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===Voyage à la recherche de La Pérouse, par d’Entrecasteaux.===

V. LA PÉROUSE.

Voyages aux îles de la mer du Sud, à la recherche de La Pérouse, par le capitaine Dillon.

V. LA PÉROUSE.

Voyage du Levant, par Tournefort.

V. LEVANT.

Voyage de Levaillant dans l’intérieur de l’Afrique.

V. LE VAILLANT.

Voyages dans diverses provinces de l’empire de Russie, par Pallas.

V. RUSSIE.

Voyage à Madagascar, par le docteur A. Vinson.

V. MADAGASCAR.

Voyages aux ruines de Ninive, de Layard.

V. NlNIVE.

Voyage géographique et astronomique dans les parties septentrionales de lu Russie, par Billings.

V. RUSSIE.

Voyage autour de la mer Morte et dans les terres bibliques, par M. de Sauley.

V. MORTE (mer).

Voyage d’Orenbourg a Boukhara, par G. de Meyendorff.

V. ORENBOURG.

Voyage de Pékin à travers la Mongolie, par Timkoffsky.

V. PÉKIN.

Voyage en Sardaigne, par La Marmora.

V. SARDAIGNE.

Voyage aux Pyrénées, par Taine.

V. PYRÉNÉES.

Voyage amusant (LE) (El Viaje entretenido), ouvrage espagnol d’Agostino de Rojas in-4o).

Ce livre est le Roman comique de l’Espagne ; et qui l’aurait pu écrire mieux que ce Rojas qui passa sa vie sur les grands chemins, jouant des farces, dupant son public et son auberge, toujours réduit aux abois et toujours fertile en expédients ? Ses amis l’appelaient le chevalier du Miracle, à cause de son industrie merveilleuse. Page, étudiant, puis soldat, prisonnier en France, où il servit le roi sur les galères, à la Rochelle, de retour en Espagne, il se fit historien, écrivain public, puis notaire. C’est cette vie pleine d’aventures dont il a retracé les épisodes marquants dans son Voyage, et encore sans doute n’a-t-il raconté que ce qu’il a bien voulu. Comme Villon, dans les moments extrêmes, il jouait volontiers du croc et de la pince, et il dut avoir quelques démêlés avec la sainte-hermandad. Il s’en cache à peine, et le Via je entretenido relate comme de bonnes farces de véritables filouteries. L’ouvrage est tout entier écrit de verve, et Ja lecture en est fort amusante.

Quatre bons amis, voués à la même existence aventureuse, parcourent l’Andalousie, jouant la comédie de ville en ville ; ce sont Rios, Ramirez, Solano et Rojas. En chemin, les amis dissertent, racontent des aventures, récitent des vers. Il n’y a pas plus de roman que cela ; tout l’intérêt est dans ce dialogue et dans ces courtes narrations que Rojas coupe le plus souvent en récitant quelque îoa. Ce sont sans doute des morceaux composés précédemment par lui, mimés dans les villages entre quatre chandelles et qu’il a enchâssés de la sorte dans son livre. Ces compositions ont pour la plupart une grande originalité ; quelques-unes sont bizarres et ressemblent à de vraies parades ; il y a une dissertation grotesque sur la lettre R, et sept loas sur les sept jours de la semaine, qui ont dû faire pâmer d’’aise le public de ce tempslà. Parfois, les narrations prennent la proportion d’un roman ou d’une nouvelle ; telle est l’histoire du capitaine Leonardo, prise, quittée et reprise par les interlocuteurs pendant trois livres successivement ; mais Rojas n’ennuie jamais. On trouve de tout dans ce singulier ouvrage, des renseignements curieux sur les villes que traverse la bande joyeuse, sur les églises, les pèlerinages, les mœurs locales de Séville, Carmona, Tolède, Jaën, Burgos, etc. ; ils en connaissent les moindres ruelles et toutes les auberges borfnes. Mais la partie la plus originale traite a la vie des comédiens de ce temps et des aventures particulières des quatre pauvres diables. On se figure difficilement qu’au temps de Lope de Vega les comédiens de province fussent si misérables. Rojas, dans la page la plus amusante du livre, décrit les diverses espèces de troupes en voyage. Il en distingue huit : le bululû, le naque, la gangarilla, le cambaleo, la f/arnacha, etc. Le bululù est un acteur tout seul ; il va à pied et passe son chemin ; s’il rencontre un village, il parle au curé, lui dit qu’il sait une comédie ou quelque loa, qu’on n’a qu’à réunir le barbier et le sacristain. Tout le monde prend place, il monte sur une malle et récite en disant : La dame entre et dit ceci et ceci. Le curé fait le tour de la grange son chapeau à la maiu ; on réunit quatre ou cinq quartos, un morceau de pain, et avec cela bon-voyage 1 Le naque est composé de deux comédiens voyageant ensemble ; ils savent un intermède, quelque peu d’atilos, récitent des octaves et deux, ou trois loas ; ils prennent un ochavo par place, possèdent une barbe en peau de mouton et jouent du tambour. Ils vivent fort heureux, dorment habillés, cheminent tout nus, mangent s’ils ont faim, se couchent dans la puille

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et souffrent moins de la vermine en hiver qu’en été. La gangarilla est une troupe plus considérable ; ils sont trois ou quatre hommes avec un jeune gars pour jouer les amoureuses ; ils représentent l’auto de la Brebis égarée, ont barbes et perruques, empruntent des robes et négligent parfois de les rendre, prennent un quarto d’entrée, demandent du pain, du fromage, des sardines, mangent cela en guise de rôti, boivent du vin, dorment par terre, cheminent menu, jouent dans les fermes et marchent en croisant les bras, d’autant mieux qu’ils.n’ont pas de manteaux. Le cambaleo se compose d’une femme qui chante et de cinq hommes qui braillent ; ils jouent les autos, traînent une malle d’effets que pourrait porter une araignée, « demandent dans les fermes un morceau de pain, une grappe de raisin, et dans les villes six maravédis. Ils restent au même endroit cinq ou six jours, louent un lit pour la femme… A midi, ils mangent la.soupe grasse, chacun sixécuelles toutes chaudes, s’asseyent à table et parfois sur le lit. La femme fait les parts, mesure le vin et chacun s’essuie où il peut, car ils n’ont entre eux tous qu’une serviette, et la nappe est si courte qu’il « ’en faut de dix doigts que la table soit couverte. Dans une garnaclia, ils sont cinq ou six hommes, une femme pour les premières amoureuses et un jeune garçon pour les secondes ; ils ont une malle’avec deux jupes, une robe, trois couvertures-, barbes, perruques, etc. Ils restent huit jours, dorment quatre dans un lit, mangent la soupe et le bœuf ou le mouton, ont le vin par setier, la viande par once, le pain par livre et là faim par quintaux. La bojiganga, la farandula et la compania, troupes de huit à quinze personnages, complètent cette curieuse série. Les représentations des troupes pauvres, du nuque et de la gangarilla, étaient entièrement primitives. Ro-, jas raconte qu’il arrive un jour, lui troisième, dans un village et déclare qu’il va jouer Caïn etAbel ; au moment ou Gain va tuer son frère, il s’aperçoit.qu’il manque du cour teau nécessaire et il l’égorgé avec une barbe e » n peau de mouton ; le peuple siffle, tempête, et l’aubergiste vient réclamer des draps que Rojas lui a volés ; la troupe décampe au plus vite. Une autre fois, ils jouaient la Résurrection de Lazare ; l’imprésario faisait le Christ ; mais il eut beau crier : Lazare, ^lèvetoi 1 personne ne bougeait. Lazare, qui s’était ennuyé au fond de sa boîte, était allé faire un tour. L’auteur cria au miracle et déclara que Lazare était monté directement au ciel ; le public s’efforça d’y croire.

Scarron connaissait sans doute El Viaje entretenido, car il étudia beaucoup la littérature espagnole ; mais son lioman comique n’en est pas une imitation ; suivant l’expression fort juste de M. de Puibusque, c’est un Eendant à l’œuvré de Rojas, rien de plus, et mérite des deux est égal.

Voyage de Chapelle et Bachaumont (1656, in-8o).

Cette bluette, moitié vers et-moitié prose, fut très-célèbre au xvne et au xyme siècle. La fausseté du genre et les imitations nombreuses qui en ont été faites en ont un peu défloré pour nous la fraîcheur et la grâce. C’est la relation aimable d’un voyage fait dans le Midi par ces deux « bons compagnons, » Chapelle et Bachaumont, dont le premier restera illustre dans l’histoire littéraire, moins par son talent que par son esprit et surtout par ses amitiés et ses fréquentations. Il avait déjà trente ans quand fut publié son Voyage (1656). Il a devancé ainsi de dix ans les premières Satires de Boileau et de trois ans les Précieuses ridicules de Molière. L’anecdote des précieuses de Montpellier, qui est un des endroits les plus agréables de son Voyage, indique déjà la révolution littéraire qui sera entreprise plus violemment par ses deux amis. Déjà, sous une plaisanterie affable et douce, il commence à. se railler des futures victimes de Boileau. Cette date de 1656 a donc son importance et donne à l’œuvre de Chapelle une petite signification historique. Il ne faut point oublier qu’elle fut écrite en pleine littérature des Scarroa, des Pellisson, des Chapelain, des Ménage, etc., et il faut lui savoir gré de n’être pas plus de son temps par le faux goût et par l’emphase. Si on pouvait supprimer les vers qui trop souvent redisent en rimes lâchées et diffuses les choses que la prose exprime avec beaucoup plus de finesse et de charme naturel, l’œuvre aurait moins vieilli et nous semblerait plus gracieuse, n’étant plus déparée par ce mélange tout à fait désagréable de la prose et des vers. Ce n’est point que parfois un couplet ne se détache avec assez de verve et une prestesse agréable. Parfois même, sans atteindre jamais à la grande poésie, quelques vers sont Heureusement attendris, pour ainsi dire, d’une sorte de sentimentalité douce ; comme, par exemple, cette description d’un bosquet dans le parc du comte d’Aubijoux, laquelle commence par ces deux vers :

Sous ces berceaux, qu’Amour exprès

Fit pour toucher une inhumaine,

Sainte-Beuve, qui a consacré, dans ses Causeries du lundi, un article au Voyage de Chapelle et Bachaumont (t. XI, p. 32), blâme comme de fort mauvais goût et comme trèsdésagréable l’aventure de d’Assoucy, qui y est racontée ; et, de fait, elle détonne singulièrement dans cet ensemble charïmiut et léger. Enfin, pour porter un jugement d’ensemble, ce Voyage, très-amusant en somme, est une œuvre toute naturelle et toute gracieuse de deux aimables épicuriens qui, sans autre souci que de bien boire et bien manger, se plaisent à rire doucement, plutôt à sourire, après boire. Voltaire, qui, dans son Voyage à Berlin, adressé à sa nièce, Mme Denis, a imité allègrement la bluette des deux amis, en parle ainsi : « N’allez pas imaginer que je veux égaler Chapelle, qui s’est t’ait, je ne sais comment, tant de réputation pour avoir été de Paris à Montpellier et en terre papale et en avoir rendu compte à un gourmand. » Le même, parlant encore du récit de ce voyage, dit que du « plus charmant badinage il fut la. plus charmante leçon. » Or, Voltaire se connaissait en esprit et en badinage. Nous avons dit, en commençant, que Chapelle eut de nombreux imitateurs, ce qui suffit à prouver le succès et la vogue de son Voyage. En effet, à Voltaire déjà mentionné, il faut ajouter La Fontaine, qui a adressé à sa femme une relation d’un Voyage de Paris en Limousin (1662) ; Hamilton ; Regnard, dans son Voyage en Normandie ; Le Franc de Pompignan, dans son Voyage en Languedoc et en Provence (1740) ; Desmnhis, dans son Voyage à Saint-Germain ; Boufflers, dans ses Lettres sur la Suisse (1762), et Parny, dans son Voyage en Bourgogne (1777), etcl, etc. Le Voyage de Chapelle et Bachaumont a eu d’assez nombreuses éditions ; il a été publié en à Wrecht ; à La Haye en 1732, chez Gosse ; à Amsterdam en 1751, chez Zach. Chastelain ; à Genève, en 1751 (in-12). L’édition de 1821, chez Le Bègue (Paris in-12), fait partie de la Bibliothèque d’une maison de campagne. Il a été encore réédité par Delangle frères (Paris, 1823, in-16), dans la Collection des’petits classiques français.

Voyage du pèlerin (LE), par Bunyan (1688).

Après la Bible, le livre le plus répandu en Angleterre est le Voyage du pèlerin, par le chaudronnier Bunyan. « C’est, dit M. Taine, que le fond du protestantisme est la doctrine du salut opéré par la grâce, et que, pour rendre cette doctrine sensible, nul artiste n’a égalé Bunyan. » Durant une captivité de douze ans, Bunyan composa ce livre, n’ayant pour toute lecture que la Bible et le Livre des martyrs. Le Voyage-du pèlerin est un manuel de dévotion à l’usage des simples, en même temps qu’une épopée allégorique de la grâce. C’est un homme du peuple qui parle au peuple et qui veut rendre sensible à tous la" terrible doctrine de la damnation et du salut. Voici l’analyse succincte de cet ouvrage. Du haut du ciel, une voix a crié vengeance contre la cité de la Destruction, où vit un pécheur nommé Chrétien. Effrayé, il se lève parmi les railleries de ses voisins et part pour n’être point dévoré par le feu qui consumera les criminels. Un homme secourable, Evangéliste, lui montre le droit chemin. Un homme perfide, Sagesse-Mondaine, essaye de l’en détourner. Son camarade, Maniable, qui l’avait d’abord suivi, s’embourbe dans les marais du Découragement et le quitte. Pour lui, il avance bravement à travers l’eau trouble et la boue glissante et parvient à la porte étroite, ou un sage interprète l’instruit par des spectacles sensibles et lui indique la voie de la cité céleste. Il passe devant une croix, et le lourd fardeau des péchés qu’il porte sur ses épaules se détache et tombe. Il grimpe péniblement la colline escarpée de la Difficulté et parvient dans un superbe château, où Vigilant, le gardien, le remet aux mains des sages filles, Piété et Prudence, qui l’avertissent, et l’arment contre les monstres de l’enfer. Il trouve la route barrée par un de ces démons, Apollyon, qui lui ordonne d’abjurer l’obéissance du roi céleste. Apres un long combat, il le tue.’Cependant la route se rétrécit, les ombres tombent plus épaisses, des flammes sulfureuses montent le long du chemin:c’est la vallée de l’Ombre de la Mort. Il la franchit et arrive dans la ville de la Vanité, foire immense de trafics, de dissimulations et de comédies, où il passe les yeux baissés satfs vouloir prendre part aux fêtes ni aux mensonges. Les gens du lieu le chargent de coups, le jettent en prison, le condamnent comme traître et révolté, brûlent son compagnon Fidèle. Echappé de leurs mains, il tombe dans celles du géant Désespoir, qui le meurtrit, le laisse sans pain dans un cachot infect et, lui présentant des poignards et des cordes, l’exhorte à se délivrer de tant de malheurs. Il parvient enfin sur les montagnes Heureuses, d’où il aperçoit la divine cité. Pour y entrer, il ne reste à franchir qu’un courant profond où l’on perd pied, où l’eau trouble la vue et qu’o.n appelle la rivière de la Mort. « L’allégorie, le plus artificiel des genres, dit encore M. Tuine, est naturelle à Bunyan. Il l’emploie partout par nécessité, non par choix. Comme les enfants, les paysans et tous les esprits incultes, il change les raisonnements en paraboles, il ne saisit les vérités qu’habillées d’images ; les termes abstraits lui échappent, il veut palper des formes et’contempler des couleurs. C’est que les sèches vérités générales sont une sorte d’algèbre, acquise par notre esprit, fort tard et après beaucoup de peine, contre notre inclination primitive, qui est de considérer des événements détaillés et des objets sensibles, l’homme n’étant capable de con-

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templer les formules pures qu’après s’être transformé par dix ans de lectures et de réflexions. » Ce curieux ouvrage a été traduit en français sous le titre de Voyage du chrétien et de la chrétienne (Neuchâtel, 1716, in-8o) et sous celui de Pèlerinage d’un nouveau chrétien (Paris, 1772, in-18), souvent réédité.

Voyages de Gulliver, roman satirique anglais, par Jonathan Swift.

Ce livre immortel parut sous le voile de l’anonyme au mois de novembre 1726. Le témoignage des contemporains prouvera quelle immense impression il produisit immédiatement. « II y a environ dix jours, écrivait Gay à Swift, qui était alors en Irlande, le 17 novembre 1726, fut publié ici un livre sur les voyages d’un certain Gulliver, qui depuis fait l’entretien de toute la ville; toute l’édition fut vendue en une semaine, et rien n’est plus divertissant que d’entendre les opinions différentes de tout le monde sur ce livre, que tout le monde cependant s’accorde à goûter au dernier point. On dit généralement que vous en êtes l’auteur, mais le libraire déclare qu’il ne sait pas de quelle main il l’a reçu. Du haut en bas de la société, tout le monde le lit, du cabinet des ministres jusqu’à la chambre des nourrices. Vous voyez qu’on ne vous fait pas injure en vous l’attribuant. S’il est de vous, vous avez désobligé deux ou trois de vos meilleurs amis an ne leur donnant pas le moindre soupçon. Peut-être que, pendant tout ce temps, je vous parle d’un livre que vous n’avez jamais vu et qui n’a pas encore touché l’Irlande. S’il en est ainsi, je crois que ce que j’en ai dit suffit pour vous donner l’envie de le lire et que vous me prierez de vous l’envoyer. » « Gulliver ira aussi loin que John Bunyan, » lui écrivait Arbuthnot. Pope félicitait Swift sans détour : Je prédis, écrivait-il, que ce livre fera désormais l’admiration de tous les hommes. »

L’ouvrage se divise en quatre parties : dans la première, le héros du livre est jeté sur la rive d’un pays inconnu ; c’est Lilliput, où les hommes de la plus haute taille atteignent 5 ou 6 pouces anglais. Gulliver rend un service signalé au roi de ce pays en lui livrant la flotte de son ennemi, le-roi de Bléfuscu, qu’il ramène à la remorque au moyen d’un paquet de ficelles ; mais, accusé de haute trahison, pour avoir éteint d’une façon irrévérencieuse un incendie dans les appartements de la reine, il est obligé de s’enfuir à Blét’uscu, d’où un hasard heureux le ramène dans sa patrie. La seconde partie est consacrée au voyage à Brogdingnag. Au lieu de pygmées, ce sont des géants que l’aventurier Jrulliver rencontre dans cette nouvelle contrée, aussi sages, aussi bien gouvernés que les Lilliputiens sont fous et mal dirigés. Puis viennent, dans la troisième partie, les voyages à l’île volante de Laputa, aux Balnibarbes, à Luggnag, à Gloubbdoubdrie et au Japon. Enfin, la quatrième et dernière partie est consacrée au voyage dans le pays des Houyhnhums, où les chevaux sont les rois du pays et ont pour esclaves une espèce d’hommes appelés Yahous.

D’après cet exposé succinct, on peut voir que le plan de cette ingénieuse satire varie dans ses différentes parties. Le voyage à Lilliput est une allusion à la cour et à la politique de l’Angleterre : Walpole est peint dans le caractère du premier ministre Flimnap ; les factions des tories et des whigs sont désignées par celles des talons hauts et des talons plats ; les petits boutiens et les gros boutiens sont les papistes et les protestants, lie prince de Galles, qui traitait également bien les whigs et les tories, rit de bon cœur, dit-on, de la condescendance de l’héritier présomptif, qui portait un talon hàui et un talon plat. Bléfuseu est la France, où l’ingratitude de la cour lilliputienne force Gulliver à venir chercher un asile, pour ne Sas souffrir les tourments que l’on a décidé e lui infliger ; allusion à l’ingratitude de la cour d’Angleterre envers Ormond et Bolingbroke, qui furent obligés de se réfugier en France. Les personnes qui sont initiées à l’histoire secrète du règne de George Ier saisiront facilement les nombreuses allusions dont fourmille cet ouvrage. Dans le voyage à Brogdingnag, la satire est d’une application plus générale, et il est difficile d y rien, trouver qui se rapporte aux événements politiques et aux ministres du temps ; c’est ua jugement des actions et des sentiments des hommes porté par des êtres d’une force immense et en même temps d’un caractère froid et réfléchi, doués d’un esprit éminemment philosophique. Le roi de ce pays est la personnification d’un monarque patriote, indifférent à ce qui est curieux, froid pour ce qui est simplement beau et ne prenant intérêt qu’à ce qui concerne l’utilité générale et le bien de son peuple. Dans le voyage à Laputa, on trouve des allusions aux systèmes philosophiques les plus accrédités au x.vme siècle ; mais Swift dirige surtout son impitoyable raillerie contre l’abus de la philosophie et celui de la science elle-même. Le voyage chez, les Houyhnhums est une diatribe amère contre la nature humaine, inspirée par l’indignation qu’éprouvait l’auteur à la vue des malheurs de l’Irlande. Vivant, malgré lui, dans ce pays où il ne voyait que des tyrans égoïstes et des esclaves opprimés ; ardent partisan de la liberté et de l’indépen-