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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/220

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Quoi qu’il en soit, lorsque nous venions dans le jardin, l’Empereur s’arrêtait la plupart du temps près de Tobie, et me le faisait questionner sur son pays, sa jeunesse, sa famille, sa situation actuelle ; on eût dit qu’il cherchait à étudier ses sensations. L’Empereur terminait toujours la conversation en me faisant lui donner un napoléon.

Tobie s’était fort attaché à nous ; notre venue semblait être sa joie ; interrompant aussitôt son travail, et appuyé sur sa bêche, il contemplait d’un air satisfait nos deux figures, n’entendant pas un mot de notre langage entre nous, mais souriant d’avance aux premières paroles que je lui traduirais. Il n’appelait l’Empereur que le bon monsieur (the good gentleman) : c’était le seul nom qu’il lui donnait ; il n’en savait pas davantage.

Je me suis arrêté sur ces détails parce que les rencontres de Tobie étaient suivies, de la part de l’Empereur, de réflexions toujours neuves, piquantes, et surtout caractéristiques. On connaît la mobilité de son es-