Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/500

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S’il avait voulu se retirer en Russie, disait-il, Alexandre, qui s’était dit son ami, qui n’avait eu avec lui que des querelles politiques, s’il ne l’eût pas maintenu roi, l’eût du moins traité comme tel. Le gouverneur n’en disconvenait pas.

S’il eût voulu, continuait-il, se réfugier en Autriche, l’empereur François, sous peine de flétrissure et d’immoralité, ne pouvait lui interdire non seulement son empire, mais même sa maison, sa famille, dont lui Napoléon était membre. Le gouverneur en convenait encore.

« Enfin, si, comptant mes intérêts personnels pour quelque chose, lui avait-il dit, je me fusse obstiné à les défendre en France les armes à la main, nul doute que les alliés ne m’eussent accordé par traité une foule d’avantages, peut-être même du territoire. » Le gouverneur, qui était demeuré longtemps sur les lieux, est convenu positivement qu’il eût obtenu sans peine quelque grand établissement souverain. « Je ne l’ai pas voulu, avait poursuivi l’Empereur, je me suis décidé à quitter les affaires, indigné de voir les meneurs de la France la trahir ou se méprendre grossièrement sur ses plus chers intérêts ; indigné de voir que la masse des représentants pouvait, plutôt que de périr, transiger avec cette indépendance sacrée, qui non moins que l’honneur, est aussi une île escarpée et sans bords. Dans cet état de choses, à quoi me suis-je décidé ? quel parti ai-je pris ? J’ai été cher-