaisseur.

Les deux côtés des sièges de chaque statue sont décorés de sculptures en bas-relief, représentant deux femmes la tête couronnée de fleurs et de boutons de lotus, et qui paraissent occupées à enrouler des tiges de cette plante autour du faisceau principal.

Les traits du profil de ces personnages offrent exactement le type de la race éthiopienne, et reproduisent la ressemblance de Memnon lui-même, qui était de cette race, et dont on a retrouvé les portraits peints dans son tombeau.

Au-dessus de ces tableaux sont des hiéroglyphes qui en expliquent le sujet, et parmi lesquels on distingue les noms, prénoms et qualités du roi du peuple obéissant, fils du Soleil, Aménoph II, celui que les Grecs ont appelé Memnon.

Par l’effet du tassement du sol, ces deux colosses se sont légèrement inclinés l’un vers l’autre. Le devant du siège du colosse du sud présente, sculptées en haut relief, trois statues très-mutilées ; celles qui occupent chaque côté des jambes ont 15 pieds 4 pouces de hauteur ; ce sont deux figures de femme, le corps serré dans une robe qui en dessine les formes et qui tient les jambes rapprochées. Elles ont les bras pendants et tiennent d’une main la croix ansée, attribut de la divinité. Leur tête est ornée du vautour, coiffure symbolique dont les ailes retombent de chaque côté des oreilles, et surmontée d’un modius ou boisseau. Un riche collier de perles et de dentelures en relief complète leur ajustement. La troisième figure, placée dans l’intervalle qui sépare les deux jambes du colosse, n’est pas plus grande que nature, mais très-mutilée. On distingue encore sur les cuisses de ces statues les traces du caleçon plissé qui les recouvrait. Les bas-reliefs et les petites figures qui ornent les sièges des colosses sont travaillés assez curieusement et avec une finesse relative. Le colosse du nord, Tâma, rendit pendant longtemps des sons distincts à l’apparition du soleil. De grandes quantités d’inscriptions gravées par les visiteurs, ou d’après leur ordre, sur diverses parties du eolosse attestent la réalité du phénomène. Voici l’une de celles qu’on lit sur la jambe gauche : « Moi, P. Balbinus, j’ai entendu la voix divine de la statue vocale de Memnon, autrement Phainenoph. Je me trouvais dans la compagnie de l’aimable reine Sabine (c’était la femme de l’empereur Adrien). Le soleil était à la première heure de son cours, la quinzième année de l’empire d’Adrien. » Ainsi, P. Sabinus croyait que cette statue représentait Aménophis et était le Memnon d’Hérodote et de Pausanias. Cette erreur a prévalu ; mais comme les inscriptions, fort nombreuses, que l’on a relevées sur ce colosse sont toutes postérieures à la conquête romaine, et que ce Memnon n’a eu la renommée d’être mélodieux que sous Néron, il est bien certain qu’il y en eut au moins deux, On a, du reste, reconnu que ce


phénomène n’était pas particulier au prétendu Memnon et qu’il se reproduisait lorsqu’un bloc du même granit se trouvait placé dans certaines conditions atmosphériques ; de Humboldt l’a observé dans les roches granitiques de l’Orénoque. On présume que le haut de la statue ayant été renversé par le tremblement de terre de l’an 27 av. J.-C, c’est à partir de ce moment seulement que la partie inférieure, traversée par des fissures, put émettre une sorte de vibration sonore. Septime-Sévère ayant fait relever la partie supérieure, ces blocs agirent à la façon d’une énorme sourdine et empêchèrent toute vibration. Le colosse devint muet, ce qui n’empêcha pas les voyageurs de continuer à s’y rendre en pèlerinage. Un des derniers noms inscrits est celui de Chateaubriand, qui a trouvé moyen de graver les treize lettres de son nom sur l’orteil de granit.

Les inondations du Nil, qui atteignent depuis longtemps le pied des statues et y déposent leur limon, ont enterré le bas des piédestaux d’une profondeur de plusieurs pieds. Les Arabes désignent les deux statuer sous l’appellation collective de Sanamât, les Æoles.

Quelques peintres contemporains ont reproduit d’une façon pittoresque les célèbres colosses : Memnon et Sésostris, tableau de M. Gérome (Salon de 1857) ; Colosses de Memnon, tableau de M. Berchère (Salon de 1859). M. J. Coignet a reproduit une vue des ruines du Temple de Memnon (Salon de 1846).

Une autre statue, de plus petites dimensions que Ie3 précédentes, trouvée dans les ruines de l’édifice que l’on a baptisé Memnonium, figure au British-Museum sous le nom de Jeune Memnon, Norden l’avait vue entière en 1757. Belzoni la trouva mutilée en 1825. La tête seule n’avait pas trop souffert de ce vandalisme. Comme le colosse, pendant le cours des siècles, était resté enfoui le visage contre terre, les traits n’avaient pas été altérés. Par les soins de Belzoni, ce fragment, qui a environ huit pieds de hauteur, arriva sans accident à Alexandrie, et de la fut embarqué pour Londres. Le colosse entier devait avoir environ vingt pieds de hauteur.

MEMNON, dit le Rhodien, général perse, né à Rhodes, mort en 333 av. J.-C. Il devint beau-frère d’Artabaze, satrape de la basse Syrie, le seconda dans sa révolte contre Darius Ochus, obtint son pardon, et fut nommé, vers 330, gouverneur des côtes occidentales de l’Asie Mineure. Lorsque, en 334, Alexandre envahit l’Asie, Memnon donna à Darius le conseil de ne pas hasarder une bataille, de se retirer dans l’intérieur du pays après avoir dévasté le territoire que traverserait Alexandre. Mais son avis ne fut point suivi, et Darius fut complètement vaincu à la bataille du Granique, où Memnon se signala par son courage. Investi du commandement suprême de toute l’Asie occidentale, Memnon s’efforça d’empêcher Alexandre d’envahir la Perse, défendit vaillamment Halicarnasse, passa dans l’Ile de Cos et proposa alors à Darius de porter la guerre en Macédoine et en Grèce, pour contraindre Alexandre à revenir dans son royaume. Il venait de commencer à mettre à exécution ce plan de campagne, qui pouvait renverser tous les projets de l’ambitieux Macédonien, lorsqu’il mourut tout à coup après s’être rendu maître de Mytilène.

MEMNON, historien d’Héraclée, ville du Pont. Il vivait dans le ie ou le iie siècle de notre ère. Il avait composé une histoire des tyrans d’Héraclée, dont il ne reste que des fragments dans la Bibliothèque de Photius. Orelli a publié ces fragments (Leipzig, 1816), et l’abbé Gédoyu les a traduits en français dans les Mémoires de l’Académie des inscriptions (t. IV). Ils ne concernent que huit des livres de l’ouvrage, qui en avait au moins seize, et éclaircissait des points importants d’histoire générale. Le IXe livre contenait l’histoire de la tyrannie de Cléarque, disciple du Platon ; la chute de sa dynastie était racontée dans le XIIe livre ; les victoires des Romains sur Amigone occupaient tout le XIVe livre. Malgré le peu d’importance d’Héraclée, son annaliste avait trouvé moyen, par des épisodes, de rattacher sa narration à tous les faits importants de l’époque, et les analyses données par Photius témoignent de l’intérêt qu’aurait pour nous l’ouvrage complet.

Memnon ou la Sagesse huymaine, petit Conte philosophique de Voltaire. Ce conte tend à prouver que le projet d’être parfaitement sage est un projet parfaitement fou, ce que l’auteur résume dans ce quatrain :

Nous tromper dans nos entreprises
C’est à quoi nous sommes sujets ;
Le matin je fais des projets,
Et le long du jour des sottises.

Memnon croit que le meilleur moyen d’arriver au bonheur par la sagesse est d’étouffer ses passions ; aussi renonce-t-il à l’amour, au jeu et au vin. « Premièrement, dit-il, je n’aimerai jamais de femme, car, en voyant une beauté si parfaite, je me dirai à moi-même : Ces joues-là se rideront un jour, ces beaux yeux seront bordés de rouge, cette gorge ronde deviendra plate et pendante, cette belle tête deviendra chauve ; or, je n’ai qu’à la voir dès à présent des mêmes yeux que je la verrai alors, et assurément cette