Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/571

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ne m’avez suivi ici que pour m’observer et me vendre. Votre plus grand éloignement contre le gouverneur, sa plus grande animosité contre vous, ne sont que des apparences convenues pour mieux cacher votre jeu. » Et comme je riais de la tournure spirituelle qu’il créait et de la volubilité avec laquelle il l’exprimait : « Vous riez ? a-t-il repris ; mais je vous assure qu’ici je n’improvise pas, je ne suis que l’écho de ce qu’on a essayé de faire parvenir jusqu’à moi… Et comment voulez-vous, continua-t-il, qu’une tête sans sagacité, faible et crédule, ne soit pas ébranlée par de tels rapprochements et de telles combinaisons ? Allez, mon cher, si je n’étais supérieur à la plupart des légitimes, j’aurais pu déjà me priver de vos soins ici, et votre cœur droit serait peut-être réduit aujourd’hui à dévorer au loin les cruels tourments que cause l’ingratitude. » Et il finit en disant : « Pauvre et triste humanité !… L’homme n’est pas plus à l’abri sur la pointe d’un rocher que sous les lambris d’un palais ! il est le même partout ! l’homme est toujours l’homme ! »


Hoche – Divers généraux.


Vendredi 10.

Le temps a été affreux ; il était impossible de sortir. L’Empereur a été contraint de marcher dans la salle à manger ; il a fait allumer du feu dans le salon, et s’est mis à jouer aux échecs avec le grand maréchal. Après dîner, il nous a lu l’histoire de Joseph, dans la Bible, et ensuite l’Andromaque de Racine.

Plusieurs bâtiments étaient entrés la veille au soir : c’était la flotte