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GEPI

phurismos ; de gephura, pont). Antiq. gr. Nom donné aux railleries dont on poursuivait les initiés, sur le pont du Cèphise, pendant les fêtes de Cérès.

— Encycl, Sitôt que les initiés, revenant du temple d’Eleusis, étaient parvenus au pont du Céphise, les habitants des pays voisins, accourus en foule pour voir passer la procèssion, se répandaient en sarcasmes et en plaisanteries licencieuses sur ia troupe sainte. Les apostrophes un peu vives que les gavroches parisiens lancent à l’envi sur les bandes de masques qui courent à travers nos rues à l’époque du carnaval ne nous donneraient qu une bien faible idée des saillies en usage chez les Grecs. Les paroles ne suffisaient pas : on y ajoutait les gestes les plus expressifs, c’est-à-dire les plus obscènes. Par là, les fêtes de Cérès touchaient à celles de Bacchus ; car l’inventeur de la vigne n’a jamais songé a en mettre la moindre feuille sur les nudités qu’on promenait dans ses fêtes. Les gépliyrismes ressemblaient fort aux lazzis grossiers des bacchanales. Il est probable qu’on y portait aussi processionnellement le phallus, et que tous ceux qui prenaient part à la cérémonie devaient adorer et baiser cette image obscène. Le kteis, organe sexuel féminin, figurait aussi dans ces fêtes, et rappelait sou3 la forme la plus crue le grand fait de la génération. Mais le sens sérieux de ces cérémonies échappait souvent aux assistants, qui ne voyaient là qu’une adoration ridicule et licencieuse, un prétexte aux plus révoltantes obscénités. Un des personnages, qui jouait le principal rôle dans les mascarades et les bouffonneries du pont, était cette Bmibo ou Jambe, célèbre par ses saillies spirituelles. Malheureusement, nous sommes obligé d’ajouter (on nous pardonnera cette sincérité devant laquelle ne doit pas reculer un historien) que Baubo ne provoquait pas le rire par ses seules plaisanteries. Elle soulevait parfois la robe de Cérès, et par des attouchements obscènes excitait bien plus sûrement la folle gaieté de la sainte déesse, en chair et en os. Les Pères de l’Église n’ont pas assez d’anathèines pour flétrir ces horribles pratiques des religions anciennes.

On se demandera pourquoi ces scènes plus que bizarres se passaient sur un fleuve, et pourquoi ce nom de géphyrisme tiré d’un pont ? « La première idée qui se présente, dit Creuzer, en songeant à l’origine égyptienne du qulte de Cérès, c’est de rapprocher de l’usage grec les écarts du même genre que se permettaient les femmes dans Le trajet, à Bubustis, le long du Nil et sur les eaux du fleuve. Mais des rapprochements plus positifs encore vont nous révéler peut-être la véritable origine de cet usage. Il est question d’une Démêler Gepliyrasa, qui tenait ce surnom des Géphyréens, habitants d’un canton de l’Attique, » C’est reculer la difficulté, et rien de plus : car il faudra savoir ensuite d’où vient ce nom de Géphyréens. Ceux qui le portaient avaient dû être des pontifes de Minerve ou de Cérès G»p/iyr»a, protectrice de ia navigation, dont le culte avait une origine phénicienne, et dont la statue était portéésur des bateaux ou placée sur des ponts. Tout s’éclaire alors, et cette origine égyptienne et phénicienne du culte de Vemeter Gep/iyrsea nous explique les obscénités que nous avons rappelées ci-dessus. Les Grecs ont emprunté à l’Orient, non-seulement les cérémonies et le rituel, mais aussi la mimique et les licencieuses parodies qui en faisaient l’accompagnement.

GEPIDES. Les historiens anciens s’accordent généralement à considérer les Gèpides comme appartenant à la race des Goths. Mais cette opinion est vivement contestée aujourd’hui. « Nous doutons, ditM. Amédée Tardieu, que lu science ethnographique, qui, il mesure qu’elle se précise, rejette un plus grand nombre des opinions des anciens, ratifie l’origine fothique qui jusqu’ici a toujours été attribuée ce peuple ; d’autant plus que son existence historique se résume tout entière dans une lutte incessante contre les nations germaniques en gênerai et contre les Goths en partie culier. et dans une perpétuelle alliance avec les populations slaves, •wénfettes, lyges, bastarnes, etc. » Dans cette indécision sur l’origine des Gèpides, nous devons nous borner à résumer a grands traits l’histoire de ce peuple.

Sous le règne de l’empereur Décius, Fastida, le premier roi connu des Gèpides, sortant tout à coup de l’Ile du fleuve Viscla (delta de la Vistule, Wizla ou Vechsel), envahit le territoire des Bourguignons ou Burgun des, qui s’étaient établis dans le nord de 1 Allemagne, les força de s’expatrier et d’aller s’établir dans les Gaules. Ce premier succès ne fit qu’accroître l’ambition de Fastida, qui ne craignit pas de s’attaquer au puissant roi des Goths-, vnais son armée fut taillée en pièces près du fleuve Aucha. On ne sait si dans la suite les Gèpides tentèrent contre les Goths de» attaques plus heureuses, ou si la grande migration des Wisijioths, au m* siècle, leur laissa le champ libre ; toujours est-il que nous les retrouvons, au ive et au " siècle, établis bien loin de leur point de départ, entre le Tisianus au N. et au N.-E-, le Danube au S.-O. et le Tnusis à VE. Lors de la fameuse bataille de Châlons, le roi des Gèpides, Ardaric, que les auteurs du temps appellent « io braa droit du puissant Attila dans les

GER

combats et le premier dans ses conseils, » commandait l’aile droite de l’armée du terrible roi des Huns. Après la mort de celui que l’on surnommait le Fléau de Dieu, les Gépides s’attaquèrent aux Huns eux-mêmes, secouèrent leur joug, après les avoir battus dans plusieurs rencontres, et ponssèrent.les peuples asservis à imiter leur exemple. • On les voit dès lors, dit M. Amédée Tardieu, s’adjuger d’autorité, à titre de nation dominante, la demeure même des Huns, l’antique Dacie, qui prit le nom de Gépidie ; et, tandis que les Ostrogoths, comme les Wisigoths au siècle précédent, demandaient asile sur le territoire romain’et obtenaient de l’empereur Marcien un établissement dans les plaines de la Pannonie, le fier Gépide ne stipulait dans son traité avec l’empire que la paix et les présents annuels d’usage. Puis, de leur poste avancé de Sirmium, capitale de la Savie au sud de la Pannonie, ils continuèrent à batailler.contre les Ostrogoths, leurs ennemis nés. Ils s’unirent aux Rugiens, aux restes des Scires et aux Sarmates pour venir en aideàHunimund et à Alaric, rois des Suèves, engagés dans une guerre terrible contre Théodomir et Widemir, chefs des Goths de Pannonie ; et, plus tard, a eux seuls, quand Théodoricle Grand, pour obéir aux instigations de l’empereur Zenon, marcha contre Odoacre, en 488, ils essayèrent, mais en vain, de lui barrer le passage au pied des Alpes juliennes. » La conduite des Gèpides offensa gravement Théodoric qui, maître de l’Italie, résolut de tirer de l’affront qu’il avait reçu une éclatante vengeance. À cet effet, il envoya un de ses comtes, à la tête d’une puissante armée, contre Sirmium, qui ne put soutenir l’assaut et se renditsans conditions. Son roi, Transaric, l’é■vacua en toute hâte, laissant sa mère captive aux mains des Goths, Mois la Savie n’était habitée que par une ftvible partie de la nation gépide. Ce que l’on pourrait appeler le cœur de la nation était établi dans la Dacie. Non contents de braver les Romains, les Gèpides, en compagnie des Hérules et des Bulgares, faisaient de là de fréquentes incursions dans l’Illyrie, qu’ils dévastaient à leur aise, lorsque l’empereur Justinien, las de ces déprédations, suscita contre eux les Lombards. Pour se venger des Lombards, les Gèpides donnèrent asile à Hidigis, proche parent d’Audouin, roi de leurs ennemis, et qui avait plus de droit au commandement quj le prince régnant. Les Lombards, à leur tour, après la mort du roi des Gèpides, prirent parti contre leur chef légitime, son fils Thorisend. Les Romains, habiles a saisir toutes les occasions d’augmenter leur territoire et de se débarrasser des peuples qui entravaient leurs projets ambitieux, mirent tout en œuvre pour accroître l’aniinosité qui régnait entre les deux peuples. Les Gèpides et les Lombards ne tardèrent pas à, en venir aux mains ; mais, après une bataille sanglante, dans laquelle le fils du roi des Lombards tua de sa propre main le fils du roi des Gèpides, un traité de paix fut signé entre les deux peuples. Toute animosité paraissait éteinte à jamais, lorsque, sous les successeurs d’Audouin et de Thorisend, grâce aux intrigues delà cour de Ûonstantinople, la guerre se ralluma plus acharnée que jamais. Après plusieurs batailles sans résultat, un dernier choc eut lieu, et il fut terrible. IV n’y avait pas eu, dit Jornandès, de plus épouvantable bataille depuis Attila. Plus de 40,000 hommes y périrent de part et d’autre. Les Gèpides, exterminés, disparaissent pour toujours de la scène historique.

GEl’PËRT (Charles-Édouard), célèbre philologue allemand, né à Stettin le 29 mai 1811. Il lit ses études aux universités de Breslau, de Leipzig et de Berlin, fut reçu docteur en 1833 et professa, depuis cette époque, la philologie à Berlin. Homme de goût et d’érudition, il s’est occupé surtout des poètes dramatiques et a dirigé de 1843 à 1848 les.représentations, données par les étudiants, des

pièces de Plaute et de Térence, et reprises en 1859. En 1845 et 184e, il fit en Italie un voyage scientifique, collationna à Milan le fameux Palimpseste ambrosien de Plaute, à propos duquel il eut avec M. Ritscbi une discussion assez violente. Il étudia en même temps les manuscrits de Térence, compara entre eux ceux de Rome, de Paris et de Berlin, recherches dont il a consigné les résultats dans diverses dissertations et dans les Annates de philologie et de pédagogie de John (Leipzig, années 1852 et 1853). Il s’était d’abord occupé des poëtes grecs et, dans ses loisirs, il a fait quelques éludes sur l’histoire de la Prusse. Parmi ses œuvres, il faut signaler la dissertation Qeversu alyconeo (Berlin, 1833), où. il essaye de ïéfuter les théories de Hermann sur un point spécial de la métrique ancienne ; il a continué de faire la critique de son ancien maître d’une manière plus générale dans les Recherches sur les rapports de la théorie métrique de Hermann avec la tradition (1835), et dans l’Exposé des catégories grammaticales (1836). Plus tard, il donna un ouvrage de plus longue haleine : l’Origine des poèmes homériques (Leipzig, 1840, 2 vol.). 11 a publié différentes pièces de Plaute.

GEQUITIBA s. m. Cé-kui-ti-ba). Bot. Nom brésilien des courataris.

GER, village et comm. de France (Manche), cant. de Barenton, arrond. et à 15 kiloro. N.-E. de Mortain, sur un plateau élevé ; pop.

GERA

aggl., 401 hab.—pop. tôt., 2,722 hab. Poteries, papeterie, filature de laine.

GER, rivière de France. Elle prend sa source au pied du pic de Paragrano (Haute-Garonne), et se jette par plusieurs bras dans la Garonne, après un parcours de 41 kilom.

GERA, rivière d’Allemagne. Elle naît au pied duSchneekopf (tète de neige), sur le versant oriental de la forêt de Thuringe, dans le duché de Saxe-Cobourg, coule au S., se partage en deux branches a Érfurt et se jette dans l’Unstrut, après nu cours de 72 kilom.

GERA, ville d’Allemagne, capitale de la principauté de Reuss-Sehleiz, ch.-l. d’une seigneurie de ce nom, à 25 kilom. S. — O. d’Altenbourg, et à 60 kilom. S.-E. de Leipzig, dans une belle vallée, non loin de la rivière de l’Elster blanche ; 14,260 hab. Résidence du prince régnant, siège du gouvernement, d’une cour d appel, des autorités du bailliage. Gymnase, école normale. Industrie très-active, fabriques de lainages, cotonnades, soieries, chapeaux unis, savon, porcelaine, poterie, carrosserie, imprimeries et teintureries de coton, broderies. La ville, régulièrement et bien bâtie, avec des rues larges et éclairées au gaz, fut détruite une première fois, en 1450, pendant la guerre civile de Thuringe, une seconde fois, en 1780, par un in. cendie. La seigneurie de Géra, enclavée entre la Saxe-Altenbourg, la Saxe-Weimar et la régence prussienne deMersebourg, a une superficie de 474 kilom. carrés et 32,000 hab. Elle renferme une ville, Géra, et un bourg, Langenberg.

GERACE, autrefois Locres, Hiberacium pendant le moyen âge, ville du royaume d’Italie, «jprovince et à 53 kilom. N.-E. de Reggio,

près de la mer Ionienne ; 6,000 hab. Evèehé ; eaux minérales sulfureuses. Cette ville fut en partie ruinée par le tremblement de terre de 1783. On y remarque les ruines de l’ancienne cathédrale, et les débris d’un aqueduc remontant à la plus haute antiquité. Au S. de la ville, on voit les ruines qui inarquent, diton, l’emplacement de l’antique cité de Locri Epizephyrii.

GERAH s. m. Cé-râ — mot hébreu), Métro ! . Ancien poids dont se servaient les Juifs pour régler la taille de leurs monnaies. I I pesait 16 grains d’orge, c’est-à-dire seize fois l’équivalent de Ogr. 042432, soit 689 milligr. 872. Il fallait vingt gérahs pour faire un sicle.

GÉRAINE s. f. Cé-rè-ne — lat. géranium, même sens»). Bot. Syn. de géranium.

GEIIALDIM (Alexandre), prélat italien, né à Ameliu (Ombrie) en 1455, mort à Hispaniola, aujourd’hui Haïti, en 1525. D’abord échanson de la reine de Castille, Isabelle la Catholique, il embrassa la carrière ecclésiastique à la suite d’un assez long séjour en France, devint ensuite précepteur des princesses royales espagnoles, appuya Christophe Colomb, lorsqu’il demanda à la cour de Castille des navires pour aller à la découverte de l’Amérique, et fut chargé de diverses missions diplomatiques. Geraldini avait occupé successivement les sièges épiscopaux de Volterreet de Monte-Cervino{ 1494), lorsqu’il fut appelé en 1520 à l’évêché d’Hispaniola. Il se rendit dans cette île, que les Espagnols n’avaient pas encore entièrement conquise, et y termina sa vie. Il a composé : ftinerarium ad reyiones sub tfquinoctiali ploya couslilulas (Rome, 1631, in-12), relation naïve et curieuse de son voyage le long des côtes d’Afrique, avec la description d’Hispaniola, — Son frère, Geraldini (Antonio), poète, néàAmelia(Ombrie) en 1457, mort en 1488, se rendit à Rome, fut couronné comme poète, au Capitule, eu 1479, et reçut du pape Innocent VIII le titre de protonotaire. On a de lui : Eçloyœ, seu car- wji bucolicum (Rome, 1485) ; Bucolica sacra (Rome, 1486).

GÉRAMB (Ferdinand, baron de), écrivain ascétique, né à Lyon en 1777, d’une famille hongroise, mort à Rome en 1848. Il eut une existence fort agitée avant de revêtir l’habit religieux. Il servit d’abord en Autriche, ou il commanda un corps francen qualité de colonel, et, lors de la campagne de Prusse, il appela les Allemands aux armes dans des proclamations passionnées. Étant passé en Espagne en 180S, pour y combattre encore les Français, il y reçut, avec le grade de général, la mission dé se rendre en Angleterre pour y recruter une légion. À Londres, il est poursuivi pour dettes, et il soutient pendant quinze jours, dans sa maison, un siège en règle contre la police. En 1812, on le retrouve en Danemark, où il est livré à Napoléon, qui le fait enfermer au donjon de Vincennes. Mis en liberté lors de la première Restauration (1814), il entre au couvent de la Trappe de Port-du-Salut, près de Laval.

Homme du monde, doué d’une âme ardente, habitué au commandement, il avait toutes les qualités qui mènent aux emplois élevés dans la vie monastique ; aussi devint-ii procureur général de son ordre. Une protestation qu’il lit paraître, lors des ordonnances contre les Jésuites, attira sur lui l’attention, et, après les journées de juillet 1830, il dm sortir de France. Il fit, en 1831, un voyage en terre sainte qui eut un grand retentissement. II en publia la relation en 1S36, sous le titre de Pèlerinage à Jérusalem et au mont Sinaï (3 vol. in-12). On a encore de lui des ouvrages ascétiques, dont les plus estimés sont ! Ai-

  • GERA

pirations aux sacrées plaies de Notre-Seigneur (1826, in-18) ; Lettres à Eugène sur l’Eucharistie (1827, in-12) ; l’Unique chose nécessaire, ou Jié/lexions, pensées et prières pour mourir saintement (1829, in-lS) ; Marie au pied de la croix (1S41, in-S°) ; Une journée consacrée à Marie (1836, in-18) ; Voyage de ta Trappe à Borne (1844).

GÉRANCE s. f. Cé-ran-se — rad. gérer). Fonctions de gérant : La gbrakck d’une exploitation. La géraïîCe d’un journal.

— Mar. "Machine employée en Hollande pour décharger les vaisseaux.

GÉ11AND-DE-VAUX (SAIINT-), village et comm. de France (Allier), cant. de Neuillyle-Réal, arrond. et à 27 kilom. de Moulins ; 1,232 hab. Château en ruines, classé parmi les monuments historiques, et bâti au xvie siècle sur l’emplacement d’un château féodal qui appartint à Jacques Cœur.

GÉUÀND-LE-VUY (SAINT-), village et Connn. de France (Allier), cant. de Varennes, arrond, et à 7 kilom. de La Palisse ; 1,736 hab. Église du xesiècle renfermant de belles peintures murales. Pie VII, se rendant à Paris pour le sacre de Napoléon Ier, fut reçu en 1804 dans le château de Saint-Gérand, qui date du xv» siècle.

GÉRANDO s. m, (jé-ran-do). Arboric. Variété de poire.

GÉIIANDQ (Joseph-Marie, baron de), publiciste et philosophe français, né à Lyon en 1772, mort en 1842. Il se disposait à entrer dans la congrégation de l’Oratoire et était sur le point d’achever ses études au séminaire* de Saint-Magloire, à Paris, quand la Révolution éclata. Le séminariste se fit soldat à vingt et un ans ; on était en 1793. Il fit partie de l’armée insurrectionnelle de Lyon, qui lutta contre la Convention. Dans une sortie opérée durant le siège, de Gérando fut blesse et fait prisonnier. Quoique mis en liberté par le conseil de guerre chargé de le juger, il était suspect. Il ne tarda pas à être arrêté de nouveau et condamné à mort. Il parvint à se sauver, néanmoins, et se réfugia en Suisse, puis en Italie. Un de ses parents, négociant à Naples, lui confia le soin de tenir se3 écritures. L amnistie générale décrétée par la Convention (4 brumaire an IV) lui permit de rentrer en France. Camille Jordan, son ami et son ancien compagnon d’exil en Suisse, ayant été nommé député au conseil des Cinq-Cents, revint avec lui à Paris ; mais le coup d’État du 1S fructidor (4 septembre 1797), qui amena la proscription de Camille Jordan, détermina de Gérando à reprendre le chemin de l’exil. Les deux amis se fixèrent à Tubingue ; mais de Gérando s’y ennuya et " profita de la première occasion pour rentrer dans son pays. Ne sachant trop que faire, il s’engagea dans un régiment de chasseurs, et se trouvait en garnison à Colmar quand le titre d’un sujet mis au concours par l’Institut lui tomba par hasard sous les yeux : il s’agissait d’étudier » l’influence des signes sur le langage. » De Gérando écrivit son mémoire à la hâte et obtint le prix. « M. de Gérando, dit M. Mignet dans sa Notice historique sur Gérando, fut, à Paris, l’objet d’un extrême empressement, et, ce qui valait mieux, l’objet d’une efficace sollicitude. On l’exempta du service militaire, afin qu’il pût penser tout à son aise ; mais comme, avant de penser, il faut vivre, la ministre de l’intérieur le nomma bientôt secrétaire du bureau consultatif des arts et du commerce, place dont le modeste traitement suffit à ses modestes besoins, et dont les attributions, alors assez bornées, ne devaient pas apporter beaucoup d’obstacles à la poursuite de ses travaux philosophiques. Ses juges devinrent ses amis, et, après l’avoir introduit dans la spirituelle société d’Auteuil, ils l’attachèrent comme correspondant à IAcadémie qui l’avait couronné. » En l’an XII, M. de Champagny, ministre de l’intérieur, le nomma son secrétaire général. En 1806, il accompagne l’empereur en Italie, où il contribue à l’organisation du nouveau royaume ; il est chargé de rétablir l’université de Turin et prend part aux négociations qui eurent pour résultat de réunir la ville de Gènes à la France. En 1808, l’empereur l’admit au conseil d’État en qualité de maître des requêtes. Il fut nommé conseiller d’État en 1810, puis, en 1812, intendant de la Catalogne, baron de l’empire avec une dotation de 25,000 fr. de rente, et officier de la Légion d’honneur.

« Avec une méthode, dit M. Mignet, qu’ii porta des études philosophiques dans les nia ; tières administratives, et une sagesse qui lui inspirait la bienveillance dans la justice, M. de Gérando, dressant des projets, rédigeant des rapports, instruisant les affaires il Fond, les décidant bien, les expédiant vite, évitant de son mieux l’arbitraire, tempérant, autant qu’il était en lui, l’autorité, sut tout à la fois bien mériter de l’État et des particuliers, surtout des employés du gouvernement, au profit desquels il fonda les premières caisses de retraite connues pour les vieux employés qui ne pouvaient plus rendra à l’administration de services actifs. C’était un homme comme il en fallait sous l’Empire, où tout était à faire. Il donnait ses jours et quelquefois ses nuits au travail. » Aussi ne pouvaiton se passer de lui Le roi Louis XVIII le maintint au conseil d’État. À son retour de l’Ila d’Elbe, Napoléon ne lui en sut pas gré. De Gérando avait d’ailleurs refusé de s’asso-