Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/322

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loi de la Constituante, qui excluait ses membres de la législature. La Convention ne tomba pas dans la même faute ; elle joignit à la constitution deux lois additionnelles, par lesquelles elle prescrivit que les deux tiers de la législature nouvelle seraient composés des membres de la Convention, et que les assemblées électorales de départements n’auraient à nommer, pour cette fois, qu’un tiers seulement des deux Conseils. La Convention prescrivit de plus que ces deux lois additionnelles seraient soumises à l’acceptation du peuple, comme parties inséparables de la constitution.

Le mécontentement fut dès lors général. Le parti de l’étranger surtout voyait tous ses projets déjoués par ces dispositions. Il s’était flatté que les deux Conseils auraient été entièrement composés d’hommes neufs et étrangers à la révolution, ou même en partie de ceux qui en avaient été victimes ; et dès lors il espérait d’arriver à la contre-révolution par l’influence même de la législature.

Ce parti ne manquait pas de très bonnes raisons pour cacher les véritables motifs de son mécontentement. Il alléguait que les droits du peuple étaient méconnus, puisque la Convention, qui n’avait eu de mission que pour établir une constitution, usurpait les pouvoirs d’un corps électoral en donnant elle-même à ses membres les pouvoirs d’un corps législatif ; que la preuve que la Convention savait qu’elle agissait contre l’intention du peuple, c’est qu’elle imposait aux assemblées primaires la condition arbitraire de voter à la fois sur l’ensemble de la constitution et ses lois additionnelles. La Convention ne devait vouloir que ce que voulait le peuple. Pourquoi ne laissait-elle pas voter séparément sur la constitution et les lois additionnelles ? c’est qu’elle savait que les lois additionnelles seraient unanimement rejetées. Quant à la constitution en elle-même, elle était préférable sans doute à ce qui existait, et, sur ce point, tous les partis étaient d’accord. Les uns, il est vrai, eussent voulu un président au lieu de cinq directeurs ; les autres auraient désiré un Conseil plus populaire ; mais, en général, on vit cette nouvelle constitution avec plaisir. Quant au parti de l’étranger, qui était dirigé par des comités secrets, il n’attachait aucune importance à des formes de gouvernement qu’il ne voulait pas maintenir ; il n’étudiait dans la constitution que le moyen d’en profiter pour opérer la contre-révolution, et tout ce qui tendait à ôter l’autorité des mains de la Convention et des conventionnels lui était agréable.


III. Les lois additionnelles sont rejetées par les sections de Paris. — Les quarante-huit sections de Paris se réunirent. Ce furent quarante-huit