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Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 3, part. 4, Chao-Chemin.djvu/189

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CHEM

rouvrirent leur bourse aux entreprises honnêtes et prudentes, qui, dans un temps peu éloigné, devaient doubler, tripler, quadrupler leurs épargnes. Aussi, lors de l’inauguration de la ligne d’Orléans, M. Bartholony. président du conseil d’administration, eut-il raison de s’écrier, en terminant son remarquable discours : « Grâce a rétablissement des eAemins de fer d’Orléans et de Rouen, qui seront

« les premiers anneaux de la chaîne qui doit unir les deux mers, l’esprit d’association n’hésitera plus à entrer résolument dans cette carrière féconde des entreprises d’utilité publique que nous avons eu l’honneur

  • d’ouvrir un des premiers, et l’industrie francuise,

se développant rapidement, va rapprocher tous nos intérêts, concentrer toutes nos forces, décupler toutes nos richesses et augmenter la puissance de la nation. «

M. Jullien, l’ingénieur en chef de la Compagnie, avait été secondé par MM. Delerue, Toyot et Mourlhon, ingénieurs des ponts et chaussées : la construction du chemin était généralement regardée comme une cevivre d’une solidité romaine, comme un admirable monument de l’industrie française. Cependant ces magnifiques travaux, qui excitaient l’admiration universelle, plus encore par leur nouveauté que par leur mérite réel, avaient coûté 58,801,203 fr. 45. Le fonds social n’étant

3ue de 40 millions, la Compagnie d’Orléans ut donc recourir, pour combler le détient, à deux emprunts de 10 millions. Malgré cette charge nouvelle, les actions augmentèrent constamment de valeur, car les recettes s’élevaient chaque semaine dans une proportion imprévue, et les dividendes suivaient la même progression. Chaque actionnaire, qui avait touché 32 fr. en 1843, 39 fr. 25 en 1344, 47 fr. 30 en 1645, toucha 61 fr. en 1846 et 62 fr. 10 en 1847. Les actions montèrent jusqu’à 1,200 fr., après être restées longtemps au-dessous du pair, c’est-à-dire au-dessous do 500 fr., dans les débuts de l’entreprise.

La révolution de Février vint arrêter pour un moment la progression jusqu’alors croissante des.recettes. De 62 fr. 70 le dividende s’abaissa à 42 fr. 80 ; il se releva en 1849 à 57 fr., et en 1851 il était de 63 fr. 50, c’est-à-dire plus satisfaisant qu’il ne l’avait jamais été. Au plus fort de cette crise passagère, les actions tombèrent une fois encore au-dessous du pair ; mais elles ne tardèrent pas à regagner tout ce qu’elles avaient perdu. En 1854, chaque actionnaire a touché 69 fr.

« Telle était la situation de la Compagnie d’Orléans, lorsque le 27<mars 1852 parut dans le Moniteur un décret qui approuvait les traités relatifs à la fusion des quatre compagnies

COMPAGNIE DUS CHEMINS DEFEEDH PARIS Â LYON ET À LA. MÉDITERRANÉE. SOMMES PAVÉES ANNUELLEMENT h L’ÉTAT EN ARGENT OU EN SERVICES.

Sommes payées en argent.

Impôts sur les titres 2,400,000 fr.

Contributions directes...- 500, o00

Contrôle et surveillance administrative 480,000

Impôt du dixième et décime sur les transports 1,800,000

Timbres des lettres de voitures et récépissés. 900,000

Services exécutés gratuitement ou à prix réduits.

Postes 6,000,000 fr.

Transports de troupes et de militaires. 9,000,000

— de matériel de guerre 300,000

— des linunees 200,000

— de l’administration télégraphique 90,000

Circulation gratuite "de fonctionnaires 280,000

Total

CHEM

d’Orlé ; ins, du Centre, d’Orléans h Bordeaux et de Tours à Nantes, »

En présence du discrédit qui était tombé sur les valeurs industrielles, et particulièrement sur celles des chemins de fer, ainsi que vient de le constater M. A. Joanne pour la Compagnie d’Orléans, l’État fut obligé d’intervenir. « Il est arrivé bien des fois, dit M. E. Boinvilliers, dans son intéressant mémoire Sur les chemins de fer, depuis qu’il existe des chemijts de fer en France, que l’État est venu en aide aux Compagnies qui les exploitent. Le public n’était pas encore convaincu de la réalité des produits que devaient donner ces utiles entreprises, lorsque le Trésor, mieux avisé, ouvrit hardiment ses. caisses, et montra ainsi une confiance qui ne devait pas tarder à devenir générale. Ce fut le chemin de fer d’Orléans qui, en 1840, profita le premier de cette sage hardiesse ; le chemin de Strasbourg h Bàle en tira également bon parti la même année. En 1842, quelques esprits s’étaient rendus à l’évidence des faits ; mais l’entraînement des masses vers cette nouvelle spéculation faisait toujours défaut : on se décida, en conséquence, à. un grand sacrifice, et toutes les Compagnies reçurent d’énormes subventions. Malgré tous ces efforts, quelques lignes no pouvaient s’achever ; c’étaient, par exemple, Lyon à Avignon, Bordeaux à Cette ; le budget de 1847 vint à leur aide ; en 1848, la Compagnie de Paris à Lyon, en détresse, fut heureusement secourue ; en 1850, ce fut le tour d’Orléans à Bordemix, et de Tours â- Nantes ; en 1852, toutes les lignes reçurent, à titre de magnifique encouragement, la concession de quatre-vingt-dix-neuf mis ; enfin, en 1859, date à jamais célèbre dans l’histoire de la législation de nos voies ferrées, les Compagnies sollicitèrent et obtinrent un dernier appui : <^u leur accordait une subvention éventuelle d’un revenu de 4 fr. 65 pour 100 sur toutes les sommes qu’elles auraient à dépenser pour achever leur réseau, au cas où ce nouveau réseau ne ferait pas ses frais. •

Mais il ne faut pas croire que si les Compagnies ont pu profiter et profitent encore du concours de l’État, ce soit a titre gratuit. Cette opinion n’est pas celle de M. E. Boinvilliers, qui reproduit, dans son travail Sur tes chemins de fer, une note de la Compagnie de Paris à Lyon et à la Méditerranée, note qui présente les sommes payées annuellement à l’État en argent ou en services.

Cette note est une réponse à ceux qui considèrent comme des charges pour l’État ce qui ne serait en réalité, de sa part, que de bonnes spéculations.

CHÈM

CHEM

12,080,000 tr.

15,870,000

— • Subventions. Les subventions fournies par l’État à la Compagnie de Lyon et aux Compagnies qui s’y sont successivement annexées, soit en argent, soit en travaux, s’élèvent à la somme de 255,417,964 fr.

La Compagnie paye donc en réalité à l’État, en argent et en services rendus, un intérêt de 10 IV. 94 pour 100 des subventions reçues. » (État des chemins de fer en 1865, par Edouai’d Boinvilliers.)

Nota. — Les réflexions qui accompagnent ces chiffres sur les rapports entre l’État et les Compagnies, et sur les avantages qui reviendraient au premier en retour des concessions qu’il a faites, ces réflexions ne nous sont pas à proprement dire personnelles. Nous exposons, nous citons, voilà tout. Ici le Grand Dictionnaire remplit le rôle de rapporteur, et les idées que nous avons exprimées sont plutôt celles des nombreux avocats des puissantes Compagnies que les nôtres propres. Plus loin, quand nous traiterons la question au point de 27,950,000 fr.

vue des idées politiques, économiques et sociales, et au point de vue du grand principe de la coopération, nous prendrons à notre tour le rôle de juge, et c’est là seulement que nous exprimerons notre opinion sur ces concessions réciproques qui rappellent fidèlement la scène de l’Amour médecin entre le docteur Thomès et son illustre confrère Desfonandrès, ou, pour être plus précis et plus vrai, Bertrand et Raton do la fable ; et Eaton, ce sera l’État, c’est-à-dire nous tous, servum pecus, qui n’avons pas le bonheur d’être actionnaires.

Afin que nos lecteurs puissent comparer, sous le point de vue des chemins de fer, la France avec les autres pays, nous allons mettre sous leurs yeux un tableau qui leur fera connaître exactement la situation actuelle pour toutes les contrées étrangères où cette industrie a pénétré, d’aprè s les renseignements les plus récents que nous avons pu nous procurer.

ETATS.

Europe (1867).

s* i„ (Angleterre.. . Grande- R J

Bretagne, j Mam]e

France (18CS)

Belgique (1807).........

I Autriche.... États confédérés, Prusse......

ETATS.

Italie

États romains

Pays-Bas

Suisse

Russie...

Espagne, .,

Portugal

Danemark

Suède et Norvège

Turquie

Grèce.....

Corse et autres îles......

Amérique.

à /États-Unis (en 18G7), .

g l Canada.. 2 1 Mexique

—£ ; < Honduras

S I Costa-Rica.

"o. I Antilles

cq Autres États.......

I Nouvelle-Grenade...

â> 1 Venezuela

"3 1 Guyane anglaise., .,

g) Brésil,

'•3 | Pérou I J Chili

S I La Plata.

. Autres États

Afrique.

Algérie

Égypte.

Cap de Bonne-Espérance. Autres États.

Asie.

Indes orientales

Turquie d’Asie

Autres États.

Océanle.

Australie...

Autres États

LONGUEUR TOTALE

EXPLOITÉE.

kil. 5,030

398 1,141 1,331 4,593 5,111

G94

478 2,036

289

87,409 2,430

12

590

a 80

a 34 95 64

152 40

179

300

80

1,200

130

CONCÉDÉE,

kil.

> 2,530 1,328 1,628

a 5,930

a 1,195

02,115

3,160

960

240

50 640 »

80 100

34 610

79 344 240

1,023

347

80

7,320 350

311

LONGUEUR PAR MYR1AMÈTRK

CARRE

EXPLOITÉE.

kil. 1,700 0,498 3,230 3,275 0,090 1,03 0,73 1,253 0,250 0,000

0,738 0,2

0,03 0,04

> 0,005

a 0,01 0,001 0,004 0,04 0,002

0,01 0,02

0,006

0,006

CONCÉDÉE.

kil.

3,162 3,088 5,575

» 1,253

1,417

0,5 0,04 0,4 0,1 0,5 u 0,005 0,009 0,01. 0,000 0,005 0,1 0,01

0,02 0,02

0,05 0,01

0,000

LONGUEUR

par million d’habitants

En 1868 ? l’étendue des lignes concédées, par suite des nouvelles conventions, atteint une longueur totale de 15,812 kil. 502 m.

L’ancien réseau des grandes compagnies y figure pour 7,844 kilomètres.

Le nouveau réseau (avec garantie d’intérêts par l’État) comprend 7,564 kilomètres.

Les treize petites compagnies (Charentes, Vendée, Epinac, Lyon à la Croix-Rousse, Vitré à Fougères, Sathonay à Bourg, Bességes à Alais, la Croix-Rousse à Sathonay, Vireux a 1»’frontière belge, Anzin à Somuin, Chauny à Saint-Gobain et Enghien à Montmorency) exploitent 376 kilomètres.

j^Techn.Des avan t-projels, de la concession et des études définitives. L’État fait continuellement exécuter par des ingénieurs à son service de nouvelles études destinées soit à préparer l’exécution des chemins de fer d’intérêt local, soit à compléter le réseau des grandes Compagnies. Ces avant-projets sont étudiés sur le terrain et rédigés dans les bureaux des ingénieurs de l’État-, ils permettent d’apprécier la dépense d’exécution et tLétablir les conditions de la concession éventuelle ou définitive. Malheureusement, les évaluations sont trop souvent faites par des ingénieurs peu habitués

à construire ou ne se rendant pas toujours exactement compte du prix de la main-d’eeuvre et des matériaux dans les contrées traversées : il en résulte que ces évaluations Sont tout k fait approximatives et ne présentent qu’une garantie très-relative. Cependant il faut reconnaître que les évaluations faites depuis une dizaine d’années ont presque toujours été supérieures à la dépense à faire réellement, tandis que précédemment les dépenses prévues étaient doublées en exécution.

Les concessions une fois accordées aux Compagnies, celles-ci font faire à leurs frais et par leur personnel spécial les études définitives et les travaux.

Les études définitives comprennent une série d’opérations sur le terrain et de travaux préparatoires dans les bureaux. D’abord, à l’aide de l’avant-projet modifié ou non modifié, on indique sur le terrain le tracé définitif. Dans les pays accidentés, par -exemple, On plante un grand nombre de piquets distants environ de 50 m. Ces piquets indiquent l’axe du tracé, et on en place U chaque changement appréciable de la pente du. terrain, comme l’indique la coupe (tlg. l), que l’on appelle en termes techniques le profil en Imtj de lu ligue.

100

15 3

f, Ju "u tt dt

Fig. t.

PROFIL EN LONG. — PAKT1B EN PENTR.

Le» hachure» verticales indiquent les déblais. Lus hachures horiiotiteles indiquent les remblais.

Ces piquets sont placés en a, b, c, .„ Nous verrons bientôt pourquoi, entre deux villes a desservir, le traeé ne peut pas être toujours rectiligne sur le terrain ; il convient d’éviter soit les terrassements, soit les maisons, soit les cours d’eau ; il en résulte qu’en plan il forme une ligne brisée ; mais, comme if ne serait pas possible de faire franchir les angles aux machines locomotives, on atténue les inconvénients des angles par des courbes de raccordement-, mais ces courbes, d’après les cahiers des charges les plus récents, doivent avoir un rayon dont la longueur minimum ne descend pas au-dessous de 300 m. pour les lignes d’intérêt général et 100 m. pour les lignes d’intérêt local. Les courbes de 60 m. de longueur sont franchies sans difficulté, toutefois, par la machine Rarchaert. (Voir plus loin, pour l’exposition complète de toute cette nouvelle question : Chemins de fer d’intérêt local.)

Les courbes sont tracées tangentieliement aux alignements droits ; ce sont toujours des arcs de cercle réguliers.

Les courbes consécutives et dont les centres ne sont pas situés du même côté du tracé doivent être séparées par un alignement droit d’au moins 100 m. de longueur (v. cauïer res charges). " ’

Nous donnons (fig. ï) un exemple des cour-