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CONCORDANT (kon-kor-dan) part. prés, du v. Concorder : Des récils concordant parfaitement,

CONCORDANT, ANTE adj. (kon-kor-dan, an-te — rad. concorder). Qui s’accorde, qui est conforme ; Des témoignages concordants. Des présomptions concordantes. Cette mélancolie donnait à ses paroles et à sa voix une certaine langueur toute concordante à mes propres langueurs. (Lamart.)

—Ane. pratiq. Mariage concordant, Celui où la bonne harmonie régnait entre les conjoints.

— Littér. Vers concordants, Vers ayant une partie qui leur est commune et une partie distincte, et qui sont destinés a être dits ou chantés a la fois, comme dans l’exemple suivant :

iDieu sait s’il reviendra.

Le ciel vous le rendra.

Coure après qui Toudra.

— Miner. Stratifications concordantes, Celles où les couleurs superposées conservent partout leur parallélisme.

— Antonymes. Discordant, disparate, dissonant.

CONCORDANT s. m. (kon-kor-dan — rad. concorder). Mus. Voix intermédiaire entre la taille et la basse-taille, et pouvant également chanter ces deux parties : Un beau CONCOR-DANT. Il On dit aujourd’hui baryton.

—Par ext. Chanteur qui possédait cette voix.

CONCORDANTIEL, ELLE adj. (kon-kordan-si-èl, è-le — rad. concordant). Destiné à établir une concordance : Tableau concordantiel des calendriers.

CONCORDAT s. m. (kon-kor-da — du lat. concordare, concorder). Hist. Traité passé entre le pape et un souverain pour régler les intérêts religieux dans les États de ce dernier : Le concordât de François Ier. Le concordat de 1801. Il y a eu en France quatre coNCORDATS."(Cliéruel.) il Se dit absolument du concordat de 1801 : De toutes les choses entreprises par Bonaparte, celle qui lui coûta le plus fut indubitablement son concordat. (Chateaub.) L’évêque est, d’après le concordat, choisi et nommé par le gouvernement. (Dupanloup.)

— Se disait autrefois d’un Accord entre les officiers d’un régiment pour payer une prime à ceux d’entre eux qui, occupant un grade supérieur, prenaient leur retraite et procuraient ainsi aux autres des chances d’avancement : Les concordats furent prohibés à l’époque où l’on s’occupa de réprimer la vénalité des emplois. (De Chesnel.)

— Législ. comm. Contrat intervenu entre un commerçant en faillite et ses créanciers pour accorder au failli dès délais pour le payement de ses dettes, ou lui faire remise d’une partie plus ou moins considérable des sommes dues : Obtenir son concordat. Attendre l’homologation du concordat.

— Encyc). Hist. On désigne sous le nom de concordat un traité conclu entre le pape, agissant comme chef spirituel de l’Église catholique, et le gouvernement d’une nation, pour régler les rapports réciproques de l’Église et de l’État. Les concordais étaient autrefois des transactions ou contrats, passés entre les supérieurs des monastères et les religieux, entre divers prétendants à un même bénéfice, etc. Lanjuinais, dans un intéressant travail publié à propos du concordat de 1S17, s’exprime ainsi sur l’origine des concordats : « Pendant l’anarchie féodale, nu lieu de lois, on promulguait de tristes concordats entre le souverain fléfeux et le possesseur des grands fiefs, et ceux-ci faisaient avec leurs vassaux des concessions plus ou moins insupportables. Les papes étaient devenus, au

moyen âge, les souverains fléfeux des monastères et des évêchés, disons mieux, du globe terrestre. Ainsi les concordats relatifs aux prétentions de la cour de Rome supposent ou l’absence, ou l’oubli, ou le mépris des règles et des lois. »

Les rapports de l’Église et de l’État, en France, sont réglés par le concordat de 1801, conclu entre Bonaparte, premier consul, et le pape Pie VU. Pour bien comprendre les questions que soulève ce concordat, il est indispensable de connaître les relations antérieures de l’Église et de l’État en France.

Dans l’origine, l’Église dominait l’État, la souveraineté étant de droit divin et les rois tenant leur couronne du pape, vicaire de Jésus-Christ sur la terre : c’était la consécration papale qui faisait le pouvoir des rois. Si les rois acceptaient volontiers les Ijénétices de cette situation, qui rendait en quelque sorte leur autorité et leur personne sacrées pour les populations superstitieuses, ils ne prenaient point aussi facilement leur parti de la dépendance dans laquelle, par suite, ils se trouvaient placés vis-à-vis des papes. L’histoire du moyen âge est remplie par les luttes de la papauté et de la royauté ; mais si les papes n’étaient pas toujours matériellement les plus forts, ils avaient une amie morale redoutable dans l’excommunication, qui, en déclarant anatbèmes les monarques qui leur résistaient, déliait les sujets de leurs serments de fidélité, et menaçait les trônes las plus Solidement établis. Aussi les rois sont-ils toujours urnenés à transiger, et c’est là l’origine des concordats. «Les concordats, remarque judicieusement M. Jules Simon, naquirent du

besoin qu’eurent les rois de secouer la domination temporelle des papes, tout en recon CONC

naissant leur autorité spirituelle, et en se faisant même un appui de cette autorité pour les luttes du dedans et celles du dehors. » Les concordats peuvent donc jouer un grand rôle dans la vie politique des peuples. Nous allons passer en revue les différents concordats, en nous arrêtant tout spécialement, bien entendu, sur celui de 1801, qui est un des principaux épisodes du règne de Napoléon 1er.

Concordat de Worms. Le plus ancien concordat que l’on connaisse est celui qui fut conclu à Worms, en 1122, entre le pape Calixte II et l’empereur Henri V, et qui mit un terme aux longues dissensions du sacerdoce et de l’empire. Par ç, et acte, l’empereur renonçait à l’investiture des terres et fiefs appartenant aux abbayes et aux sièges épiscopaux. De son côté, le pape lui concédait le droit de régale par lo sceptre aux élus.

Concordat germanique. Il faut encore citer le concordat de 1467, conclu entre le pape Nicolas V et l’empereur Frédéric III, et appelé concordat germanique parce que tous les princes d’Allemagne y accédèrent, qui maintint la liberté des élections par les religieux pour les monastères, par les chanoines pour les églises’ métropolitaines et les cathédrales, sous réserve au saint-siége de la confirmation des élus.

Concordat de 1516. « Eu France, ce fut saint Louis qui ht le premier concordat, dit M. Jules Simon (la Liberté, IV" partie, chap. n=r} § 9). » C’est une erreur. La pragmatique sanction de saint Louis, pas plus que celle de Charles VII, ne fut un concordat. Ces actes étaient de simples édits royaux réglant d’autorité des matières religieuses, tandis que les concordats sont des traités synallagmatiques conclus entre un souverain

temporel et le pape. Ces édits, qui consacraient les antiques coutumes, ont fondé les libertés de l’Église gallicane. Ils établissent que les dignités ecclésiastiques seront conférées par les élections qui appartiennent aux chapitres des églises ; ils interdisent les impôts perçus par le pape dans les églises du royaume, et connus sous le nom à’annales ; mais ils constatent, en même temps, la suprématie des conciles sur le pape, la dépendance des conciles eux-mêmes vis-à-vis du roi ; les bulles ou lettres apostoliques, aussi bien que les actes, des conciles, ne pourront être reçues en France qu’avec l’approbation du roi ; le roi jugeait en dernier ressort toutes lès questions de discipline ecclésiastique : ainsi fut établi l’appel comme d’abus, nonseulement contre les attentats aux décrets et canons reçus en France, mais encore contre toutes les vexations ou empêchements de la juridiction ecclésiastique ; en même temps, les appels au pape étaient interdits. Ces points sont essentiels à rappeler, parce qu’ils sont les principes des règles qui, de tout temps, ont régi le droit ecclésiastique en France.

Ces dispositions excitèrent de vives réclamations de la part de la cour de Rome, et c’est sur ces réclamations qu’intervint le concordat de 1516, entre Léon X et François 1er. Les bases en furent arrêtées, en décembre 1515, à Bologne, où le roi, qui se trouvait en Italie, vint avec toute sa suite pour présenter ses hommages au saint-père, ainsi que cela résulte de la préface de cet acte, inséré en entier dans le Recueil des conciles du P. Labbe (t. XIV, col. 358 et suiv.), à la suite des décrets du concile de Latran, tenu à la même époque. Ce concordat se compose de trente-six articles. Les principales dispositions abolissent les élections chapitrales, rétablissent les annates et les appels au pape. Le droit de nommer les évêques et les bénéficiaires est conféré au roi, mais l’institution canonique est exclusivement réservée au sairit-siége. Les autres dispositions de cet acte, qui se réfèrent aux questions de bénéfices, de prieurés et de prébendes sont aujourd’hui sans intérêt.

Ce concordat souleva une opposition très-vive de la part des grands corps du royaume. Le Parlement, soutenu par la résistance de l’Université de Paris, refusa de l’enregistrer, par le motif qu’il était attentatoire aux principes du droit public du royaume aussi bien qu’à ceux du droit ecclésiastique. « Le concordat, disait l’avocat général Lelièvre, de quelque nom qu’on veuille le décorer, ne sera jamais qu’un acte violent où deux puissances se sont mutuellement donné ce qui ne leur appartenait pas : le pape cédant au roi le spirituel, et le roi lui accordant le temporel ; le pape usurpant les droits de l’Église, et le roi ceux de la nation. » Pour engager lo Parlement à enregistrer le concordat, le cardinal Duprat invoque les circonstances : il dit a que le saint-père allait livrer le royaume au premier occupant ; que les Suisses icfusaient de traiter avec le roi de France avant qu’il se fût réconcilié arec le pape ; que le roi d’Espagne et l’empereur allaient renouer cette ligue fatale qui avait réduit le royaume aux dernières extrémités. ■ Ces arguments indiquent bien quelle était alors la nature du pouvoir pontifical, et à quelles influences avaient cédé les auteurs du concordat ; mais le Parlement, après avoir employé douze séances en délibérations, persista dans son refus. Le ministre et le roi menacèrent les magistrats d’user de violence contre eux et de frapper un grand coup. « Obéissez, dit le cardinal Duprat, autrement le roi ne verra en vous que des rebelles, et vous châtiera comme les uerniers de ses sujets. » L’opinion se pro CONC

nonça contre le concordat ; on ordonna des prières et des processions publiques, comme dans les grandes calamités. Enfin l’enregistrement fut imposé par des lettres de jussion du roi, en date du 15 mars 1519. Et la mention porte que la cour n’accomplit cette formalité que sur l’ordre réitéré et exprès du roi : Ex ordinatione et. de prœcepto domini nostri régis, reiteratis vicibus facto.

Quelques historiens prétendent même que cet enregistrement n’eut pas lieu ; et que 1 on annonça, contre la vérité, qu’il avait eu lieu. « Les registres du Parlement ont été vérifiés, dit M. Hutteau dans une brochure publiée en 1818, intitulée : Des concordats de 1516 et de 1817, et l’on s’est convaincu que, en effet, le concordat n’avait pas été enregistré, quoique divers historiens aient affirmé le contraire. » Quoi qu’il en soit, le conflit se prolongea, et le Parlement n’eut aucun égard au concordat dans les causes qui furent portées devant lui ; il continua à juger selon la pragmatique. L’évêché d’Albi vint a vaquer en 1519 ; le chapitre nommaun nouveau titulaire selon lapragmatique, et le roi en désigna un selon le concordat. Le Parlement de Paris, jugeant entre les deux prélats nommés, prononça en faveur de celui qu’avait élu le chapitre d’Albi. En 1521, un évêque de Condom, élu par le chapitre de cette ville, fut également maintenu contre celui que le roi avait nommé. Toutes les causes de cette espèce furent jugées de même, jusqu’à ce qu’une déclaration du 6 Septembre 1529 attribuât au grand conseil la connaissance de tous les procès relatifs aux évêchés, abbayes et autres bénéfices dont la nomination avait été accordée au roi par le pape Léon X. Ainsi, pour faire exécuter le concordat, il fallut, par un acte de violence, dépouiller le Parlement d’une partie de ses attributions et en investir le conseil du prince, beaucoup plus docile aux ordres du ministère. Ce fut un objet perpétuel de regrets pour l’Église de France d’avoir été ainsi dépouillée du droit d’élection ; et François Ier, dit-on, mourut tourmenté de remords pour avoir fait le concordat. Nous lisons dans un discours adressé au roi Henri III par l’évêque dû Saint-Brieuc, au nom du clergé, en 1585 : ■ Sire, votre aïeul, le grand roi François, étant au lit de la mort, déchira à feu votre père, le bon roi Henri, qu’il n’avoit rien dont il tînt sa conscience si chargée que de ce qu’ayant ôté les élections, il s’était chargé de la nomination aux églises et monastères. » V. Recueil des remontrances, édits, eic, etc. (Paris, 1610, fol. 46.) Pendant deux siècles, le clergé, le Parlement, les états généraux réclamèrent sans cesse, jusqu’à ce qu’enfin l’inutilité de leurs plaintes les réduisit à plier sous le joug. « Le concordat, dit Duhamel, est le tombeau où se sont ensevelis les droits de l’Église. • Au xvme siècle, le chevalier d’Aguesseau écrivait encore : « La pragmatique est plus respectable et plus respectée que lo concordat. » En 1765, Gilbert de Voisins déclara en plein Parlement que lo concordat n’avait jamais été que toléré.

Cependant il faut dire qu’après les premières résistances, dont nous venons de raconter les principales manifestations, les jurisconsultes canoniques ne manquèrent pas d’arguments pour justifier le concordat. Le président Ilénault, dans ses Remarques particulières, déclare que « le concordat est là forme la plus propre pour entretenir la tranquillité d’un État ?» et il le trouve juste, en ce qu’il remet aux rois le droit de nomination, qui lui parait légitime, puisque, indépendamment de ce qu’ils représentent la nation, ils ont fondé la plupart des grands bénéfices. « D’un autre côté, ajoute-t-U, les élections étaient devenues une simonie publique, qui élevait aux premières places ceux qui avaient le plus de moyens de les acheter ; les sièges étaient souvent remplis par des sujets peu dignes. » Frayssinous dit, dans les Vrais principes de l’Église gallicane, publiés en 1818 : « Le concordat do 1510 avait ses inconénieutS sans doute. Où sont les choses humaines qui n’en ont pas ? Mais ne dissimulons point ceux des élections ; leur histoire est leur censure, et Thomassin, qui la connaissait dans ses plus grands détails, est convaincu qu’elle suffirait pour nous consoler de l’abolition de cette discipline. • Les adversaires du concordat opposent avec raison qu’à ces brigues, dont on exagère le tableau, il faudrait comparer les intrigues de cour auxquelles s’associaient même des courtisanes pour faire tomber le choix du monarque sur des favoris ; caries évêchés étaient un objet déconvoitise, quand les évêques, grands vassaux de la couronne, possesseurs d’amples revenus, étaient simultanément princes, comtes, barons, etc.

Un autre inconvénient de la nomination des évêques par le roi, c’est que ceux-ci se trouvaient ainsi sous la dépendance absolue du roi. Lors des débats sur la constitution civile du clergé, en janvier 1791, Camille Desmoulins publia à ce sujet un pamphlet fort vif, dans lequel il rappelait ce mot profond de Jacques Ier : « Tant que j’aurai le pouvoir de nommer les juges et les évêques, je suis assuré d’avoir des lois et un évangile qui me plairont, » Nous remarquons le passage suivant dans le pamphlet de Camille Desmoulins : « Comment nos évêques gouvernaient-ils depuis les concordats ? Que leur crosse d’or imitait mal la houlette des apôtres ! Vous n’ignorez pas comment saint Ambroise châtia l’empereur Théodose ; c’est que cet évêque

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avait été nommé par le peuple de Milan. Mais citez-moi un évêque de France qui ait reproché à nos tyrans leur fainéantise, leurs cruautés, ieurs guerres. Autant les violets étaient jansénistes et fronçaient les sourcils dans leurs diocèses, autan», a la cour ils devenaient gracieux, molinistes, tout sucre et tout miel. »

En réalité, le concordat, qui imposait aux rois une grave responsabilité spirituelle, et qui, selon Bossuet, o chargeait la conscience des rois de France d’un poids terrible, puisqu’il mettait le salut de leurs sujets entre leurs mains, • le concordat n’eut d’autre effet

3ue d’assurer leur domination sur les églises e France, de l’indépendance desquelles les libres élections étaient la seule sauvegarda. Les rois s’affranchirent bien vite des concessions temporelles qu’ils avaient faites aux papes. Les annates furent de nouveau abolies, l’appel au papa successivement limité, puis interdit ; on revint aux coutumes consacrées par la pragmatique sanction^qui n’avait d’ailleurs jamais été formellement abrogée, le concordat s’étant contenté d’en corriger les principales dispositions sans les mentionner. L’appel comme d’abus fut réglementé par une ordonnance de 1539 ; dix-huit ans après le concordat, on remit en vigueur les ordonnances qui laissaient dépendre de l’approbation du roi la publication en France des bulles pontificales et des actes des conciles. Les actes du concile.de Trente notamment, qui contenaient la condamnation formelle des prin- ’ cipes gallicans, no furent pas reçus en France ; de sorte qu’en définitive le concordai tourna tout entier à l’avantage de l’État. Le clergé de France lui-même n’épargna rien pour ca résultat. Dans la fameuse déclaration de 16S2, il ne revendique ni pour lui-même, ni pour les fidèles, les privilèges que le concordat de 1516 a ravis à l’Église de France. Appuyant contre le pape les prétentions du roi, l’aristocratie ecclésiastique consacre une dernière fois son alliance servile avec le despotisme, dont elle ne croit plus avoir rien a craindre parce qu’elle en est L’urne. Les quatre articles ne sont autre chose que la transmission à la couronne de France des droits de l’Église gallicane méconnus, usurpés par la théocratie romaine.

Il y avait cependant un point dans le concordat qui permettait au pape de tenir tête aux prétentions royales et de soutenir avec avantage la lutte : c’était l’institution canonique. Lo droit qu’avait le pape de refuser l’institution canonique aux candidats présentés par le roi lui donnait en réalité une autorité avec laquelle le rot devait toujours finir par compter.

Le cas se présente notamment sous le règne de Louis XIV, dans l’affaire des régales. Pendant onze années, les nominations du roi restèrent sans réponse de la part dela courde Rome : trente-deux évêchés étaient vacants. Ce fut à cette occasion qu’eutlieu la fameusedéclaration de 1682, et il fut question de proclamer le schisme et de nommer un patriarche pour l’Église de France. Le grand roi dut céder ; il dut se rétracter et s’humilier, et n’apaisa Rome qu’au moyen de lettres qui furent longtemps pour elle un grand sujet de triomphe. On ne sait pas assez que Louis XIV écrivit au pape en ces termes : « Je suis bien aise de faire savoir à Votre Sainteté que j’ai donné les ordres nécessaires pour que les choses contenues dans mon édit du 2 mars 1682, touchant la déclaration faite par le clergé de France, à quoi les conjonctures passées m’avaient obligé, ne soient point observées, et désirant non-seulement que Votre Sainteté soit informée de mes sentiments, mais encore que tout le monde connaisse, par une marque particulière, la vénération que j’ai pour ses grandes et saintes qualités. »

Le concordat de 1516 fut définitivement aboli par les décrets de l’Assemblée constituante, qui établirent la constitution civile du clergé, rétablissant les élections ecclésiastiques et exigeant des prêtres un serment civique. Ce système, qui, dans l’origine, fut peu favorable à la liberté des cultes et provoqua de fâcheuses persécutions contre les prêtres non assermentés, fit place, sous le Directoire, à une ère de complète liberté, qui fut une expérience intéressante de la séparation de l’Église et de l’État. L’épreuve, comme nous le démontrerons, ne fut pas aussi défavorable à ce système qu’on le suppose généralement : le culte catholique lui-même y gagna beaucoup plus qu’il n’y perdit.

Concordat de 1801. On répète bien gratuitement que Bonaparte, par le concordat de 1801, releva les autels. Dès l’an 1796, quatre ans avant le concordat, 32,214 paroisses étaient rendues au culte, et -1,571 autres paroisses étaient en réclamation pour obtenir le même avantage, et M. Thiers lui-même affirme que le culte desservi par les prêtres non assermentés était beaucoup plus suivi que celui qu’exerçaient les anciens prêtre3 constitutionnels.

Bonaparte, en faisant le concordat avec le pape, obéit à d’autres considérations qu’il importe de bien constater. Tout le secret de sa conduite est dans ce raisonnement que M. Thiers a rapporté sans le moindre commentaire : > Il me faut, disait-il, un pape qui rapproche au lieu de diviser, qui réconcilie les esprits, les réunisse et les donne au gouvernement sorti de ta Révolution pour prix de