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la protection qu’il en aura obtenue. Et pour cela, il me faut te vrai pape catholique, apoetoliqueet romain, celui qui siège au Vatican. Avec les armées françaises et des égards, j’en serai toujours le maître. Il fera ce que je lui demanderai dans l’intérêt du repos général ; il calmera les esprits, les réunira sous sa main et les placera dans les miennes. »

Lu Fayette a déterminé le vrai caractère du concordat le jour où il adressa ce mot spirituel au premier consul, à l’occasion de ses négociations avec Rome : « Vous avez envie de vous faire casser la petite fiole sur la tête.

— Nous verrons, nous verrons, " ditBonaparte. Bourrienne, en racontant cet entretien, ajoute : •Voilàl’origine véritable du concordai.* Il fallait une religion pour le peuple, et il fallait que cette religion fût dans la main du gouvernement.

Bonaparte donc, qui aspirait à devenir maître de la France et qui, pour exécuter son projet, avait besoin du secours des prêtres, conçut l’idée du concordat, et entama dans ce but les négociations avec la cour de Rome. On peut suivre dans les historiens du Consulat, et notamment dans le livre de M. Thiers, le détail des incidents auxquels donna lieu cette-comédie diplomatique, sur laquelle la publication récente des Mémoires du cardinal Consalvi a achevé de faire la lumière la plus complète. Le pape Pie Vif envoya à Paris monsignor Spina, avec lequel le premier consul aboucha le fameux abbé Bernier, le pacificateur de la Vendée. Le point de départ du concordat, tel que l’entendait Bonaparte, était la constitution civile décrétée en 1790, quelque peu revisée, avec les modifications qui pouvaient la rendre acceptable à Rome. On circonscrivit la répartition diocésaine qui aifectait un évêché à chaque chef-lieu départemental et plaçait 1 évêque en face du préfet ou plutôt sous la main du préfet. Il fallait donc obtenir de la cour de Rome une réduction des anciens diocèses, et c’était ce qu’elle avait énergiquement refusé au malheureux Louis XVI. C’était d’ailleurs un véritable coup d’État ecclésiastique, puisqu’il s’agissait non-seulement de changer les anciennes circonscriptions territoriales, mais encore d’imposer leur démission à tous les évêques anciens titulaires. Il fallait aussi amnistier l’ancien clergé constitutionnel et comprendre tous les partis dans la nomination des nouveaux évêques, pardonner aux prêtres mariés et reconnaître la vente des biens de l’Église. Monsignor Spina se récria beaucoup en entendant ces propositions, et en même temps il insistait pour que, dans le préambule du concordat, on déclarât la religion catholique religion de l’État. Le premier consul maintint ses prétentions et refusa nettement la condition impérative que le pape mettait au concordat. Monsignor Spina se trouvant fort

embarrassé, Bonaparte prit le parti d’envoyer directement au pape son projet de concordat, avec ordre à M. de Cacault, ambassadeur de France près du saint-siége, de le soumettre à l’acceptation immédiate et définitive du pape. Le pape désigna les trois cardinaux Gavandini, Antonelli et Gerdil pour l’examiner et faire ensuite leur rapport à une confrégation de douze cardinaux. Enfin, après

es négociations qui tirèrent en longueur et où le pape ne parvint pas davantage à s’entendre avec M de Cacault que le premier

consul n’avait pu le faire avec monsignor Spina, un contre-projet de concordat fut envoyé au premier consul. La patience de celui-ci était à bout, et, laissant éclater la violence de son caractère, il donna l’ordre à M. de Cacault de quitter Rome sous cinq jours si le projet de concordat, tel qu’il l’avait envoyé, n’était pas accepté, et de signifier au pape que son refus aurait des conséquences déplorables, autant pour la religion que pour la domination temporelle. Cet ultimatum causa une grande terreur au pape et à son premier ministre, le cardinal Consalvi, qui était clairement désigné par les dépêches du premier consul comme l’auteur dt.s interminables délais de cette négociation. Mais le pape ne pouvant accéder au désir de Bonaparte, et M. de Cacault déclarant ne pouvoir rester à cause des ordres formels qui lui étaient donnés, il fut décidé que Consalvi irait lui-même à Paris, ce qui flatterait le premier consul, e, t que, pour prévenir les embarras qui pourraient résulter du départ de l’ambassadeur français, MM. de Cacault et Consalvi sortiraient de Rome dans la même voiture : c’est ce qui eut lieu. Le cardinal arriva à Paris le 21 juin. Fidèle à la politique d’intimidation dont il ne se départit plus jusqu’à la fin des négociations, le premier consul reçut le cardinal le jour même, non en tête à tête, mais au milieu d’une parade où assistaient les deux autres consuls, le Tribunal, le Sénat, les ministres, les généraux, et il lui annonça d’un ton bref que les pourparlers allaient commencer immédiatement, et que tout devait être fini dans cinq jours, qu’autrement il pourrait partir ; il ajouta que si le concordat n’était pas signé dans ce délai, son parti était pris, et qu’il détacherait la France de la religion catholique. Les conférences s’ouvrirent sous cette intimidation : le cardinal put arriver à s’entendre avec l’abbé Bernier ; tout fut arrêté, et il fut convenu que la signature aurait lieu le 10 juillet ; mais alors le cardinal Consalvi raconte qu’au moment où il allait signer ta copie, il s’aperçut que ce traité n’était pas celui dont les commissaires ecclésiastiques* étaient convenus entre eux, dont était convenu le pre CONC

mier consul lui-même. Le secrétaire d’État de Pie VII refusa obstinément de signer le projet " ainsi substitué. Cependant le Moniteur avait déjà parlé du résultat obtenu par le voyage de Consalvi, et le soir une fête devait être donnée à l’occasion de la signature du concordat. Le premier consul entra dans une violente colère ; mais la fermeté de Consalvi déjoua cette nouvelle tactique : il parvint à obtenir une légère modification, et cette négociation laborieuse se termina enfin le

15 juillet, où eut lieu la signature définitive du concordat.

Le préambule du concordat nous fait connaître la transaction intervenue sur les prétentions de la Cour de Rome, qui voulait que la religion catholique fût proclamée religion d’État, ou du moins religion dominanté : • Le gouvernement de la République reconnaît que la religion catholique, apostolique et romaine est la religion de la grande majorité des citoyens français. Sa Sainteté reconnaît égule’ ment que la même religion a retiré et attend encore en ce moment le plus grand bien et le plus grand éclat dé l’établissement du culte catholique en France et de la profession particulière qu’en font les consuls de la République. En conséquence, d’après cette reconnaissance mutuelle, tant pour le bien de la religion que pour le maintien de la tranquillité intérieure, ils sont convenus de ce qui suit. •

Le premier article porte que la religion catholiqueseralibrementexercée en France. Son

culte sera public, en se conformant aux règlements de police que le gouvernement jugera nécessaires pour la tranquillité publique. C’est là le point de départ que l’on a invoqué pour justifier les articles organiques. L’art. 2 porte qu’il sera fait par le saint-siége, de concert avec le gouvernement, une nouvelle circonscription des diocèses fiançais. L’art 3 exhorte les titulaires à se démettre de leurs sièges, pour le bien de la paix et de l’unité, et porte que s’ils se refusent à ce sacrifice commandé par Je bien de l’Église, il sera pourvu par de nouveaux titulaires au gouvernement des évêchés delà circonscription nouvelle. M. Dupin, dans son Manuel au droit ecclésiastique, dit au sujet de cet article : « Cet article contient un excès de pouvoir manifeste. Cette mesure a été, de la part du pape, un attentat au droit des évêques de France, un véritable coup d’État. Tout ce que les conjonctures avaient de grave a bien pu servir de texte pour essayer de Yexcuser ou dé l’expliquer, mais né saurait le légitimer. Il ne faut pas que les ultramontains regardent un fait aussi exorbitant comme un précédent dont la cour de Rome puisse jamais s’autoriser pour croire qu’elle est en droit de priver et déposséder à son bon plaisir les évêques français de leurs sièges, ou pour attenter d’une manière quelconque à leurs droits. » Les art. 4 et 5 portent que les nominations aux évêchés nouveaux et à ceux qui vaqueront par la suite seront faites par le premier consul, et l’institution canonique sera donnée par le saint-siége, suivant les formes établies par rapport à la France avant le changement de gouvernement. L’art. 6 porte que les évêques, avant d’entrer en fonctions, prêteront directement, entre les mains du premier consul, un serment de fidélité dans les termes suivants : «Je jure et promets à Dieu, sur les saints Évangiles, de garder obéissance et fidélité"au gouvernement établi par la constitution de la République française. Je promets aussi de n’avoir aucune intelligence, de n’assister à aucun conseil, de n’entretenir aucune ligue, Soit au dedans, soit au dehors, qui soit contraire à latranquillité publique, et’si, dans mon diocèse ou ailleurs, j’apprends qu’il se trame quelque chose au préjudice de l’État, je le ferai savoir au gouvernement. » Il faut remarquer que ce serment, surtout par cette dernière disposition, fait des évêques de véritables fonctionnairesf de l’État. L’art. 7. prescrit le même serment aux ecclésiastiques du second ordre. L’ait. 8 prescrit que la formule de prière suivante soit récitée, à l’issue de l’office divin, dans toutes les églises catholiques de France : Domine salvam fac llempublicam. L’art. 9 porte que les évêques feront, en s’entendant avec le gouvernement, une circonscription nouvelle des paroisses de leur diocèse. L’art. 10 remet aux évêques la nomination des curés, mais leur choix ne pourra tomber que sur des personnes agréées par le gouvernement. L’ai t. 11 dit que les évêques pourront avoir un chapitre dans leur cathédrale et un séminaire pour leur diocèse. L’art. 12 porte que toutes les églises non aliénées, nécessaires au culte, seront remises à la disposition des évêques. L’art. 13 ratifie la vente des biens du clergé. Il est ainsi conçu : «Sa Sainteté, pour le bien de la paix el l’heureux rétablissement de la religion catholique, déclare que ni Elle ni ses successeurs ne troubleront en aucune manière les acquéreurs des biens ecclésiastiques aliénés, et qu’en conséquence la

propriété de ces mêmes biens, les droits et revenus y attachés demeureront incommutables entre leurs mains ou celles de leurs ayants cause.» M. Dupin remarque, dans son Manuel du droit ecclésiastique, au sujet de cet article : « Cette espèce de ratification pa - le pupe des ventes des biens du clergé n’était* nullement nécessaire pour leur validité ; mais elle a été utile comme effet moral. » L’art. H porte que le gouvernement assurera un traitement convenable aux évêques et aux curés. L’art. 15 porte que le gouvernement prendra

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également des mesures pour.que les catholiques français puissent, s ils le veulent, faire en faveur des églises des fondations. Par l’art. 16, le pape- • reconnaît dans le premier consul de la République française les mêmes droits et prérogatives dont jouissait près de lui l’ancien gouvernement.» Enfin.1 art. 17 prévoit le cas où l’un des successeurs du premier consul ne serait pas catholique. En ce cas, les droits et prérogatives mentionnés en l’article précédent et la nomination aux évêchés seront réglés, par rapport à lui, par une nouvelle convention.

L’exposé des motifs du concordat, fait au Corps législatif par Portaîis, acheva de bien déterminer le caractère purement politique de cet acte. Portaîis insista surtout sur la nécessité de la religion en général, sur l’impossibilité de créer une religion nouvelle, et sur les raisons politiques qui donnent ; au christianisme des titres à une protection spéciale. Nous trouvons dans le rapport de l’ortalis cette considération remarquable, qui confirme ce que nous avons dit sur le but que poursuivait Bonaparte dans le concordat : • Le pape, comme souverain, ne peut plus être redoutable à aucune puissance ; il aura même toujours besoin de l’appui de la France, et cette circonstance ne peut qu’accroître l’influence du gouvernement français dans les affaires générales de l’Église, presque toujours mêlées à celles de la politique.» Ainsi, en 1802, le pouvoir temporel du pape paraissait au ministre du premier consul le plus sûr moyen de le tenir dans la dépendance de la France. Avis aux catholiques qui défendent le pouvoir temporel comme la garantie de l’indépendance pontificale.

Mais le concordat provoqua de vives résistances dans Kopinion publique en France et de la part des grands corps de l’État. « Le gouvernement consulaire, dit Mme de Staël dans ses Considérations sur (a Révolution française, eût contenté l’opinion en maintenant en France la tolérance telle qu’elle existe en Amérique. » Les Mémoires de Bourrienne et ceux de La Fayette nous apprennent que ce dernier fit auprès du premier consul une démarche pour le dissuader de rétablir une religion officielle, et lui conseiller « d’accepter dans son intégrité- le principe américain d’égalité entre tous les cultes, chacun d’eux restant isolé du gouvernement et les sociétés religieuses se formant à leur gré, sous la direction du prêtre de leur choix et payé par elles. • Mais Bonaparte avait besoin du pape : ce fut la propre expression dont il se servit en parlant à Bourrienne de la démarche de La’Fayette. Dans l’entourage même du premier consul, on était généralement hostile au concordat. M. de Talleyrand, M. Rœderer, Laplace, Lagrange, Monge, tâchèrent de dissuader le premier consul de ses projets, appuyés par ses frères eux-mêmes, qui lui déconseillaient fortement ce qu’ils regardaient

comme une réaction imprudente ou prématurée. Le conseil d’État, quand le concordat lui fut soumis, l’accueillit avec une froideur significative. Le Corps législatif, en appelant à sa présidence Dupuis, l’auteur du livre fameux sur l’Origine de tous les cultes, et endésignant Grégoire comme candidat au sénat, marqua de la manière la plus énergique son opposition au concordat. Le Sénat lui-même s oublia jusqu’à sanctionner à une immense majorité un choix évidemment désagréable au maître. Quant au Tribunat, il montra, à l’occasion de la présentation du Code civil, une opposition si vive, qu’on put prévoir en quels termes il s’exprimerait sur le concordat. • On annonçait, dit M. Thiers, une vive résistance et des discours scandaleux contre le concordat. Le premier consul ne voulait point que de tels éclats vinssent troubler une auguste cérémonie, et il résolut d’attendre, pour célébrer le rétablissement des cultes, qu’il eût ramené ou brisé le Tribunat.» Il fallut le coup d’État qui, profitant d’une équivoque de la constitution, mutila cotte institution gênante, pour préparer l’adoption du traité avec la cour de Rome. Enfin, c’est par une loi du S avril (ia germinal) 1802 que le concordat, auquel étaient adjoints les articles organiques, lut converti en loi ; et le 18 avril, jour de Pâques, il fut publié avec une pompe solennelle. Thibaudeau, dans ses Mémoires sur le Consulat, raconte qu’au retour de Notre-Dame, après le dîner d’apparat qui célébrait la paix des consciences, le premier consul, qui était fort satisfait de la réussite d’une si épineuse affaire, disait à quelques-uns de ses généraux ; • N’est-il pas vrai qu’aujourd’hui tout paraissait rétabli dans l’ancien ordre ? — Oui, répondit l’un d’eux, excepté deux millions de Fiançais qui sont morts pour la liberté et Qu’on ne peut faire revivre.» Le fait estque plusieursgénéraux uecachèrent pas ce jour-là leur mécontentement, et même, durant la cérémonie, affectèrent’ une contenance peu décente. «Mais, dit M. Thiers, le premier consul leur exprima son mécontentement avec une fermeté qui n’admettait pas la réplique et qui ne laissait pas craindre une récidive.» Mais la.paix entre Rome et le premier consul ne devait pas durer-longtemps. Nous avons rappelé les principaux incidents du conflit à propos des articles organiques. Le refus du pape de prononcer la nullité du mariage de Jérôme Bonaparte avec M’le Patterscit, d’une part, et sa résistance à la prétention de Napoléon d’être empereur de Rome, achevèrent d’envenimer les rapports. Le pape usa de l’arme puissante qui lui avait été laissée

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et qui avait eu raison de Louis XIV : il refusa l’investiture aux nouveaux évêques. Pie VII, retiré àSavone, répondit, le 26 août 1809, au cardinal Maury, qu’il n’instituerait pas d’évèques et qu’il ne fallait rien attendre de son ministère spirituel tant qu’on ne satisferait point à ses réclamations politiques. L’empereur convoqua un conseil ecclésiastique composé de cardinaux et d’évêques, qui ; e réunit à Paris en novembre 1809 et dont faisaient partie les cardinaux Fesch, Maury et Caselli. On leur adjoignit une commission civile où se trouvaient Portaîis et Treilhard. Le conseil décida que le concordat était un contrat synal-Jagmafique, que le pape n’avait pas le droit

d’enfreindre. Le pape était tenu d’accorder l’investiture aux évêques, ou d’articuler les ■ motifs canoniques de son refus : les motifs articulés dans sa lettre du 26 août étaient dénués de fondement, vu qu’il ne pouvait se plaindre d’aucune innovation dans le régime ecclésiastique de la France, et qu’aucun événement politique ne devait influer sur ses fonctions pontificales. Le conseil déclara for’ wellement que la souveraineté temporelle des papes n’est qu’un accessoire étranger à 'leur ministère ; qu’elle peut leur être enlevée, comme die leur a été donnée, par les hommes et par les événements. — En attendant, on suppléa à l’institution du pape en suivant un précédent qui avait été conseillé par Bossuet dans des circonstances analogues : les prélats élus par l’empereur gouvernèrent leurs diocèses en qualité d’administrateurs capitulaires, c’est-à-dire en vertu des pouvoirs dont les chapitres les investissaient ; parce que, d’après les coutumes ecclésiastiques, en cas de vacance, les diocèses étaient administrés par les chapitres. Cette marche fut adoptée notamment à l’égard do Maury, qui, nommé archevêque de Paris, gouverna le diocèse comme administrateur capitulaire. Mais cette situation engendra de graves désordres. Il se forma une secte de catholiques purs qui exerçaient un culte clandestin, auquel présidaient des prêtres qui se dérobaient à la surveillance des . évêques, et opposaient aux vicaires capitulaires des vicaires apostoliques qui s’intitulaient expressément délégués du saint-siége. Le g février 1811, l’empereur fit une nouvelle convocation du conseil ecclésiastique institué en 1809. L’assemblée décida «que l’institution donnée conciliairement par le métropolitain à ses suffragants et par le plus ancien èvêque de la province au métropolitain devrait tenir lieu des bulles pontificales, jusqu’à ce que* le pape ou ses successeurs consentissent à l’exécution du concordat, que si le concordat était jamais revis-, il conviendrait d’y ajouter une clause qui obligerait le pape, ou à donner l’institution, ou à produire dans un délai déterminé un motif canonique de refus, faute de quoi le droit d’institution serait dévolu de plein droitau synode métropolitain. » Le conseil cite un grand nombre de textes et de faits établissant que l’obligation d’obtenir des bulles pontificales pour exercer l’épiscoput n’est pas une institution de la primitive Église, et que si le pape persistait dans son refus, « le retour aux lois primitives serait justifié par la première de toutes les lois, la nécessité ; que le pape lui-même a reconnue et à laquelle il s’est soumis lorsque, pour rétablir l’unité de l’Église de France, il s’est mis au-dessus de toutes les régies ordinaires en supprimant, par un coup d’autorité sans exemple, toutesles anciennes églisas pour en créer de nouvelles. » Le pape répondit aux décisions du conseil de Paris en excommuniant, le 10 juin, Napoléon et le peuple français. Napoléon soumit alors cette question 4 son conseil : «La bulle d’excommunication étant contraire à la charité chrétienne, ainsi qu’à l’indépendance et à l’honneur du trône, quel parti prendre pour que, dans les temps de trouble et de calamité, les papes ne se portent point à de tels excès de pouvoir ?» Le conseil répondit «que les bulles d’excommunication lancées par Boniface VIII contre Philippe le Bel, par Jules II contre Louis XII, par Sixte-Quint contre Henri IV n’avaient jamais eu force de loi en France ; qu’aucun évêque français n’avait voulu les publier ni les recevoir ; que la bulle de Pie VII les surpassait toutes en injustice, <en, inconvenance et en nullité, et qu’à une époque où la saine critique avait démontré la fausseté des titres qui servent d’appui à ces tentatives irréligieuses, on ne devait pas s’attendre à les voir renouveler. »

Un concile de tous les évêques français, que Napoléon convoqua à Paris, se montra moins complaisant. De violents débats s’élevèrent dans le sein du concile sur sa propre compétence ; quelques voix protestèrent contre l’odieux traitement infligé au pape, qui était retenu prisonnier à Sa voue, et la bulle pontificale qui excommuniait Napoléon fut imprudemment rappelée. L’empereur, alors, prononça la dissolution du concile et fit jeter à Vincennes trois prélats : les évêques de Troyes, de Tournay et de Gand, Puis, sur le conseil de l’abbé Maury, il convoqua tous les évêques séparément et demanda >ur adhésion individuelle à la déclaration qui autorisait le métropolitain à donner l’institution aux évêques nommés par l’empereur, si, après six mois révolus, ceux-ci ne l’avaient pas obtenue de la cour de Rume. Quatre-vingt-six évêques sur cent seize ayant approuvé ce projet, l’empereur convoqua de nouveau le concile, dont, cette fois, il obtint un vote presque unanime. Une commission composée d’évêques et de