Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/18

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le sentiment le plus bas avait dicté ce choix. Fouché savait que le général Becker avait personnellement à se plaindre de l’Empereur, et il ne doutait pas de trouver en lui un cœur aigri et disposé à la vengeance. On ne

    lui fera sentir qu’il a été pris dans l’intérêt de l’État et pour la sûreté de sa personne ; que sa prompte exécution est indispensable ; enfin que l’intérêt de Napoléon pour son sort futur le commande impérieusement.

    Signé duc d’Otrante. »


    Copie de l’arrêté de la commission du gouvernement.
    Paris, le 26 Juin 1815.

    « La commission du gouvernement arrête ce qui suit :
    « Art. Ier. Le ministre de la marine donnera des ordres pour que deux frégates du port de Rochefort soient aimées pour transporter Napoléon Bonaparte aux États-Unis.
    « Art. II. Il lui sera fourni jusqu’au point de rembarquement, s’il le désire, une escorte suffisante, sous les ordres du lieutenant général Becker, qui sera chargé de pourvoir à sa sûreté.
    « Art. III. Le directeur général des postes donnera, de son côté, tous les ordres relatifs aux relais.
    « Art. IV. Le ministre de la marine donnera des ordres nécessaires pour assurer le retour immédiat des frégates aussitôt après le débarquement.
    « Art. V. Les frégates ne quitteront pas la rade de Rochefort avant que les sauf-conduits demandés ne soient arrivés.
    « Art. VI. Les ministres de la marine, de la guerre et des finances sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent arrêté.

    Signé duc d’Otrante. »


    Copie de la lettre du duc d’Otrante au ministre de la guerre.
    Paris, le 27 juin 1813, à midi.

    « Monsieur le maréchal, je vous transmets copie de la lettre que je viens d’écrire au ministre de la marine relativement à Napoléon. La lecture que vous en prendrez vous fera sentir la nécessité de donner des ordres au général Becker pour qu’il ne se sépare plus de la personne de Napoléon, tant que celui-ci restera en rade. Agréez, etc.

    Signé duc d’Otrante »


    Copie de la lettre du duc d’Otrante au ministre de la marine.

    « Monsieur le duc, la commission vous rappelle les instructions qu’elle vous a transmises il y a une heure. Il faut faire exécuter l’arrêté tel que la commission l’avait prescrit hier, et d’après lequel Napoléon Bonaparte restera en rade de l’Île d’Aix jusqu’à l’arrivée des passeports. Il importe au bien de l’État, qui ne saurait lui être indifférent, qu’il y reste jusqu’à ce que son sort et celui de sa famille aient été réglés d’une manière définitive. Tous les moyens seront employés pour que la négociation tourne à sa satisfaction ; l’honneur français y est intéressé ; mais en attendant on doit prendre toutes les précautions possibles pour la sûreté personnelle de Napoléon, et pour qu’il ne quitte point le séjour qui lui est momentanément assigné. Agréez, etc.

    Signé le duc d’Otrante »


    Le ministre de la guerre à M. le général Becker.
    Paris, le 27 juin 1815.

    « J’ai l’honneur de vous transmettre ci-joint un arrêté que la commission du gouvernement vous charge de notifier à l’empereur Napoléon, en faisant observer à Sa Majesté que les circonstances sont tellement impérieuses, qu’il devient indispensable qu’elle se décide à partir pour se rendre à l’Île d’Aix. Cet arrêté, fait observer la commission, a été pris autant pour la sûreté de sa personne que dans l’intérêt de l’État, qui doit toujours lui être cher. Si Sa Majesté ne prenait pas une résolution à la notification de cet arrêté, l’intention de la commission du gouvernement est que la surveillance nécessaire soit exercée pour empêcher l’évasion de Sa Majesté, et prévenir toute tentative contre sa personne. Je vous réitère, monsieur le général, que cet arrêté est pris dans l’intérêt de l’État et pour la sûreté personnelle de l’Empereur, et que la commission du gouvernement considère sa prompte exécution comme indispensable pour le sort futur de Sa Majesté et de sa famille. J’ai l’honneur, etc. »
    N.B. Cette lettre est demeurée sans signature, le prince d’Eckmulh, au moment de l’expédier, ayant dit à son secrétaire : « Je ne signerai jamais cette lettre ; signez-la, ce sera assez ; » ce que le secrétaire, à son tour, ne se sentit pas plus la force de faire. A-t-elle été envoyée ou non ? c’est ce que je ne saurais dire.