Page:Lassalle - Discours et pamphlets.djvu/10

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nouvelles lois sont promulguées. Au contraire, vous savez qu’il est presque nécessaire que tous les ans des lois plus ou moins nombreuses soient édictées ; et pourtant aucune d’entre elles ne peut l’être sans modifier les rapports juridiques existant jusqu’alors. Car, si la nouvelle loi n’apportait pas de modification à l’état juridique antérieur, elle serait superflue et on ne la promulguerait pas. Vous ne prenez donc pas en mal la modification des lois ; vous la considérez au contraire comme la tâche régulière des corps gouvernementaux. Mais si l’on touche jamais à la constitution, vous prenez mal la chose et vous vous écriez : on attente à notre constitution. D’où vient cette différence ? Elle est si incontestable que, dans beaucoup de constitutions, il est déclaré qu’aucune modification ne peut jamais y être apportée qu’avec l’approbation des deux tiers des voix du corps législatif au lieu de celle de la simple majorité. Dans d’autres encore, le corps législatif ne peut jamais, même d’accord avec le pouvoir, apporter une modification à la constitution et, s’il la décidait, il faudrait encore qu’une nouvelle assemblée fût élue extraordinairement et dans ce but précis par la nation pour décider de la modification à introduire.

Tous ces faits nous prouvent donc que le sentiment commun des nations considère une constitution comme quelque chose de plus saint, de plus fixe, de plus immuable qu’une loi ordinaire.

Je reprends donc ma question. En quoi se distingue une constitution d’une loi ordinaire ?

On répondra d’ordinaire à cette question de la façon suivante : une constitution n’est pas une loi comme une autre ; elle est la loi fondamentale du pays. Et il est