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et la copie de l’armistice. Napoléon avait pris cet officier au 13 vendémiaire ; il était alors chef d’escadron au 21e de chasseurs. Il a été marié depuis à la sœur de l’Empereur, est devenu maréchal d’empire, grand amiral, grand-duc de Berg et roi de Naples. Il a eu une grande part dans toutes les opérations militaires du temps ; il a toujours déployé un grand courage, et surtout une singulière hardiesse dans les mouvements de la cavalerie.

La province d’Alba, que les Français traversèrent, était de tout le Piémont le pays le plus opposé à l’autorité royale, celui qui contenait le plus de germes révolutionnaires : il y avait déjà éclaté des troubles ; plus tard encore il en éclata de nouveaux. Si, au lieu de négocier, Napoléon eût voulu continuer la guerre avec le roi de Sardaigne, c’est là qu’il eût trouvé le plus de secours et le plus de disposition à l’insurrection. Ainsi, au bout de quinze jours, le premier point du plan de campagne était atteint, les plus grands résultats obtenus ; les forteresses piémontaises des Alpes étaient en notre pouvoir ; la coalition se trouvait affaiblie d’une puissance qui avait cinquante mille hommes sur pied, et qui était plus imposante encore par sa position. La législature nationale avait décrété cinq fois que l’armée d’Italie avait bien mérité de la patrie, dans les séances des 21, 22, 24, 25 et 26 avril.

En conformité aux conditions de l’armistice de Cherasque, le roi de Sardaigne envoya à Paris le comte de Revel pour traiter de la paix définitive. Elle y fut conclue et signée le 15 mai. Par ce traité, la place d’Alexandrie resta à demeure aux armées françaises. Suze, Labrunette, Exil, furent démolies. Les Alpes se trouvèrent ouvertes, et le roi demeura à la disposition de la république, n’ayant plus d’autre point fortifié que Turin et le fort de Bard.


Éloge de Sainte-Hélène par l’Empereur – Petites ressources de l’île.


Jeudi 1er février.

La philosophie la plus heureuse et la plus sage est celle qui nous fait voir parfois le côté le moins défavorable des circonstances les plus fâcheuses : l’Empereur, dans ce sentiment sans doute, nous disait aujourd’hui, en se promenant au fond du jardin, qu’après tout, exil pour exil, Sainte-Hélène était peut-être encore la meilleure place. Dans les latitudes élevées, nous aurions eu beaucoup à souffrir des rigueurs du froid, et nous aurions expiré misérablement sous l’ardeur brûlante de toute autre île du tropique. « Le rocher de Sainte-Hélène, continuait-il, était stérile,